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À tout le monde – et à Dave Mustaine

Photo: Collaboration spéciale

Vous avez peut-être vu la vidéo? Celle où le roux vétéran du trash métal apparaît dans son ranch, en manteau de jeans, tranquille, avec un cheval derrière lui. «Salut. Je suis Dave Mustaine. Le gars de Twitter.» Surtout le gars de Megadeth et ex-membre marquant de Metallica. Le gars qui célébrait cette fin de semaine à Orlando son 55e anniversaire (avec un petit mois de retard). Et le lancement d’une bière en l’honneur de son band, créée en collaboration avec Unibroue. «Salut. Je suis Dave Mustaine.» Le gars de toutes ces choses.

Ceux qui ont lu sa délirante biographie, parue en 2011 sous le simple titre de Mustaine, se souviennent de récits de fêtes s’étirant sur plusieurs jours, d’histoires de défonce liant des éléments improbables comme «de la sauce piquante» et «des organes génitaux», sans oublier d’astronomiques quantités de substances toxiques.

Coécrit avec le journaliste new-yorkais Joe Layden, ce bouquin qui s’est hissé au sommet de la liste des best-sellers du New York Times (une fierté pour le musicien qui, encore aujourd’hui, garde en mémoire le F que lui avait collé sa prof d’anglais au secondaire) retraçait son existence déchaînée. Le guitariste y racontait tout. Notamment ses deux années avec Metallica, dont il a fait partie de 1981 à 1983, avant de se faire montrer la porte (cavalièrement, ajoutera-t-il) et d’être remplacé par Kirk Hammett, tout juste avant la sortie de Kill ‘Em All. Puis la fondation de Megadeth, groupe qu’il a monté en guise de bruyante réponse (ou de gros majeur) à ses ex-compagnons, Lars Ulrich et James Hetfield en tête.

Au fil des pages, le lecteur découvrait les détails de «batailles sanglantes et psychédéliques» et une série d’anecdotes insurpassables. Comme cette fois où une fille avait jeté Mustaine en dehors de chez elle, laissant toutes ses possessions sur le pas de la porte. Sauf son précieux scorpion de compagnie. Épisode qui l’avait poussé à revenir en furie le lendemain pour réclamer son arachnide, qui lui avait été gracieusement offert par un fan. «Je veux récupérer mon scorpion!»

Bref, c’était le récit d’«une vie d’absolue décadence». Avec une bonne once d’humour, quelques sacres, et aucun regret.

Mais aujourd’hui, en cette année marquante (celle de la sortie du 15e album-studio de Megadeth, Dystopia, celle de ses 55 ans et celle de son 25e anniversaire de mariage), le rockeur est posé. Quand on le rencontre ce week-end à Orlando, il prononce même le mot «fuck» uniquement dans sa version censurée. «F-ci, f-ça, f-ci, f-ça.»

Le party, Dave, c’est fini? C’est différent? «J’ai sorti tout ça de mon système quand j’étais jeune. Si je me suis rebellé autant que je l’ai fait, c’est parce que ma mère était très croyante et qu’elle disait des choses un peu folles. “Si tu te masturbes, tu deviendras aveugle!” “Si tu fumes du pot, tu auras des seins!” Elle a déménagé quand j’avais 15 ans, me laissant seul. Et man, que j’en ai profité, de mon indépendance… Aujourd’hui, je mène une existence très équilibrée, très adulte.»

«Mais il m’arrive de faire des choses rebelles, ajoute-t-il avec un air entendu. Comme prendre le volant et dépasser la limite de vitesse. Je ne peux pas m’en empêcher. Mais jamais après avoir consommé de l’alcool.»

«Aujourd’hui, ma carrière est prospère. Je connais mes responsabilités. Envers moi-même. Envers ma famille. Envers mes fans.»
– Dave Mustaine

«S’il y a quelqu’un qui a bu avec vigueur dans sa vie, c’est bien moi, remarque l’aujourd’hui sobre Dave Mustaine. Donc, croyez-moi quand je dis que cette bière, c’est du solide.»

Cette bière dont Dave parle, c’est celle née de l’amitié instantanée qu’il a nouée avec Jerry Vietz, maître brasseur chez Unibroue. Et qui porte le nom de À tout le monde. Les deux hommes se sont rencontrés à Québec en 2015 lors du passage de Megadeth sur les Plaines. «On se connaît depuis peu, mais on a tant de points en commun. Notre façon d’approcher notre art. Notre amour pour la famille. Notre passion pour les choses bien faites.»

Dernière chose dans ce rayon : À tout le monde, donc. Bière dont le lancement coïncide, à un mois près, avec les 55 ans de Mustaine. Et qui a été sabrée vendredi au World of Beer, un minibar (pas comme dans «celui d’une chambre d’hôtel», mais comme dans «petit et chaleureux»), sis au centre d’Orlando. À l’entrée, si on se trompait de porte à gauche, on aboutissait dans un gym. Un p’tit tour d’elliptique au son de Symphony of Destruction? Pourquoi pas?

À l’intérieur : ailes de poulet, bonne ambiance, machine à popcorn (réservé aux «Vraiment Importantes Personnes»). À l’arrière, énergie décuplée dans un grand parking où déambulait une mascotte de Vic Rattlehead et où résonnaient principalement des pièces de Megadeth (agrémentées de quelques hits venus d’ailleurs, dont No More Mr. Nice Guy, d’Alice Cooper, un bon copain de tournée de Mustaine). Détendus, les convives trinquaient, vêtus de t-shirts à l’effigie du band (ou d’un occasionnel gilet de Pantera ou de Sepultura).

Parmi la foule, Byron Gardner, 30 ans, analyste financier originaire d’Orlando. «T’es fan de Megadeth, Byron?» «Neuh. Pourquoi tu penses que je suis ici?» «T’aurais pu être fan de boissons alcoolisées.» «Ah oui. Ça aussi.» Pis Jeff Meller, 37 ans, programmeur pour EA («Sports»). «Moi, j’suis là pour gagner une des Flying V signées par Dave.» Pas de chance. Mais il a eu un cadeau de consolation sucré : une part de gâteau, bleu blanc rouge et bouteille sur le dessus, coupé solennellement par le fêté. Qui est apparu gazelles aux pieds, chemise bleue, jeans noirs et, signature, cheveux lousses et ondulés métal, accompagné par Jerry Vietz, son charismatique nouveau pote au chapeau melon. Et par sa famille. La «chose la plus importante à ses yeux». Sa «beautiful and loving wife», Pam. Et sa fille Electra, qui chante du country et adore l’équitation.

La sympa soirée était animée par une star de la radio locale qui avait pour déroutant rituel de s’essuyer la sueur du front avant de lancer des casquettes dans la foule ou de mettre son visage dans les t-shirts puis de les jeter dans les airs. «Let’s go les filles, montrez-moi votre enthousiasme! Oh! Toi! Ça paraît que t’as déjà travaillé devant la caméra!» Dude, sérieux.

Au fil de l’événement, les convives ont scandé bonne fête, signé des cartes («Santé Dave!», «God bless!», «Merci pour tout!») et levé leur verre d’À tout le monde en même temps que résonnaient les notes de la chanson du même titre.

Car À tout le monde se veut un clin d’œil, bien sûr, à La fin du monde, création de renommée internationale de la brasserie Unibroue. Mais aussi, évidemment, au succès de Megadeth paru en 1994. Un morceau phare du band, particulièrement au Québec, sur lequel D.M. chante en français. «À tout le monde, à tous mes amis, je vous aime.»
Encore aujourd’hui, la mention de cette pièce le fait vibrer. «Je l’ai écrite après la mort soudaine de ma mère. C’était tellement rapide, elle n’avait aucun signe de maladie… Et j’ai fait ce rêve, tu sais, un de ces rêves tellement nets, précis et réalistes? Elle était revenue me voir. Et elle ne m’a dit qu’une seule chose : “Je t’aime.”»

C’est aussi ce que Mustaine dit dans le texte. Révisé à l’époque par sa «blonde originaire du Canada français». «Elle m’appelait mon petit chou, ce qui ne me plaisait pas beaucoup, lance-t-il. Parce que j’ai découvert que ça voulait dire mon petit légume.»

Ce qu’il a découvert plus récemment : concevoir une étiquette de bière, c’est comme créer une pochette d’album. Celle d’À tout le monde est ornée de la mascotte de Megadeth, Vic, avec une fleur de lys le surmontant. Waouh. Lueur de fierté dans les yeux de Jerry le brasseur. «Ah! Ça, c’est super! Et c’était sa demande spéciale!» lance-t-il en tapant l’épaule de son pote. Il ajoute : «La bière n’est pas dark, mais l’étiquette, oui. On voulait qu’il y ait un peu de noirceur. Parce que la musique peut l’être.» «C’est de la bière épeurante! Ouh», s’amuse Mustaine.

Pour conclure, on se rappellera que, dans À tout le monde, le frontman demande à son public : «S’il vous plaît, souriez en pensant à moi.» «Parce que, quand mon heure aura sonné, je ne veux pas que les gens pleurent. Je veux qu’ils célèbrent ma vie.» Et qu’ils boivent un coup? «Ah ça, il peuvent le faire tout de suite.»

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