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Des monstres se cachent dans son Coeur de pirate

Cœur de pirate Photo: Mario Beauregard/Métro

Si le nouvel album de Cœur de pirate est plus sombre, plus mature, plus douloureux et plus personnel que jamais, c’est parce que, sur En cas de tempête, ce jardin sera fermé, en magasin vendredi, Béatrice Martin exorcise ses démons, une chanson à la fois.

«C’est sûr que les propos ne sont pas toujours faciles. C’est un album qui est important pour moi, personnellement, pour mon développement», affirme la chanteuse, au sujet de son quatrième opus en carrière. L’inspiration pour sa prose lui vient d’une introspection majeure qui lui a permis d’affronter, puis d’admettre, ses erreurs du passé.

Lorsqu’elle s’est lancée dans la création de cet album, elle a compris que «c’est vraiment toi qui recherches les expériences négatives dans ta vie». Et réaliser ça, ça fait mal. «Forcément, ça va transparaître dans ta façon d’écrire et ta façon de voir les choses. Je ne joue pas la victime sur cet album-là. J’admets mes torts complètement», avoue-t-elle.

L’écriture de cet album s’est faite très rapidement. Cœur de pirate compare d’ailleurs son processus de création à… du vomi. «Si ça doit sortir, ça va sortir.» Elle explique ne pas réfléchir lorsqu’elle jette sur papier ses paroles: «C’est de l’écriture automatique.» Le premier jet se fait rapidement, parce que selon elle, «il faut que ce soit impulsif, que ça vienne du cœur».

Une démarche créative comme celle-ci ne laisse aucune place à la censure. «Je raconte vraiment par la poésie ce qui m’est arrivé, pis je pense que c’est ma job d’une certaine façon de transmettre ça», tranche-t-elle.

À la première écoute, on est tenté de croire que ce disque est un recueil de chansons d’amour plutôt sombres. Mais non, ce n’est pas ça. «Ça parle de codépendance, ça parle d’oubli de soi, avoue Cœur de pirate. J’ai été super codépendante dans ma vie, par le passé. Maintenant, c’est plus une peur de l’attachement, c’est l’autre extrême.» Des antipodes qu’elle revisite en chanson.

Sur ses nouvelles pièces, «il y a beaucoup de zones grises et beaucoup d’extrêmes aussi, d’où la couleur rouge [thématique de son album], qui est la couleur des extrêmes», explique-t-elle.

«Faire face à ses propres démons, ce n’est pas facile. C’est une chose d’aller chez le thérapeute, mais de le vivre en chanson, c’est une façon pour moi de tourner la page et de me réapproprier les événements.» – Cœur de pirate

Cet album parle aussi d’amour toxique, de consentement, d’agression, de solitude. Selon elle, c’est aussi «un album qui est d’actualité», puisqu’il revient sur des sujets qui ont été abordés récemment par le mouvement Me Too. C’est d’ailleurs ce qui lui a permis de parler de sujets qu’elle n’osait pas toucher par le passé, de peur de vexer certaines personnes.

Sur Je veux rentrer, Béatrice Martin chante d’une façon très poétique à propos d’un viol dans un contexte de couple. Sur Combustible, elle fait face à ses propres peurs et aux «monstres qui se cachent au fond de son cœur». De plus, la chanteuse appréhende déjà le moment où elle devra chanter la très émotive De honte et de pardon, une chanson où elle se sent coupable par association pour les torts d’un autre.

Même si ces pièces très personnelles peuvent être difficiles à offrir au public, elles sont un puissant remède pour la chanteuse : «Le fait de les faire sur scène, c’est comme si je disais aux événements: ‘‘Vous ne me possédez pas.’’»

L’album est, cette fois-ci, entièrement en français, pour la simple et bonne raison que Cœur de pirate en avait envie. «Il y a une façon pour moi d’aborder ces sujets-là que je peux juste faire en français. Je manie mieux le français que l’anglais et c’était tellement des sujets particuliers que c’était important de le faire en français.»

Même si son répertoire est majoritairement francophone, la chanteuse sillonnera les routes du Canada anglais et de la côte Est américaine pour présenter ses chansons dans les prochains mois. «C’est vraiment le fun, ce sont des gens ouverts. Ça montre que la musique ne connaît pas de barrières de langage.»

Celle qui vit dans l’œil du public depuis 10 ans déjà a-t-elle peur que ses paroles sur ces sujets délicats soient mal interprétées, ou pire, surinterprétées? «Beaucoup de gens disent qu’ils vont deviner de qui je parle dans la chanson. Ce n’est pas ça, le but. Je parle de problèmes qui peuvent toucher tout le monde. Je ne pense pas que je suis seule dans mes expériences et c’est ça qui est beau de la musique aussi.»

Ce qui est un peu moins beau, par contre, c’est ce que sont devenus les réseaux sociaux. Cœur de pirate, qui a longtemps partagé sa vie privée sur Instagram, dit avoir maintenant changé son approche.

«Honnêtement, j’ai trop partagé pis là je ne suis plus capable. On ne peut plus partager comme avant», explique-t-elle. Alors maintenant, attendez-vous à beaucoup d’autodérision. «Il y a toute une facette de moi que les gens ne connaissent pas, une facette qui est quand même drôle. Je ne suis pas toujours en train de pleurer dans mon coin. C’est important de le montrer sur les réseaux.»

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