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Chambre 1002: Quand le polar fait bonne chère

Photo: Isabelle Bergeron/Métro

Voilà 20 ans que Chrystine Brouillet souhaite écrire sur les liens puissants de l’amitié. Avec la parution de Chambre 1002 , elle a enfin trouvé la trame parfaite pour le sujet: les arômes rassembleurs de la cuisine. Incursion dans l’univers olfactif d’une écrivaine passionnée de gastronomie.

Une délicate tasse de thé à la main, Chrystine Brouillet nous reçoit chez elle, dans un lieu tout indiqué pour discuter de son plus récent livre: sa cuisine.

Son dernier-né,  Chambre 1002 , marie le suspense qui l’a fait connaître à son amour de la cuisine. «Il y a toujours des scènes où les personnages mangent ensemble dans mes livres. Ici, je voulais que la gastronomie soit un moteur au lieu d’un accessoire de l’histoire», précise l’auteure.

À défaut de remettre en scène la détective Maud Graham, l’écrivaine nous présente Hélène, une chef montréalaise de renommée mondiale. À son retour de New York, celle-ci est victime d’un grave accident de voiture.

Les amies de la jeune femme inconsciente à l’hôpital la veillent en lui mitonnant des plats succulents. «Elles vont tenter de la réveiller par l’aromathérapie, c’est-à-dire la guérison par les odeurs. Quand les gens séjournent à l’hôpital, on leur fait souvent entendre de la musique qu’ils aiment. Quant à moi, si vous voulez me réveiller, c’est certain que ce sera par l’odeur.»

Autour de la nourriture naissent de grandes amitiés comme celle entre Hélène et Ornella, liées par un amour commun du thé. «Chambre 1002 est plus sensuel que mes autres romans policiers. Comme les odeurs reviennent régulièrement, on est dans un univers plus doux. Maud a aussi des relations très amicales, mais on demeure dans le domaine assez noir du crime», compare la romancière.

«Je n’ai pas de plaisir à écrire, car c’est un travail qui demande beaucoup de concentration. La notion de plaisir suppose l’abandon et ce sentiment, je l’éprouve lorsque je reçois, lorsque je cuisine.» -Chrystine Brouillet

Écrire les odeurs
Les armoires de Chrystine Brouillet regorgent d’épices et de feuilles de thé. Émanant du four, des effluves de citron embaument la conversation en guise de souvenir des dernières pâtisseries concoctées. «Les odeurs sont cruciales dans ma vie. La couleur et le moment de la journée vont influencer la sorte de parfum que je vais porter. J’éprouve autant, sinon plus de plaisir à respirer le vin qu’à le boire», avoue-t-elle.

Les recettes des mets préparés au cours du roman parsèment les péripéties, à l’attention des cuisiniers frustrés comme l’auteure de ne pas pouvoir recréer les plats mentionnés dans un récit. « Je trouve ça énervant dans les livres de ne pas pouvoir refaire les plats mentionnés. Je pense aussi que ça donne une meilleure idée des personnages et de l’ambiance qui les entoure », estime-t-elle.

La romancière n’a pas consulté de chefs pour documenter  Chambre 1002 . Comme pour l’écriture, l’auteure s’inspire en notant et en dessinant dans un carnet tout ce qu’elle mange. Les recettes du livre proviennent d’une dizaine de ces cahiers noircis au fil de ses expériences gastronomiques. À son restaurant favori de New York, le réputé Eleven Madison que visite également l’héroïne, elle détaille par exemple une délicieuse focaccia à la truffe pour mieux recréer la recette chez elle.

Les auteurs de polars sont nombreux à mettre en mots le plaisir de manger. Les romans de Donna Leon et de Georges Simenon abondent notamment en descriptions de pot-au-feu,  de blanquettes et d’autres victuailles. «C’est parce que la nourriture en dit long sur une société. Dans les intrigues norvégiennes, on va boire beaucoup de café et savourer des pâtisseries, tandis que dans les polars français, il est impossible de passer à côté de longs repas autour d’une bouteille de vin», observe l’auteure. 

Dans cette lignée particulière du roman policier, Chambre 1002  rehausse le genre en le saupoudrant de bonheurs à portée de fourchette. Après tout, d’après l’écrivaine un brin philosophe, «on peut vivre sans avoir de partenaire dans sa vie, mais pas sans amis ni en mangeant constamment du céleri bouilli» !

Les plaisirs de la table

Les tartelettes aux framboises de sa mère constituent le premier souvenir d’enfance relié à la nourriture de Chrystine Brouillet. Elle ne tombera amoureuse de la cuisine que bien plus tard, en même temps qu’elle s’éprend d’un jeune homme à la dent sucrée à 18 ans. Le premier gâteau forêt-noire qu’elle lui prépare pour le séduire et l’idylle qui s’ensuit s’avèrent plus ou moins concluants, mais sa passion, elle, perdure toute sa vie.

Pour lui faire plaisir, rien ne vaut une pizza. «Je peux en manger n’importe quand, même en me levant le matin!»

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