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L’envol de Salomé Leclerc

Photo: Josie Desmarais/Métro

«J’ai failli m’envoler», chante Salomé Leclerc dans Le mois de mai. Son envol, elle l’a pris en composant, enregistrant et réalisant, bref en bricolant seule son troisième album, Les choses extérieures, tout au long duquel plane la symbolique de l’oiseau.

«À la fin des saisons, les oiseaux s’inclinent», répète l’auteure-compositrice-interprète sur La fin des saisons. «Les oiseaux construiront leur nid, comme ils l’ont toujours fait avant», dit-elle sur Chanson #7 (Les choses extérieures). «Il y avait dans ton ciel une cage, qui gardait l’oiseau malheureux», chante-t-elle sur Des plumes et des ombres.

«L’oiseau a une symbolique très forte, commente Salomé Leclerc. Ça peut évoquer plein d’affaires, autant dans le dark que dans le positif. Ça peut être un corbeau laid qui te regarde tout croche, comme ça peut être la colombe qui s’envole, symbole de liberté.»

Cette présence plane jusqu’à la toute fin de l’album, où on entend un oiseau gazouiller. «La fenêtre était ouverte quand j’ai enregistré le piano, et par hasard, un oiseau a fait du bruit.»

Par hasard? Pas tant que ça. C’est que la musicienne n’est jamais bien loin d’une fenêtre quand vient le temps de créer. «Quand je joue, je ne suis pas à côté ou dos à la fenêtre; je suis en face. Il faut que je voie l’horizon, que je voie au loin.»

Ainsi, ce n’est pas un hasard non plus si son troisième disque s’intitule Les choses extérieures. Pourtant, sur la pochette de son album, Salomé Leclerc, étendue sur le plancher d’un appartement, regarde un mur.

«Je trouve qu’il y a un beau contraste entre le fait que je sois immobile, par terre, à regarder le mur, et le titre de l’album. C’est très évocateur», dit-elle, amusée.

Dans son processus de création, Salomé Leclerc a cherché à s’émanciper, à sortir de sa bulle et à se rendre accessible. «J’ai dû me refermer sur moi et aller vraiment profondément replacer des choses intérieures pour le faire.»

Accord musique et vin
L’artiste de 32 ans a remis beaucoup de choses en question entre la parution de son précédent album, 27 fois l’aurore, en 2014, et le lancement de celui-ci. Sentant que sa tournée s’essoufflait, elle a même entrepris des démarches afin de s’inscrire à un cours de sommellerie.

La sympathique musicienne s’est découvert une passion pour les vins lorsqu’elle s’est rendue pour la première fois en France, en 2010, afin de jouer dans un festival de musique.

«Quand je décide de rentrer dans un sujet, j’y vais à fond, dit-elle. Je me disais : Je m’en vais en France, c’est pas vrai que je connaîtrai pas les vins!»

«Même pour un morceau qui rock, j’ai attaqué la voix comme si c’était une chanson intime. On dirait que la toune était plus forte si je la chuchotais.» -Salomé Leclerc

Quel cépage s’accorderait bien avec son album? «Wow…! échappe-t-elle, avant de réfléchir longuement. Ah! Complètement! J’irais avec un vin de la région du Jura. Ils se boivent comme de l’eau.»

L’écoute de Les choses extérieures se prête effectivement bien à une soirée intime, accompagnée d’une bonne bouteille.

Dans cet album plus personnel, Salomé Leclerc a mis plus que jamais sa voix cristalline de l’avant. «C’était vraiment pour protéger la chanteuse de la musicienne, dit celle qui s’est d’abord initiée à la batterie en jouant dans le band familial. Pour ce disque, j’ai écrit les chansons à partir de ma guitare et de ma voix. Avant, je me cachais derrière les arrangements.»

La poésie des textes ne s’en trouve que renforcée. Elle nous touche droit au cœur quand Salomé Leclerc chante : «Je me suis cachée dans une larme», ou encore : «Ce feu qui brûle les doigts, qui laisse des traces sur ceux que j’aime.»

Pour la première fois, la jeune femme a trimballé avec elle un carnet dans lequel elle a noté «des mots qui [lui] parlaient, des bouts de phrases ou des textes de chansons qui [l]’inspiraient».

Et elle a couvé ses chansons-chantiers pendant plusieurs mois. «Je n’écris pas une chanson à la fois, j’ai toujours trois ou quatre chantiers en parallèle. Ainsi, les chansons se nourrissent entre elles.» D’où la présence d’éléments temporels dans ses paroles, comme le passage des saisons ou celui de la nuit au jour.

Musicalement, elle a délaissé les arrangements électros présents sur 27 fois l’aurore pour se concentrer sur des instruments à cordes comme la guitare, la basse et le piano.

En dehors des cuivres et des violons, elle joue de tous les instruments, ce qui lui a valu le qualificatif de «femme-orchestre». «Je m’amuse sur tous les instruments, je suis du genre à vouloir explorer. J’aime bidouiller, et dans ce sens, je pense que cette expression convient à mon contexte de création et d’enregistrement», analyse-t-elle.

Avant même d’avoir écrit le moindre morceau, Salomé Leclerc voulait porter tous les chapeaux en vue de la conception de ce troisième disque. «C’était complètement un défi, j’avais quelque chose à me prouver.»

Mais la musicienne ne savait pas qu’elle irait jusqu’à tout interpréter elle-même. Ainsi, trois jours avant d’entrer en studio, elle a gentiment congédié ses deux collègues qui devaient l’accompagner. «Tsé, quand tu le feeles pas… C’était stressant de leur dire : Hey, finalement, venez pas, mais ils ont compris que j’avais quelque chose à faire.»

Pour elle, travailler seule vient toutefois avec son lot de remises en question. «Une journée sur deux, je doutais», assure-t-elle. Pour avoir du recul, elle a fait appel en cours de route à Antoine Corriveau et à Félix Dyotte, question d’avoir un deuxième avis sur sa musique et ses textes.

«Ça me prenait ce feedback. Je leur ai montré différentes versions de mes pièces, et dans les deux cas, souvent, ils m’ont dit : Tsé, Salomé, ta version un, ça marchait au boutte!» Petit à petit, l’oiseau fait son nid.

L’album Les choses extérieures est disponible dès maintenant.

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