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Les villes s’adaptent au changement climatique

Photo: Elisabeth Braw
Elisabeth Braw - Metro World News

À cause des bouleversements climatiques, de nombreuses villes pourraient bientôt disparaître sous les eaux. Parmi elles, Kristianstad, une petite ville suédoise, et Singapour, la cité-État asiatique. Métro s’est intéressé à leur façon de composer avec le changement climatique.

La ville de Kristianstad, en Suède, affronte l’élévation du niveau de la mer

Une ville suédoise s’attaque depuis quelque temps au problème auquel nous devrons tous faire face un jour : l’élévation du niveau de la mer.

Kristianstad, une charmante ville suédoise de 36 000 habitants, vient d’inaugurer une nouvelle promenade le long de son canal. Certains résidants y lisent, assis sur un banc de parc, tandis que d’autres passent à vélo. Des œuvres d’art moderne agrémentent même l’endroit.

Bienvenue dans le monde de l’adaptation au changement climatique. «Les inondations sont devenues fréquentes ces 10 dernières années, et les anciennes digues ne suffisent plus, explique Hans-Åke Ström, l’ingénieur en chef de la ville. Nous devons nous préparer à des inondations au moins deux fois plus importantes.»

Au fur et à mesure que le climat changera, le niveau de la mer montera, et les villes côtières du monde feront face au même problème. «L’adaptation au changement climatique doit être inscrite dans une stratégie urbaine, comme c’est le cas ici à Kristianstad», affirme Åse Johannessen, un chercheur universitaire du Stockholm Environmental Institute.

«Plus la mer montera, plus il sera difficile d’évacuer l’eau. Les villes doivent donc savoir si elles veulent vivre avec cette eau ou ériger une barrière entre elles et la mer. Cette dernière solution est risquée. Il vaut mieux s’adapter et vivre avec l’eau afin d’éviter de créer des systèmes vulnérables qui pourraient entraîner des catastrophes si les digues cédaient.»

Les digues de Kristianstad sont construites autour des quartiers résidentiels et ont l’air de faire naturellement partie du paysage. Les responsables de la ville en tirent par ailleurs profit en aménageant à leur sommet des promenades et des pistes cyclables. Des déchets servent même à leur construction.

«Nous érigeons des digues qui nous protégeront pour les 100 ans à venir, déclare Michael Dahlman, l’ingénieur responsable des prévisions relatives aux inondations. Sans les nouveaux barrages, toute la ville risquerait d’être inondée. Maintenant, nous sommes certains de survivre, même si les pires prédictions d’inondation se réalisent. Si la situation s’avère encore plus grave, eh bien, à peu près toutes les villes de la terre auront un problème.»

D’ici 2100, le niveau de la mer augmentera de 1,6 m autour de Kristianstad – et ce, même si la communauté internationale respecte ses engagements en matière de réduction des émissions de CO2.

Il ne fait aucun doute que Kristianstad sera inondée. L’équipe de M. Dahlman a ainsi prévu que l’un des parcs de la ville serve de gigantesque bassin de stockage de l’eau. Et dans l’hôpital de la ville, on a déjà transféré aux étages certains appareils de pointe qui se trouvaient au rez-de-chaussée. Cependant, l’érection de barrages ne fait pas l’unanimité. «Les gens commencent à trouver bizarre de vivre derrière des digues, et ce système n’est pas sans risque, note M. Johannessen. D’autres villes pourraient choisir de vivre avec l’eau plutôt que d’essayer de l’empêcher d’entrer.»

Parmi les autres façons de faire face au problème, citons les maisons sur pilotis. On trouve un tel bâtiment à Kristianstad : un nouveau musée qui incite les visiteurs à considérer la vie au milieu des eaux. «Nous nous désignons maintenant comme le Royaume des eaux, explique Eva Mårtensson, la préposée aux renseignements de Kristianstad. Nous nous servons de l’eau pour attirer les touristes. Et notre université a commencé à se spécialiser dans la sécurité de l’eau. Le changement climatique est là pour rester, nous devons donc le transformer en quelque chose de positif.»

Du meilleur bœuf
Jusqu’à récemment, le pâturage inondable qui se trouve à la sortie de Kristianstad était considéré comme de peu de valeur parce que les bêtes qui y paissent ne produisent que de la viande maigre. Aujourd’hui, le public n’en a que pour cette viande. «La rivière déborde souvent, explique l’éleveur Ulf Börjesson. L’eau dépose des nutriments. C’est bon pour moi, parce que c’est là que mes bœufs broutent.»

Questions et réponses avec William Solecki, professeur au CUNY Institute for Sustainable Cities, du Hunter College

Quel est le plus important changement urbain à prévoir?
Des inondations plus graves, et qui entrent plus profondément dans les terres. Dans le monde industrialisé, la plupart des villes situées près des côtes ont des infrastructures destinées à protéger les zones urbaines basses. Les cartes d’inondation doivent toutefois être mises à jour.

Et les infrastructures?
Elles sont dans des endroits accessibles, mais non dans des zones résidentielles; les autoroutes sont souvent situées dans des milieux humides, et les aéroports, sur des terres basses. Pour des raisons d’ordre pratique, les égouts et les usines de pompage se trouvent à ras l’eau. Une ville comme Miami fait face à tout un défi parce qu’elle est au niveau de la mer. Mais aucune ville ne dira : «Nous devons cesser d’exister.» Regardez Venise.

Comment les villes peuvent-elles se protéger?
Les propriétaires immobiliers commencent déjà à préparer leurs bâtiments pour faire face à l’élévation des eaux. Prenez les gros appareils de chauffage et de ventilation, qui se trouvent en général au sous-sol. Eh bien, comme ils pourraient être abîmés par l’eau de mer, les propriétaires doivent soit isoler leur sous-sol, soit monter ces appareils à l’étage.

L’adaptation ultramoderne de Singapour

Située sur la côte, la ville densément peuplée de Singapour compose avec le changement climatique de manière exemplaire.

«Nous essayons de récupérer chaque goutte d’eau qui tombe du ciel et chaque goutte d’eau que nous utilisons», déclare George Madhavan, directeur du département 3P Network du Public Utilities Board (PUB), l’agence nationale de l’eau de Singapour.

C’est le changement climatique qui a amené Singapour à procéder de la sorte. «Nous devons assurer la pérennité de nos ressources en eau, explique M. Madhavan. Notre approvisionnement ne dépend plus de la pluie, mais repose sur la technologie.» Le système, appelé NEWater, collecte l’eau du système d’égout. Au-dessus des installations d’assainissement, le PUB a construit des usines pour filtrer et irradier l’eau.

Singapour n’est pas la seule ville à recycler l’eau, mais nulle part ailleurs cette approche n’a été poussée aussi loin. «Traiter l’eau plutôt que se fier à la nature pour la filtrer est une bonne chose, note David Santillo, chercheur en hydrologie chez Greenpeace. Mais, prévient-il, NEWater n’est pas une solution miracle : «Nous devons aussi limiter notre consommation d’eau, car traiter des eaux grises nécessite beaucoup d’énergie.»

NEWater assure 30 % de l’approvisionnement en eau de Singapour, et d’ici 2050, ce chiffre devrait grimper à 50 %. Par ailleurs, si l’eau recyclée est principalement utilisée dans les usines, elle est aussi potable. Le PUB distribue régulièrement des bouteilles d’eau NEWater dans des événements. Comme la plupart des minéraux en ont été retirés, l’eau NEWater est absolument insipide. «Mais il est peu vraisemblable que boire cette eau filtrée puisse avoir une quelconque incidence sur l’apport en micronutriments, assure Sara Stanner, une nutritionniste de l’organisme britannique Nutrition Society. La teneur en minéraux de l’eau du robinet est de toute façon assez faible et représente moins de 1 % de l’apport quotidien recommandé de calcium et de magnésium.

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