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«Je revendiquerai toujours le droit, au théâtre, de parler de tout et de tous» – Robert Lepage

Photo: Getty

Le metteur en scène Robert Lepage juge que l’annulation du spectacle SLĀV «porte un coup à la liberté d’expression artistique».

Dans un communiqué de presse paru vendredi, l’homme de théâtre affirme que «s’il n’en tenait qu’à [lui], le spectacle tiendrait encore l’affiche». «Je revendiquerai toujours le droit, au théâtre, de parler de tout et de tous. Sans exception. Aucune», écrit-il.

«Pour moi, la chose la plus navrante que je note, dans la rue comme dans certains médias, c’est l’affligeant discours d’intolérance», ajoute le producteur, n’hésitant pas à parler de musellement.

Le spectacle SLĀV, présenté dans le cadre du Festival de Jazz de Montréal, mettait de l’avant des chants traditionnels afro-américains à travers l’histoire de l’esclavage. La chanteuse Betty Bonifassi, qui prête sa voix au spectacle, disait avoir réfléchi à ce projet depuis 20 ans. Il s’agit d’un «hommage hautement visuel à la musique comme outil de résilience et d’émancipation», indiquait le Théâtre du Nouveau Monde.

Le soir de la première de SLĀV, le 26 juin, une centaine de manifestants s’étaient rassemblés devant le Théâtre du Nouveau Monde pour dénoncer la tenue de ce spectacle, affirmant qu’il s’agissait d’une «appropriation culturelle».

Un groupe d’artistes, d’auteurs, d’universitaires et de journalistes ont par ailleurs signé une lettre ouverte dans laquelle ils se disaient «choqués» et «dégoûtés» qu’une production basée sur des chansons d’esclaves afro-américains soit coordonnée et interprét��e par un groupe de personnes majoritairement blanches.

En début de semaine, le chanteur Moses Sumney a annoncé qu’il ne jouerait pas dans le cadre du FIJM mardi en raison de SLĀV. Il avait déclaré sur les réseaux sociaux qu’il ne pouvait pas «présenter [sa] musique au même festival [que SLĀV] en bonne conscience».

Robert Lepage souligne que l’équipe derrière la production du spectacle SLĀV était «consciente, depuis le début du projet, que le sujet [abordé] était sensible et qu’il était donc de [son] devoir d’agir et de créer ce spectacle de manière respectueuse, réfléchie, informée, honnête et intègre.»

«La pratique théâtrale repose sur un principe bien simple : jouer à être quelqu’un d’autre, explique-t-il dans le communiqué. Jouer à l’autre. Se glisser dans la peau de l’autre afin d’essayer de le comprendre et, par le fait même, peut-être aussi se comprendre soi-même. Ce rituel millénaire exige, le temps d’une représentation, que l’on emprunte à l’autre son allure, sa voix, son accent et même à l’occasion son genre.»

»À partir du moment où il ne nous est plus permis de nous glisser dans la peau de l’autre, où il nous est interdit de nous reconnaître dans l’autre, le théâtre s’en trouve dénaturé, empêché d’accomplir sa fonction première, et perd sa raison d’être», renchérit M. Lepage.

Le metteur en scène admet que dans ses productions, il a l’habitude de dénoncer des injustices et qu’il n’a jamais été accusé d’appropriation culturelle ou de racisme. «Bien au contraire, note-t-il. Ces réalisations ont toujours été bien accueillies et ont fait d’Ex Machina l’une des compagnies de théâtre les plus respectées au monde.»

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