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Pleins Écrans, un festival à 100% sur Facebook

Photo: Josie Desmarais/Métro

Un festival de courts métrages entièrement sur Facebook? Le concept est simple, mais il fallait y penser. Jean-Christophe Lamontagne et ses collègues de Pleins Écrans sont les premiers et les seuls au monde à l’avoir fait.

Le concept est simple, disait-on. Il suffit d’aimer la page Facebook de Pleins Écrans. Pour sa troisième édition, 4 courts métrages y seront diffusés quotidiennement, pour un total de 44 films en 11 jours.

Comme dans les festivals de cinéma traditionnels, Pleins Écrans a une programmation, une compétition avec un jury – composé de la comédienne et réalisatrice Monia Chokri, du cinéaste Loïc Darses et du monteur sonore oscarisé Sylvain Bellemare –, une rétrospective et une classe de maître, toutes deux du cinéaste d’animation Théodore Ushev (nommé aux Oscars en 2017 pour son court métrage Vaysha l’aveugle), ainsi que des séances de questions-réponses avec des créateurs en Facebook Live.

Comment avez-vous eu l’idée de fonder ce festival?
On est six cofondateurs, mais c’est une idée de Patrice Laliberté, qui va d’ailleurs réaliser le premier film québécois financé par Netflix. Il y avait une lacune au niveau de la disponibilité des courts métrages. Patrice est réalisateur et a aussi été producteur, et moi, je suis distributeur. On est arrivés au même constat: au Québec, on fait vraiment de bons courts métrages, qui voyagent partout dans le monde. Malheureusement, quand nos proches nous demandaient: «Où est-ce qu’on peut voir ces films?» on n’avait pas vraiment de réponse. La seule option souvent, c’est de les voir en festival. Mais les gens qui vivent dans des régions éloignées, ils font quoi? Oui, il y a des plateformes comme Tou.tv qui en diffusent, mais souvent ils ne sont pas mis en valeur. Le court métrage est rarement célébré et mis de l’avant. On s’est demandé comment on pouvait faire tomber les barrières géographiques. Comment peut-on rendre le court métrage sexy et accessible? Pourquoi ne pas aller là où les gens sont, soit sur Facebook?

Êtes-vous étonnés d’être les seuls au monde à tenir ce type d’événement sur Facebook?
Oui. Dès l’an 1, on s’est rendu compte qu’on était les premiers à faire ça. On a écrit à info@facebook.com, et une patronne de Facebook nous a appelés deux semaines plus tard pour nous le confirmer. C’est vraiment excitant!

Comme on est les seuls, on a pu créer un partenariat avec le Festival international du film de Toronto (TIFF) en présentant le Short Cuts Weekend. On est très fiers et honorés, c’est un des plus gros festivals du monde. On espère ainsi tenter une percée dans le marché anglophone.

Si ça fonctionne, allez-vous changer votre nom pour Full Screen?
Non, on garde le nom Pleins Écrans. Après tout, le Festival de Cannes reste le «Festival de Cannes» [prononcé à l’anglaise].

«Il y a parfois une connotation négative associée aux courts métrages. Les gens pensent que ce sont de “p’tits films”, que ce n’est pas du vrai cinéma. Mais est-ce qu’on dit ça d’une nouvelle en littérature? Non, car c’est une forme littéraire. Tout comme le court métrage est une forme cinématographique.» – Jean-Christophe Lamontagne, cofondateur de Pleins Écrans

Combien de gens rejoignez-vous avec Pleins Écrans?
La première année, on a eu 720 000 visionnements, à notre grande surprise, avec seulement 5000$ de budget. On était un peu flabbergastés! L’an passé, on a enregistré 2,6 millions de visionnements pendant tout le festival. Le fait qu’on soit accessible de partout dans le monde nous aide. L’an dernier, on a eu des visionnements dans 86 pays, dont 4 à Bali; on se dit que ça venait des gens d’Occupation double! (Rires)

Cette année, nos objectifs ne sont pas en termes de chiffres, car Facebook a changé son algorithme, mais plutôt en termes d’engagement. C’est d’ailleurs la première édition où on a une porte-parole, la comédienne Julianne Côté.

Quels sont les avantages et les inconvénients de tenir un festival de cinéma uniquement sur Facebook?
Commençons par les avantages. Tout d’un coup, notre festival devient international. Et on rejoint notamment des gens qui habitent dans des régions éloignées, qui n’ont pas accès à des courts métrages. Ils nous disent souvent: «Wow, je ne savais pas que ça pouvait être bon comme ça!» Ou: «Je ne savais pas c’était quoi, du court métrage.» Pour nous, c’est vraiment l’avantage numéro 1. Enfin, les réalisateurs de courts métrages peuvent rejoindre leur public! C’est une belle reconnaissance pour eux.

Et puis, l’organisation est plus simple, car nous n’avons pas à gérer de salle, de billetterie ou de bénévoles. On peut tout faire en pantoufles à partir du bureau! On réussit à faire des trucs vraiment cool avec peu de moyens. C’est un beau laboratoire.

Sur le plan des inconvénients, je dirais l’absence de contact humain. C’est notre défi de rendre le tout plus chaleureux, car un festival, c’est aussi un lieu de rencontre. Comment peut-on pallier cette lacune? Cette année, on essaie de rendre les interactions avec les réalisateurs sur Facebook Live plus cozy, avec des coussins et une petite ambiance feutrée, question de se sentir plus proches des gens. On a aussi une soirée de clôture avec cocktail et remise de prix, qui sera précédée d’une classe de maître au Monument-National. C’est gratuit et ouvert à tous. Ce sera une belle occasion d’échanger sur les films de la compétition, de parler de cinéma et d’avoir du plaisir.

Que répondez-vous à ceux qui martèlent que l’expérience du cinéma doit absolument se vivre sur grand écran, et non sur un téléphone intelligent?
Je leur réponds que je suis d’accord avec eux. On n’a pas créé Pleins Écrans dans le but de remplacer l’expérience en salle. On choisit des films qui ont eu un certain parcours et on leur donne une deuxième vitrine pour qu’ils soient vus par le plus grand nombre. Oui, les films sont faits pour être vus sur grand écran, mais ils sont aussi faits pour être vus, tout court. D’être capable de toucher autant de gens aux quatre coins du globe, c’est aussi ça le cinéma, c’est de faire vivre des émotions.

Par ailleurs, le format court métrage est idéal pour Facebook. Je ne ferais pas un festival de longs métrages sur cette plateforme.

Trois coups de cœur de Jean-Christophe Lamontagne parmi la programmation de Pleins Écrans:

  • Va jouer dehors, d’Adib Alkhalidey. «Adib est un excellent cinéaste. Il a fait un super beau et touchant court métrage sur deux enfants dans un quartier dur de Montréal.»
  • Tony Speed, d’Alec Pronovost. «Ça s’inscrit dans la foulée des comédies sportives à la Happy Gilmore. J’ai vu le film à cinq ou six reprises et j’ai pleuré chaque fois.»
  • Les deuxièmes, de Claudia Hébert. «C’est adapté de la BD de Zviane, qui porte sur deux amants dans un chalet. C’est un film magnifique, plein de poésie, bien joué, tout simple et touchant.»

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