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Sarah-Maude Beauchesne: «Maxime», pour que la vie soit grandiose

Photo: Photo: Mario Beauregard / Métro

Avec Maxime, roman dédié «ben… à Maxime», Sarah-Maude Beauchesne conclut sa trilogie mettant en scène Billie. Et replonge dans «la piscine des grands sentiments où on fait de la nage synchronisée jusqu’à l’épuisement», où on croise des rockeurs fumant des cigarettes d’après-sexualité, où on pense, parfois, au secondaire, aux graffitis en liquid paper et aux exposés oraux sur nos collections de rouges à lèvres. Mais surtout, où on devient adulte.

C’est la vie de Billie, mais c’est aussi la sienne. Celle que Sarah-Maude Beauchesne «provoque toujours pour qu’elle soit grandiose». Celle qu’elle chamboule volontairement, qu’elle fait dévier du chemin plate et pas compliqué, au risque de se faire des cicatrices au cœur. Parce qu’elle «aime mieux marcher dans la rue en pleurant qu’en ne vivant rien, en ne sentant rien, en se foutant de tout».

Sarah-Maude a 27 ans. Sa Billie, 18 et demi. Mais c’est la première fois peut-être où l’auteure et son personnage semblent si près en âge.

En époque aussi. Son héroïne rêve de vivre à L.A., même si aux États-Unis, «le président fait des conneries». En attendant de partir sur la route, elle croise celle d’un acteur «beau comme un gars qui ne le sait pas». Mais Billie le sait. Enfin, elle va finir par le savoir. Parce que sa créatrice l’a su, elle aussi.

Contrevenant d’ailleurs à la réponse artistique typique, à savoir: «J’aime toutes mes œuvres également. Ce sont comme mes enfants», l’écrivaine confie d’emblée que oui, elle a de l’affection pour ses précédents romans, Cœur de slush et Lèche-vitrines. Mais que Maxime, c’est «son préféré».

C’est aussi celui où la réalité est encore plus fidèle à la fiction (ou est-ce l’inverse?), où les noms sont à peine masqués. Où toute ressemblance avec des personnes ou des situations existantes ou ayant existé ne saurait être que préméditée. «C’est Inception au maximum.»

L’auteure entremêle d’ailleurs le «elle» et le «je» en parlant de Billie. Et démêle, ce faisant, les différentes façons d’aimer. Car dans ce troisième tome, son héroïne barre oblique elle-même trouve la sienne, de façon. «Celle qui la rend heureuse.»

Heureuse au point d’en oublier sa traditionnelle valse de descriptions colorées, symphonie semblable à l’énumération de teintes de vernis à ongles. Son Maxime, éternellement vêtu d’un coton ouaté à capuchon, n’est pas comme Pierre le cycliste aux cheveux doré-emballage-de-Ferrero-Rocher. La première fois qu’elle le voit, elle ne remarque même pas la couleur de ses yeux.

«Sa beauté extérieure ne lui saute pas au visage, décortique Sarah-Maude. À première vue, il n’est pas plus grand que nature.»

Pas comme Louis. Un chanteur charmeur de la scène locale aux cheveux «mouillés de sueur créative». Un musicien qui, à l’instar de Rihanna, n’a qu’un prénom. Et qui, dans les premières pages, craquera pour Billie. Elle aussi. Mais juste un peu. Juste ce qu’il faut. Juste assez longtemps. Parce qu’elle a grandi. «Je trouvais ça le fun qu’elle ait la maturité de s’en aller avant que ça dérape. Qu’elle dise: Tu sais quoi? Je pense que je vais passer cette fois.»

«C’est peut-être ça, l’amour, le vrai. Un sentiment qui sort de nulle part, qui ne s’explique pas, qui se base sur l’instinct. Tout simplement.» Sarah-Maude Beauchesne / Billie

Sarah-Maude Beauchesne, elle, ne passe pas à côté des références aux séries et aux films qu’elle aime tant (comme Havana Nights «oh mon Dieu, c’est tellement bon!»). Ni du thème de l’amitié. Surtout celle entre filles. Qui occupe tellement de place dans ses pensées. Et dans son blogue très personnel, Les Fourchettes. «C’est un sujet si important pour moi! s’exclame-t-elle. Je commence à peine à le comprendre, à l’apprivoiser. Beaucoup auraient cessé de suivre une fille en montagnes russes comme ça. J’ai voulu rendre hommage aux amies de Billie. Elles ne jugent pas. Elles s’inquiètent. Elles veulent qu’elle soit heureuse. Elles sont là pour la guider.»

La guider dans ses histoires de cœur labyrinthiques. Mais aussi dans les rues de Montréal. Car on sent la ville vibrer très fort dans ce troisième tome. Peut-être parce que l’écrivaine, née à Granby, a mis tant de temps à l’aimer. Peut-être, surtout, parce qu’aujourd’hui, si fière de la connaître , elle s’y sent «tellement bien». De la même façon qu’elle se sent bien dans les taxis, son moyen de transport favori. Et dans lesquels, dans son récit, on vit des «moments bulles». «J’ai un lien spécial avec la solitude de la banquette arrière, confie-t-elle. Des fois, je jase avec le chauffeur. Des fois, j’ouvre la fenêtre. C’est mon instant de répit où je ne pense à rien.»

Enfin, rien. Dans le livre, elle pense beaucoup à Maxime. Avec qui elle se sent, trio magique, «belle, drôle et forte en même temps». Ce Maxime qui, «dans la vraie vie», lui a un jour dit: «Ça fait deux semaines que je ne me suis pas regardé dans le miroir.» Moment marquant pour l’auteure, qui dit sans détour «toujours vouloir être parfaite». «C’était confrontant. C’était brut. C’était beau.»

Et de beauté, son roman ne manque pas. Les images, le rythme, le langage. Cet automne qui sert de décor. Qui n’a rien de gris, de monotone ou de frileux. Qui est plutôt, comme le décrit Sarah-Maude, «flamboyant». Flamboyant parce que c’est exilée à Los Angeles qu’elle l’a imaginé. Là où elle avait le recul sur les saisons, sur les gens ayant fait partie de son récit. Sur la vie.

Là où elle a écrit, écrit, écrit. De la même façon que le fait Billie, au retour d’une soirée décevante. Toute la nuit.  «J’ai voulu, une fois dans le livre, décrire le bonheur que j’ai quand j’écris et que j’oublie le temps. Ça ne m’arrive pas souvent. Mais c’est plus le fun que n’importe quoi. C’est plus le fun que de tomber amoureuse.»

 

Maxime

Aux Éditions Hurtubise

En librairie jeudi

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