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Dédale bureaucratique pour un entrepreneur laurentien

Photo: Isabelle Bergeron

Lorsqu’il s’est lancé dans le domaine pharmaceutique en février, Aly Houdrouge, président de Nutribio Pharma, sous-estimait l’ampleur du processus bureaucratique qui l’attendait. Près d’un an plus tard, ensevelie sous les documents exigés par Santé Canada, l’entreprise n’est toujours pas en mesure d’exporter à ses clients à l’étranger.

Lorsque M. Houdrouge a décidé de s’orienter vers les produits de santé naturelle, Saint-Laurent s’est tout de suite avéré un choix logique et judicieux pour installer son entreprise. L’importance de l’industrie dans la zone industrielle lui permettait à la fois de sauver temps et argent.

«Mon transitaire est à cinq minutes de marche de la compagnie. Toutes les grandes sociétés de matières premières sont à proximité, ce qui réduit considérablement les coûts et les délais de livraison.»

Heureusement, puisque les coûts, estimés à plus de 10 000$, et les délais liés à la mise en marché de ses dix produits, se sont pour leur part multipliés au cours des derniers mois.

Conséquence, ceux-ci restent sur les tablettes de son entrepôt.

«En août dernier, j’ai reçu un client de l’étranger, distributeur au Moyen-Orient. On s’est mis d’accord pour certains produits que je devais créer pour lui. Maintenant, on est en décembre, et je n’ai pas pu lui faire parvenir parce que je n’ai pas encore les autorisations nécessaires.»

De lourdes démarches
Après avoir trouvé le local idéal où s’installer, M. Houdrouge a d’abord dû demander un permis de zonage auprès de l’arrondissement, pour s’assurer que la fabrication était possible à l’endroit qu’il avait sélectionné. Après trois semaines et 280$, l’entrepreneur a enfin pu prendre les clés des locaux.

Il s’est par la suite attelé à la mise aux normes du lieu, afin de répondre aux nombreux critères de Santé Canada. L’aération, la peinture et l’échangeur d’air, entre autres, ont été remis à neuf. M. Houdrouge était alors prêt à faire une demande de licence d’exploitation à Santé Canada.

«Le processus s’est avéré très long. J’ai dû rédiger des dizaines de pages de documents qui indiquaient les démarches que je suivrais lors de chaque étape de la production. J’ai inscrit les produits utilisés, les vêtements que je porterais, les machines nécessaires, etc. Je devais démontrer que mon entreprise fonctionnerait selon les « Bonnes pratiques de fabrication » de Santé Canada.»

En tout, la rédaction a pris plus d’un mois. Santé Canada a exigé quelques modifications au document. Entre la demande et la réception finale du certificat, deux mois se sont écoulés.

La licence est valide jusqu’en juin 2015. Le processus devra par la suite être recommencé.

«Les vrais entrepreneurs ne se découragent pas et passent à travers ces étapes-là, explique Luc Duguay, responsable PME à Développement Économique Saint-Laurent. Mais pour les nombreux qui hésitent, la lourdeur du processus pèse clairement dans la balance.»

Un éternel recommencement
Enfin prêt à démarrer , M. Houdrouge était loin d’être au bout de ses peines. Pour créer ses premiers produits, il s’est armé de courage pour obtenir de nouvelles autorisations.

Pour chaque élément fabriqué, l’entrepreneur doit obtenir une licence de mise en marché et un numéro d’autorisation émis par Santé Canada, un processus qui peut s’échelonner entre 30 et 180 jours.

«Quand je me suis lancé, je connaissais l’existence des licences et je les comprenais, explique M. Houdrouge. Certains produits pharmaceutiques peuvent s’avérer dangereux. Le problème, c’est que Santé Canada a beaucoup de retard dans l’attribution de ces licences. Ça, je ne m’y attendais pas. Pendant ce temps, on ne peut pas produire. C’est une grande perte pour nous.»

Pour qu’un produit puisse être exporté à l’extérieur du pays, il doit également se procurer un certificat de vente libre au coût de 280$ par produit, pour chaque pays visé.

«Si j’étais un gros entrepreneur, je serais avantagé, puisque les coûts seraient moindres, a ajouté M. Houdrouge. Si j’avais fait dix demandes au même moment à Santé Canada, j’aurais pu obtenir un rabais pour les certificats d’exportation. Mais c’est impossible pour une petite compagnie comme la mienne d’arriver avec autant de demandes en si peu de temps.»

Au Québec et au Canada, l’industrie pharmaceutique est très réglementée. Pour plusieurs entrepreneurs, la lourdeur et les coûts de processus de démarrage d’entreprise et de certification sont accablants, et vont même jusqu’à en décourager plusieurs de se lancer en affaires.

Au moment de mettre en ligne, Santé Canada n’avait pas répondu à notre demande d’entrevue.

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