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Minuit moins une pour les sans-papiers haïtiens

D'origine haïtienne, la Laurentienne Marie Agathe Décastro risque d'être déportée du Canada si sa demande de résidence permanente pour motifs humanitaires est refusée. Elle a jusqu'au 1er juin pour déposer sa demande auprès du ministère de la Citoyenneté et Immigration du Canada. Photo: François Lemieux/TC Media

Il est minuit moins une pour Marie Agathe Décastro et des milliers d’autres ressortissants haïtiens à Montréal visés par la fin du moratoire sur le renvoi dans leur pays. Anxieuse, cette mère de famille de Saint-Laurent prépare sa demande de résidence permanente pour motifs humanitaires après qu’une première requête pour asile lui eut été refusée en 2013.

Cette dernière a peur d’être renvoyée dans son pays d’origine où elle n’a plus de famille et où l’insécurité est grandissante alors que le moratoire d’Ottawa sur le renvoi des personnes en Haïti prendra fin le 1er juin.

«Avec les élections qui s’en viennent, l’insécurité recommence», dit-elle.

Elle s’inquiète pour l’avenir de sa famille, spécialement pour ses deux enfants majeurs qui devront faire une demande séparée de son propre dossier.

«Ma fille n’a pas un bon dossier parce qu’elle n’a pas beaucoup travaillé. Elle n’a pas fait de bénévolat, donc elle n’a pas vraiment de quoi remplir son dossier», mentionne-t-elle.

Son fils qui est en couple avec une Canadienne attend un enfant le mois prochain. Cela devrait aider son cas, selon le porte-parole du Comité d’action des personnes sans statut (CAPSS) Serge Bouchereau.

«Il est jeune et le fait qu’il va avoir un bébé c’est un avantage. Ça fait quand même un bon bout qu’il est ici et il parle français. Je pense qu’il a de bonnes chances d’être accepté», dit-il.

Le traitement d’une demande de résidence permanente pour motifs humanitaires peut prendre entre 30 et 42 mois pendant lesquels les demandeurs peuvent travailler.

Pas au bout de ses peines
Sans emploi, Mme Décastro a cependant dû payer 1800$ en frais de dossiers de demandes auprès du ministère de Citoyenneté et Immigration du Canada pour elle et ses trois enfants en plus des frais d’avocats.

Ce sont 550$ par demande pour chaque personne adulte et 150$ par personne mineure.

La préposée au bénéficiaire trouve que c’est beaucoup à payer alors qu’elle se retrouve au chômage depuis février après avoir envoyé en retard sa demande de renouvellement de permis de travail qui venait à échéance ce mois-là.

À la Chambre des Communes, le ministre de l’immigration fédéral Chris Alexander a mentionné le 25 mai que plus de 1000 demandes ont déjà été faites sur les quelque 3500 Haïtiens et Zimbabwéens visés par l’arrêt du moratoire.

M. Bouchereau avance deux hypothèses pour expliquer pourquoi si peu de gens ont déposé leur demande jusqu’ici.

«Probablement que le gouvernement a surestimé le nombre de gens qui étaient concernés par la levée du moratoire. Il se peut aussi que les deux tiers qui n’ont pas fait de demande sont découragés parce qu’une demande antérieure a déjà été refusée. Ils ne croient pas que cette dernière demande va pouvoir leur permettre de régulariser leur situation. C’est un ou l’autre», dit M. Bouchereau.

Selon lui, ce sont 3200 Haïtiens et 300 Zimbabwéens qui seraient visés par cette mesure. Ottawa avait imposé une suspension temporaire des renvois à l’égard d’Haïti il y a un peu plus de 10 ans en raison de l’instabilité et des violences, et ensuite également à cause du séisme qui a frappé l’île en 2010.

Ottawa a jugé en décembre que la population civile toute entière ne faisait plus face à un risque généralisé et a aboli le moratoire donnant un sursis de six mois aux ressortissants sans statut pour faire une nouvelle demande.

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