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«Trois amigos»: à l'assaut du protectionnisme

Mélanie Marquis - La Presse Canadienne

OTTAWA – Le point central des discussions devait être le climat pour ce sommet des «trois amigos», mais les incessants discours protectionnistes du candidat républicain Donald Trump et le récent vote pour la sortie du Royaume-Uni de l’Union européenne ont chamboulé l’ordre du jour.

Justin Trudeau, Barack Obama et Enrique Peña Nieto ont tenu mercredi à véhiculer un message farouchement pro-libre marché, se portant à la défense de l’Accord de libre-échange nord-américain (ALÉNA) et du Partenariat transpacifique (PTP).

À l’issue de leurs échanges au Musée des Beaux-Arts d’Ottawa, mercredi, les trois hommes ont vanté les mérites du bloc uni et prospère que forment le Canada, les États-Unis et le Mexique, un marché d’environ 480 millions de personnes.

L’heure, ont-ils insisté, n’est pas à l’isolationnisme. Même si les Britanniques ont choisi de divorcer de l’Union européenne. Même si, au sud de la frontière, l’aspirant à la présidence Donald Trump véhicule un message résolument protectionniste.

«Ma réplique à tous ceux qui, à droite ou à gauche, tiennent des discours protectionnistes ou anti libre-marché est la suivante: Vous avez le droit d’être inquiets des tendances. Mais ce que vous prescrivez (comme remède) ne fonctionnera pas», a affirmé le président Obama.

«Prescrire un retrait des traités commerciaux et se concentrer uniquement sur le marché national est le mauvais remède», a-t-il déclaré lors de la conférence de presse de clôture de cette rencontre trilatérale.

À ses côtés, M. Trudeau a fait valoir que les échanges commerciaux ne sont pas seulement bons pour l’économie mondiale, mais également pour les citoyens. «On sait que les industries qui exportent plus de biens paient des salaires 50 pour cent plus élevés que des industries qui n’exportent pas», a-t-il offert.

Le Canadien et l’Américain n’ont pas prononcé le nom de Trump, préférant souligner que les relations entre nations dépassent celles entre les individus qui guident leurs destinées. Ils ne se sont pas non plus lancés dans des analyses à son sujet.

Le président mexicain, en revanche, ne s’est pas gêné pour remettre de l’avant un parallèle qu’il avait déjà établi entre le magnat de l’immobilier — qui a tenu des propos jugés xénophobes depuis le début de la campagne à la présidence des États-Unis — et deux dictateurs tristement célèbres.

«Nous avons des dirigeants politiques, des acteurs politiques, qui usent de démagogie ou de slogans populistes, qui veulent éliminer ou détruire ce qui a été construit (…) Hitler et Mussolini l’ont fait, et tout le monde connaît le résultat. Cela a été une tragédie pour l’humanité», a offert M. Peña Nieto.

Plan climatique

Malgré ces nuages qui planaient sur la rencontre, tout n’a pas été sombre: les «trois amigos» sont malgré tout ressortis clairement enthousiastes de ce premier sommet en plus de deux ans, avec des objectifs «ambitieux, mais atteignables» d’un plan d’action pour combattre les changements climatiques.

Les discussions qualifiées d’«amicales, mais franches» par Justin Trudeau ont permis d’accoucher d’un plan d’action sur le climat prévoyant entre autres que les trois pays tenteront de générer 50 pour cent de leur électricité à partir de sources d’énergie propre d’ici 2025.

Les États-Unis et le Mexique auront beaucoup de rattrapage à faire, leur niveau respectif de production se situant à 32 et 18 pour cent, bien loin derrière le 81 pour cent du Canada, selon les données fournies par le gouvernement canadien. À l’échelle continentale, on en est à 37 pour cent.

Il s’agit donc, pour les producteurs canadiens d’énergie propre, d’une «occasion extraordinaire» d’exporter, a-t-on indiqué au bureau du premier ministre Trudeau. Évidemment, avec son réseau hydroélectrique, le Québec pourrait en être l’un des grands bénéficiaires.

L’organisation Greenpeace a salué le plan, mais s’est tout de même dit «profondément préoccupé(e) par l’inclusion de fausses solutions comme le « captage et stockage du carbone » et le nucléaire qui sont très coûteuses et risquées et créeraient plus de problèmes qu’elles n’en résoudraient».

Les dirigeants nord-américains avaient été invités dans la capitale fédérale par un nouveau premier ministre canadien ayant fait du réchauffement des liens entre les trois pays l’une de ses principales priorités.

Le président Obama a félicité Justin Trudeau d’avoir prouvé à quel point il prenait cet engagement au sérieux en convoquant ce premier sommet au Canada en l’espace de plus d’une décennie.

Cette visite officielle au Canada est vraisemblablement la dernière pour le dirigeant américain, qui cédera sa place à la Maison-Blanche après l’élection de novembre prochain. Pour l’occasion, il avait été invité à livrer un discours à la Chambre des communes.

Autres points saillants du sommet

— Le Mexique se joint à l’entente Canada—États-Unis sur le méthane qui avait été conclue en mars dernier. Cet accord prévoit une réduction de 40 à 45 pour cent des émissions de méthane — l’un des responsables des changements climatiques — d’ici 2025 en dessous des niveaux de 2012.

— Le passage aux frontières des voyageurs fréquents sera par ailleurs facilité. Ainsi, les Mexicains pourront faire une demande d’adhésion au programme NEXUS, alors que les Canadiens et les Américains pourront le faire pour le programme mexicain Viajero Confiable.

— Sur le plan de la défense, les ministres nord-américains de la Défense mettront entre autres sur pied un groupe de travail sur le maintien de la paix. Les trois pays indiquent qu’ils observeront de près l’élection présidentielle en Haïti.

— Le dossier du bois d’oeuvre n’est aucunement mentionné dans les documents transmis aux journalistes. Le Canada et les États-Unis sont néanmoins «déterminés à poursuivre les négociations et discutent intensivement de la question du bois d’oeuvre résineux», selon le ministère du Commerce international.

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