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Organes vitaux sous haute protection

Photo: Amine Esseghir/TC Media

Ce sont des policiers qui transportent et assurent la sécurité des organes destinés aux greffes. Yilmaz Caglar, agent au Poste de quartier 10 à Bordeaux-Cartierville, le fait depuis neuf ans.

L’agent Caglar assure une cinquantaine de missions de protection et d’escorte des organes par an, pour lesquelles il n’est pas payé.

Grâce à une entente entre le Service de police de la Ville de Montréal (SPVM) et l’Association canadienne des dons d’organes et de tissus (ACDO), il y a comme lui, 50 policiers qui sont inscrits sur une liste de bénévoles pour le transport d’organes.

Seuls des membres des forces de l’ordre (policiers, agents de la Sûreté du Québec ou de la Gendarmerie royale canadienne) peuvent se mettre sur une telle liste puisqu’ils doivent agir en uniforme et armés. À 32 ans, M. Caglar est l’un des bénévoles les plus actifs.

«Se rendre disponible pour ce genre de transport demande beaucoup. Cela peut arriver la journée, la nuit, lors d’un souper de famille ou d’un mariage et je suis incapable de refuser ce genre de demandes», indique-t-il.

Photo: Amine Esseghir/TC Media

Se déplacer vite
Le policier utilise un véhicule de sept places de l’ACDO, lettré et équipé comme une voiture de police. «On peut transporter avec nous une équipe médicale qui doit parfois accompagner une greffe», dit-il. Les cœurs, poumons ou foies que les donneurs d’organes offrent après leur mort à un malade dans un état critique, sont traités comme des biens de grande valeur.

Le rayon d’action de M. Caglar est large et il a dû apprendre à se déplacer très rapidement. «On peut emmener un organe d’un hôpital montréalais à un autre, on peut aussi se rendre en banlieue. Parfois, la greffe peut être destinée à un malade ailleurs au Québec, au Canada ou même aux États-Unis», relève-t-il. Dans ce cas, il doit se rendre à l’aéroport.

Outre la sécurité de la greffe et des gens embarqués avec lui, il y a aussi une notion d’urgence. «Il faut savoir qu’un cœur doit être greffé dans les quatre heures qui suivent le prélèvement», observe-t-il.

De belles histoires
Au-delà des prouesses de conducteur, M. Caglar valorise beaucoup sa position très délicate. «Nous avons, d’une part, une personne qui est décédée et une famille qui vit un deuil, de l’autre, un malade qui attend une greffe depuis longtemps avec des proches heureux de le voir en meilleure santé et moi je suis au milieu de tout cela, dit-il. Cela fait ressortir notre humanité ce qui dépasse nos origines, nos cultures, nos religions ou nos couleurs.»

M. Caglar n’a pas à rencontrer les familles que ce soit celles des donneurs ou des receveurs. «Mais, cela arrive parfois par hasard.» À ce sujet, il a de belles histoires à raconter.

«Une fois, j’ai pu parler à un père qui donnait un rein à sa fille. Dans ce cas, le donneur était vivant, mais il était traité dans un hôpital et son enfant était soigné dans un autre, dit-il. Pour moi, c’était apporter un beau cadeau d’un père à sa petite fille.»

Il a eu aussi des cas plus étranges, comme le jour où il était intervenu sur une scène de crime. «C’était une tentative de meurtre dans un règlement de compte. La victime était blessée et à l’hôpital. Je devais en assurer la garde. C’était une personne connue des services de police. Un trafiquant de stupéfiant et consommateur de drogue.»

M. Caglar avait passé la nuit à surveiller le blessé pour la suite de l’enquête. Le matin il avait été relevé par un collègue et il est allé se reposer.

«Cinq heures plus tard, je recevais un message texte sur mon téléphone pour un transport d’organes. C’était mon blessé qui était décédé. Il était donneur et il sauvait cinq vies.»

À force de missions, M. Caglar considère que ce travail qui n’en est pas un lui rappelle pourquoi il a choisi son métier. «Quand on devient agent de police, on s’engage à servir les gens et on a la volonté d’apporter la solution à leurs problèmes. C’est exactement ce que je fais quand je transporte des organes.»

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