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Gilles Latulippe s'éteint à l'âge de 77 ans

MONTRÉAL – Le Québec vient de perdre l’un de ses plus illustres comiques et l’une des grandes figures du burlesque: Gilles Latulippe est décédé mardi à l’âge de 77 ans.

Le Centre universitaire de santé McGill a précisé qu’il était mort d’un cancer du poumon pour lequel il était soigné depuis quelques années, dans une grande discrétion. M. Latulippe avait été admis le 22 août dernier à l’hôpital pour soigner une pneumonie.

Il y a deux mois à peine, le Festival Juste pour rire rendait hommage à ce grand de l’humour québécois pour ses 55 ans de carrière, en sa présence, à la salle Wilfrid-Pelletier de la Place des arts, à Montréal. Il était aussi en vedette encore il y a quelques mois à son théâtre d’été, à Drummondville, dans une pièce bien de son cru, «Salut Cocu», mais il avait dû écourter la saison à cause de cette pneumonie.

La carrière de Gilles Latulippe a été marquée par de nombreux succès à la télévision et au théâtre. En parallèle, il a dirigé pendant 33 ans «son» Théâtre des Variétés qui, en 2004, a été rebaptisé «La Tulipe» en son honneur.

Gilles Latulippe avait la comédie dans le sang. Très jeune, il développe un intérêt pour les blagues et réalise rapidement que son avenir ne se trouve pas à la quincaillerie familiale.

Vers le milieu des années 1950, il commence à travailler comme messager à la discothèque de Radio-Canada, où il fera la rencontre d’un autre homme qui marquera l’humour québécois: Yvon Deschamps. C’est à la suggestion de Deschamps que Gilles Latulippe commence à suivre des cours de théâtre à Montréal chez l’acteur français François Rozet, un apprentissage qu’il poursuit pendant deux ans.

Yvon Deschamps lui présente aussi Paul Buissonneau, qui oeuvre alors à la Roulotte, théâtre ambulant pour enfants du service des loisirs et des parcs de la Ville de Montréal. Le metteur en scène lui donnera ses premiers rôles, notamment dans la pièce «La bande à Bonneau». C’est cette performance qui convaincra Gratien Gélinas en 1959 de lui proposer le rôle du frère Nolasque dans sa deuxième pièce, «Bousille et les Justes».

Mais Gilles Latulippe ne se sent pas très à l’aise dans le drame et la tragédie, même en y jouant un personnage caricatural comme le frère Nolasque. «La vie est trop courte pour regarder des drames», dira-t-il plus tard. Et dans les années 1960, au moment où le travail se fait plus rare pour un comique, il décide de «créer son emploi» en entamant une tournée des cabarets avec un ami comédien, Robert Desroches.

Télé-Métropole (aujourd’hui TVA) viendra ensuite repêcher ce comique, d’abord à l’émission «Le Zoo du capitaine Bonhomme», de 1963 à 1967, en compagnie de ses camarades du burlesque Michel Noël et Olivier Guimond. Il deviendra également coanimateur de l’émission de variétés «Le 5 à 6» avec le chanteur Fernand Gignac, de 1967 à 1969.

Au même moment, en 1967, il crée encore son emploi en ouvrant son théâtre, rue Papineau à Montréal, avec un spectacle mettant en vedette les stars du burlesque québécois Olivier Guimond et Rose «La Poune» Ouellette. Le Théâtre des Variétés deviendra aussitôt le temple du burlesque au Québec, où seront présentés des spectacles qui attiraient les spectateurs par pleins autocars venus de toute la province. Gilles Latulippe dirigera pendant 33 ans, sans obtenir de subventions, la mythique salle jusqu’à sa fermeture en 2000. Le théâtre de la rue Papineau rouvrira ses portes quatre ans plus tard, et ses nouveaux propriétaires rebaptiseront la salle de spectacles «Cabaret La Tulipe» en l’honneur du comédien.

Dans les années 1970 et 1980, il allie son travail au Théâtre des Variétés à celui de la télévision, grâce à plusieurs émissions comiques qui obtiennent toujours la faveur du public. Que ce soit dans le rôle-titre de «Symphorien» (1970-1977), personnage d’abord créé dans «Cré Basile», dans celui de Théo Théoret dans «Les Brillant» (1979-1982) ou d’Hector Potvin dans «Poivre et Sel» (1983-1987), Gilles Latulippe devient année après année un incontournable du paysage télévisuel québécois, d’abord à Télé-Métropole mais plus tard aussi dans l’auguste maison de Radio-Canada.

Le cinéma québécois ne s’y trompera pas non plus en allant chercher ce grand comique dans des comédies des années 1970 comme «Deux femmes en or», «Y’a toujours moyen de moyenner» ou «Pousse mais pousse égal».

Puis, de 1987 à 1993, il coanime avec Suzanne Lapointe l’émission de variétés «Les Démons du midi», qui connaîtra beaucoup de succès dans une case horaire pas facile à tenir. Le duo enregistre plus de 1000 épisodes de cette émission.

Après ces périodes très actives à la télévision, le comédien se tourne en 1994 vers le théâtre d’été, pour boucler son année après deux saisons au Théâtre des Variétés. Pendant 20 ans, il présentera à Drummondville des vaudevilles qu’il écrit ou qu’il adapte.

Et l’été dernier, le Festival Juste pour rire réservait son «gala hommage» à ce comique cumulant 55 ans de carrière, mais pour qui le rire aura occupé une place centrale et essentielle tout au long des 77 ans de sa vie.

«J’ai besoin de rire tous les jours, j’ai besoin de faire rire, aussi, même si ce n’est pas devant un grand public — même si on est trois-quatre dans un appartement: j’ai besoin de raconter une histoire et d’entendre un rire. Ça fait partie de ma vie, c’est comme ça. C’est une passion, et on ne se débarrasse pas d’une passion comme ça», résumait-il en 2013 dans une entrevue à Radio-Canada.

Il y racontait aussi qu’à l’âge de quatre ans, il avait hâte d’entrer à l’école pour apprendre à écrire, afin de pouvoir noter les bonnes blagues pour ne pas les oublier. Il publiera d’ailleurs plus tard une douzaine de recueils de blagues et de sketches — pour qu’on ne les oublie pas, sans doute…

Les détails sur les funérailles de M. Latulippe ne sont pas encore connus mais le maire de Montréal, Denis Coderre, a déjà indiqué mardi que la famille avait demandé que sa dépouille soit exposée en chapelle ardente à l’hôtel de ville.

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