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Lothaire Bluteau, comédien malgré tout

Mélanie Marquis - La Presse Canadienne

MONTRÉAL – Lothaire Bluteau a un je-ne-sais-quoi. Une aura mystérieuse. Un air ténébreux, quasi impénétrable. Peut-être est-ce en raison des rôles énigmatiques qu’il a l’habitude de camper ou encore du fait qu’il passe toujours en coup de vent.

Mais à l’autre bout du fil, c’est un homme on ne peut plus affable qui se prête au jeu de l’entrevue dans le cadre de la promotion du film « Rouge Sang » – un premier projet québécois auquel il participait depuis « L’enfant prodige » (2010).

Il n’a pas chômé pour autant entre ces deux tournages. On l’a notamment vu dans la série télévisée à succès « Les Tudors » et dans la série dramatique « Missing », avec Ashley Judd.

En fait, Lothaire Bluteau, qui compte 35 années dans le métier, n’a jamais manqué de boulot, comme en témoigne sa feuille de route. Il a mené sa carrière sur plusieurs fronts. Encore aujourd’hui, même s’il est installé à New York, il se promène régulièrement entre Montréal, Los Angeles et Londres.

Mais cette fructueuse carrière, qui a véritablement pris son envol après des prestations marquantes dans les longs métrages «Jésus de Montréal» (1989) et «Robe noire» (1991) ne s’est pas bâtie sans sacrifices.

«Ça a été dur, murmure-t-il. Ce ne sont pas des vies faciles. Mais ça, il n’y en a pas, des vies faciles.»

Naissances, mariages, baptêmes: le comédien de 55 ans dit avoir souvent dû reléguer ces événements marquants au second plan afin de se consacrer à son art.

«Ce métier-là a un prix très, très élevé. Il coûte cher d’isolement, il coûte cher d’insécurité. Plus t’es connu, moins t’as confiance en toi, poursuit-il. Mais je l’aime, ce métier-là!»

«Et quand je viens à Montréal, on me reproche de ne pas faire d’entrevues, mais là, je viens voir ma famille! Je vais choisir de rester avec mon père plutôt que de me ‘taper’ une entrevue», ajoute-t-il.

Mais cette fois, force est de constater que le natif du Lac-Saint-Jean s’en est «tapé», des entrevues. Il a passé une bonne partie de la semaine sur les plateaux de télévision, dans les studios de radio et entouré de journalistes pendant la journée de presse du film «Rouge Sang».

Le réalisateur du thriller historique, Martin Doepner, était aussi en campagne promotionnelle, et il n’a pas tari d’éloges au sujet de Lothaire Bluteau.

«Je le pensais un peu inaccessible, mais au contraire, il est très humain, extrêmement généreux. C’est un comédien qui a une maturité dans son jeu, dans sa façon d’être. Il aurait pu me manger littéralement la laine sur le dos, mais non, on a toujours travaillé en équipe», fait valoir le cinéaste qui signait, à 38 ans, un premier long métrage.

Lothaire Bluteau tire profit de la maturité qu’il a acquise non seulement sur les plateaux de tournage, mais également pour poser un regard critique sur le métier et l’industrie du divertissement.

Une conversation entre lui et l’exploitant de salles de cinéma Vincent Guzzo, lequel a déclaré à l’émission «Les francs-tireurs» qu’il «faudrait faire des films que le monde veulent (sic) voir et moins de films ‘lamentards’», ferait sans aucun doute des flammèches.

«Le jour qu’on se met à ne plus prendre de risques et à faire des films pour aller chercher juste un public, c’est là qu’on se trompe. On l’a fait ici il y a 20 ans quand j’étais encore ici. On essayait de plaire à un marché français (…) et il y a beaucoup de films qui étaient pourris parce qu’il n’y avait aucune authenticité», lance avec passion Lothaire Bluteau.

Un exemple? «Les fous de Bassan» (1987) — pas forcément «pourri», mais à tout le moins «dénaturé», selon le comédien qui tenait un rôle dans cette production.

«On faisait des coproductions et souvent, ça pouvait dénaturer le film. On avait fait ‘Les fous de Bassan’ et au moment du casting, on a engagé des Français pour jouer les membres d’une même famille. Tout le monde avait des accents différents! Le gel ne se faisait pas.»

Les films d’auteur et les films indépendants peuvent cartonner aux guichets et donner naissance à de nouvelles vagues, croit Lothaire Bluteau, qui cite notamment comme exemple le long métrage «Reservoir Dogs» (1992), de Quentin Tarantino.

«Je partageais une maison avec Quentin Tarantino (au Festival du film de) Sundance au moment où il travaillait sur le projet, et tout le monde lui disait: ‘C’est un joli scénario, mais il n’y a personne qui va aller voir ça’. Et ça a été un succès monstre», raconte-t-il.

C’est ce qu’il souhaite au film de Martin Doepner, un thriller psychologique qui prend l’affiche le 1er février. Et de son côté, il poursuivra le tournage d’un film aux États-Unis tout en développant «cinq projets en même temps». Comme quoi le métier, malgré son prix élevé, est une véritable drogue pour Lothaire Bluteau.

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