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Alain Mongeau: «Montréal et Mutek fonctionnent bien en duo»

Photo: Miguel Legault/Collaboration spéciale

Il y a 15 ans, MUTEK faisait son entrée sur la scène montréalaise. Alain Mongeau, le fondateur et directeur de ce festival de musique électronique qui a acquis une brillante réputation, revient sur la genèse de l’événement. Un événement qui constitue par ailleurs un des moments phares du Printemps numérique actuellement en cours dans la métropole.

Vous fêtez cette année vos 15 ans. Est-ce l’heure des bilans ou l’heure de célébrer et de savourer le moment présent?
Ce n’est pas encore l’heure des bilans! On est plutôt dans l’idée de souligner le chemin parcouru et peut-être de mettre la table pour l’avenir.

Cette année, vous vous êtes uni au festival [d’arts numériques] Elektra. (MUTEK et Elektra se présentent d’ailleurs sous la bannière EM15). Une collaboration à laquelle vous songiez depuis longtemps?
Non, ça n’a pas été prémédité. Il y a une conjoncture multiple qui y a mené. Entre autres, l’invitation qui nous a été faite par le Musée d’art contemporain d’accueillir une collaboration croisée, justement. Et puis cette nouvelle initiative qu’est le Printemps numérique. On se disait qu’il serait intéressant de délimiter un moment fort dans les trois mois que dure le Printemps. C’est comme ça qu’on s’est un peu autoproclamés, [MUTEK et Elektra], le «cœur international» de l’événement.

Est-ce que cette association a mené à des nouveautés, à des changements?
En fait, c’est l’ensemble de l’œuvre qui nous amenés hors de notre zone de confort. C’est la première fois qu’on collabore avec Elektra aussi bien qu’avec le Musée, donc c’est un apprentissage croisé pour nous tous. En plus, on a ajouté une journée au festival. Je pense que ça va venir marquer le paysage pendant la durée des activités.

Vous avez eu l’idée de MUTEK en 1997, et le festival est né en 2000. Est-ce que la raison pour laquelle vous faites ce festival a changé au fil du temps?
Oui… c’est sûr que si on m’avait dit en 2000 que le festival aurait une telle longévité… Ce qui n’a pas changé jusqu’à aujourd’hui, c’est la volonté de mettre Montréal sur la carte et de devenir une ville qui dialogue avec les autres grandes villes. Ça, on l’a réussi. Mais c’est un travail qui continue de se faire de façon incessante. On ne peut pas s’asseoir sur nos lauriers. Par ailleurs, je pense que le rapport avec les artistes de la scène locale reste aussi important aujourd’hui qu’à l’époque. On conserve la même mission.

MUTEK est et a toujours été très lié à Montréal. Sentez-vous que c’est la ville qui influence le festival, ou plutôt l’inverse?
C’est une combinaison de facteurs. Quand les premières éditions de MUTEK ont été pensées, on était influencés par exemple par le festival Sónar (qui se déroule en Espagne). Je me rappelle m’être dit que ça allait être difficile de compétitionner avec Barcelone! Mais on s’est rendu compte assez rapidement que Montréal a une spécificité culturelle. C’est sûr qu’on n’a pas les plages de Barcelone, mais il y a un exotisme, une signature qui sont propres à Montréal et qui, finalement, sont bénéfiques pour le festival. Entre 40 et 50% du public vient de l’extérieur de la ville. Pour beaucoup, c’est autant le festival que l’expérience de la ville qui les attire. Les deux éléments fonctionnent bien en duo.

On dit que Montréal est la capitale des arts numériques. De votre point de vue, l’est-elle réellement?
Hmm… Je pense que dans un contexte nord-américain, il n’y a pas d’endroit qui puisse nous «challenger» sur ce plan-là. Même dans un contexte européen, je ne vois pas trop d’autres villes qui offrent le même type de concentration d’acteurs dans ce milieu. Par contre, je dirais que ce n’est jamais acquis non plus. Et tout le travail qui est fait par le milieu pour se regrouper autour du Printemps numérique vise justement à cristalliser certaines consciences autour de ce qu’on a aujourd’hui pour pouvoir aller plus loin.

Et qu’est-ce qui aiderait, selon vous, à aller plus loin?
Je pense que c’est une question d’y croire, et après ça, de travailler en concertation avec toutes les parties impliquées, incluant non seulement les [instances gouvernementales qui octroient] les fonds publics, mais tous les partenaires potentiels. Ce qu’il faut réaliser, c’est que les arts numériques, c’est une nouvelle discipline. Par rapport au financement des arts, ce n’est pas un secteur qui est encore très supporté parce que c’est trop nouveau. Je pense qu’il reste encore pas mal de travail à faire.

À dimension humaine

Quand on dit que MUTEK est un festival de niche – un qualificatif qu’on utilise souvent pour décrire votre événement –, est-ce que ça vous plaît? Est-ce une fierté?
Je dirais que c’est un point d’ancrage, mais c’est aussi un défi. On cherche toujours à élargir les publics. Au fil des années, on a toujours œuvré à démocratiser, entre guillemets, la forme d’art qu’on présente. Là où on reste constants, c’est dans la recherche, dans le désir de faire découvrir au public montréalais de nouveaux talents, de nouvelles propositions. C’est un peu pour ça qu’on continue à garder l’étiquette de «festival de niche». Récemment, quelqu’un disait que MUTEK était un «festival boutique». Je me rallie peut-être plus à cette étiquette-là. Dans le fond, MUTEK, c’est un festival qui n’a pas grandi trop rapidement et qui reste, encore aujourd’hui, à dimension humaine.

EM15
Jusqu’à dimanche

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