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Vézina n'a jamais eu connaissance des pots-de-vin

MONTRÉAL – Gilles Vézina, le supérieur de l’ingénieur Luc Leclerc, qui a admis avoir reçu au moins 500 000 $ en pots-de-vin lorsqu’il était employé par la Ville de Montréal, a affirmé mardi n’avoir jamais eu connaissance du stratagème de corruption.

Il a assuré n’avoir pris connaissance du rôle des ingénieurs Gilles Surprenant et Luc Leclerc que lors de leur témoignage devant la Commission Charbonneau, en octobre.

«Je n’ai jamais eu connaissance des rôles que ces deux personnes-là ont pu jouer à la Ville avant de les apprendre à la télévision en 2012», a affirmé l’ingénieur superviseur Vézina devant la Commission Charbonneau.

«Moi, le secret de Polichinelle, je n’en faisais pas partie, parce que je n’étais pas au courant», a soutenu l’ingénieur superviseur.

MM. Leclerc et Surprenant ont admis avoir touché chacun des centaines de milliers de dollars en argent comptant de la part des entrepreneurs en construction, durant plusieurs années, sans compter les repas au restaurant, tournois de golf, billets de hockey et autres faveurs.

M. Vézina était le supérieur immédiat de M. Leclerc et devait cosigner les réclamations d’«extras» qu’il présentait à la Ville au nom des entrepreneurs en construction.

En plus des billets de hockey, repas au restaurant et bouteilles de vin, M. Vézina s’est fait offrir les services d’une escorte par deux entrepreneurs en construction. Il a assuré avoir repoussé ces deux offres.

Il a affirmé ne pas s’être étonné de ces offres, estimant que les entrepreneurs voulaient seulement savoir ainsi ce qui lui plairait ou jusqu’où ils pouvaient aller.

M. Vézina a affirmé sous serment qu’il n’avait «jamais» reçu d’argent comptant de la part des entrepreneurs, ni à Noël, ni à son anniversaire, ni en aucune occasion. «Je n’ai jamais fait de demande et je n’ai jamais reçu d’enveloppe», a-t-il martelé.

Le commissaire Renaud Lachance et la présidente de la commission, France Charbonneau, se sont étonnés du fait que M. Vézina prétende n’avoir reçu que des cadeaux, mais pas d’argent, de la part des entrepreneurs, alors qu’il a admis connaître l’entrepreneur Catania depuis plus de 30 ans.

«Vous fréquentez M. Catania régulièrement et M. Catania paie des ‘cuts’ à monsieur Leclerc, paie des ‘cuts’ à monsieur Surprenant. Et monsieur Leclerc relève de vous. Et M. Catania ne vous dit pas qu’il paie une ‘cut’ à Leclerc?» s’est étonné le commissaire Lachance.

«Il ne m’a jamais dit ça», a répliqué M. Vézina, qui a fait sourciller les deux commissaires à plusieurs reprises mardi.

Les questions des commissaires laissaient voir qu’ils doutaient de la sincérité du témoin. «Dans les faits, vous étiez le gestionnaire de ces gens-là. Avez-vous déjà posé la question s’ils recevaient des enveloppes brunes? Est-ce que c’est un bon réflexe de gestionnaire de ne pas poser ces questions-là, quand on sait qu’ils ont des tournois de golf, des repas gratuits, des bouteilles de vin gratuites? Et vous n’avez jamais eu le réflexe de dire ‘j’espère que tu ne reçois pas d’enveloppes brunes là!’» s’est exclamé Renaud Lachance, un ancien vérificateur général.

L’ingénieur superviseur a aussi estimé avoir reçu régulièrement des bouteilles de vin de la part de 15 à 20 entrepreneurs en construction, à raison d’une ou deux par entrepreneur. Ces bouteilles étaient le plus souvent livrées à son domicile, rarement au bureau.

Yves Themens

Un cadre intermédiaire d’un niveau supérieur, Yves Themens, chef de section, a contredit des témoins précédents quant à l’existence de mécanismes de vérification à la Ville de Montréal.

«Il y en a eu des vérifications. À mon niveau, il y avait des vérifications de Samson Deloitte et Touche en 2007, 2008. Ils nous demandaient différents documents d’appels d’offres, les annonces dans les journaux. Et il y a même eu une autre grosse firme de vérification qui s’appelle Raymond Chabot Grant Thornton dans les années 2004, 2005, 2006», a-t-il assuré.

Alors que l’ex-dirigeant d’Infrabec, Lino Zambito, avait affirmé que c’est Yves Themens qui lui donnait la liste des soumissionnaires, lui permettant ainsi d’appeler ses concurrents pour que les entrepreneurs s’entendent entre eux pour se répartir d’avance les contrats, M. Themens a affirmé que de 1999 à 2009, il était légal de procéder ainsi. La liste des preneurs de cahiers de charges était disponible sur un comptoir, a-t-il indiqué.

Ce n’est que le 30 octobre 2009 que la directive a été changée et que toute information permettant d’identifier le nom des soumissionnaires devait demeurer confidentielle.

Fait à noter, M. Themens a été suspendu par la Ville pour une enquête administrative, à la suite des propos de M. Zambito.

M. Themens a cependant confirmé les propos de M. Zambito quant au fait que la firme Macogep, embauchée pour s’assurer que la Ville payait le juste montant pour ses contrats, en prenant les cahiers de charges et en soumissionnant comme les entrepreneurs, n’avait pas démontré de grands écarts avec les estimations de la Ville.

«Il n’y a eu que deux, trois soumissions où il y a eu des écarts importants. Pour le reste, les prix du marché réels, tels qu’estimés par Macogep, étaient pas loin des prix soumis», a rapporté M. Themens.

La Ville n’a cependant pas fait appel à une telle firme en 2007 et 2008. «Comme Macogep était pas mal tout le temps dans les prix des estimés et des coûts des contrats, ça validait qu’on n’était pas très hors champ», a justifié M. Themens.

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