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Italie: mort du mafioso notoire Salvatore Riina

Colleen Barry et France D'Emilio - The Associated Press

MILAN — Le «patron de tous les patrons» de la mafia italienne, Salvatore Riina, qui purgeait 26 peines d’emprisonnement à perpétuité pour avoir orchestré l’élimination sanglante de rivaux et de ceux qui essayaient faire tomber la Cosa Nostra, est décédé tôt vendredi.

Riina est mort le jour de son anniversaire de naissance, quelques heures seulement après que le ministère de la Justice eut permis à ses proches de se rendre à son chevet. Il avait été plongé dans un coma artificiel dans la foulée de deux interventions chirurgicales au cours des dernières semaines, dans l’aile pénitentiaire d’un hôpital de Parme, dans le nord de l’Italie.

Le ministère de la Justice a confirmé son décès, sans fournir plus de détails.

Riina, qui comptait parmi les mafieux les plus connus d’Italie, a dirigé un empire criminel pendant 23 ans, tout en échappant aux autorités. Ses peines d’emprisonnement à perpétuité lui avaient été imposées pour une série de meurtres, dont certains qui avaient été commis dans les années 1950.

Fils d’un fermier de la ville de Corleone, un fief de la mafia situé près de Palerme, Riina s’était taillé une réputation sanguinaire au sein d’une organisation qui l’était tout autant.

Ses rivaux au sein de la mafia ont été éliminés un après l’autre dans les années 1970 et 1980 à Palerme, pendant que Riina orchestrait son ascension. La capitale sicilienne était à ce moment chaque jour le théâtre d’un meurtre associé à la mafia. Riina n’hésitait pas à faire fi de certaines règles cardinales de la Cosa Nostra, notamment en ce qui concernait la protection des femmes et des enfants innocents des balles de ses tueurs.

Il a été capturé en 1993 et incarcéré en vertu d’une loi spéciale qui impose des mesures de sécurité strictes aux principaux leaders de la mafia. Il était ainsi détenu dans une portion isolée de la prison et ne sortait que brièvement de sa cellule.

Au sommet de son pouvoir, les procureurs affirment que Riina a mis en place sur plusieurs années une stratégie pour assassiner les procureurs italiens, les policiers et tous ceux qui s’en prenaient à la Cosa Nostra.

Cette campagne sanglante s’est toutefois éventuellement retournée contre lui, ce qui a mené à sa capture.

Le gouvernement, en réponse à la colère du public, a attaqué la mafia de plein front après que deux des principaux procureurs antimafia du pays eurent été déchiquetés par des bombes. Giovanni Falcone et Paolo Borsellino ont été tués en moins de deux mois, en 1992.

Le principal procureur antimafia, Franco Roberti, dit que Riina ne s’est jamais repenti pour ses crimes.

«On le considérait toujours comme ‘le patron des patrons’, même en prison, a-t-il confié à l’Associated Press au téléphone. Sa mort ouvrira une lutte de pouvoir au sommet de la Cosa Nostra» même si ses décennies passées dans une prison de Milan l’ont privé de tout contrôle sur les activités du crime organisé.

Un juge antimafia de Palerme, Alfonso Sabella, a dit au réseau Sky TG24: «Jusqu’à 3 h 37 (l’heure de sa mort), (Riina) était toujours le ‘capo’ de la Cosa Nostra».

M. Roberti a dit que la Cosa Nostra a été marginalisée depuis quelques années par la puissante ‘ndrangheta calabraise, qui nage dans l’argent du trafic de la cocaïne. Cette organisation s’est maintenant propagée vers le nord de l’Italie et ailleurs en Europe.

«Mais comme ça se produit toujours, ces périodes alternent et les choses changent, a-t-il expliqué. Nous constatons maintenant une augmentation des activités financières des membres de la Cosa Nostra. Nous surveillons la situation.»

Les enquêteurs croient que Riina a orchestré sa montée vers le pouvoir en opposant ses rivaux les uns aux autres, puis en s’écartant des affrontements qui ont fait tomber un patron après l’autre dans les années 1970.

Il a commencé à se cacher en 1969, quand les autorités lui ont ordonné de quitter la Sicile au terme d’une peine de prison de cinq ans pour association mafieuse. Pendant ses décennies dans la clandestinité, la seule photo de lui dont disposaient les autorités était vieille de plus de 30 ans.

Plusieurs mafieux repentis ont raconté que Riina allait et venait à son gré pendant que la police le traquait, dirigeant les activités de la mafia depuis Palerme. Riina a été condamné par contumace une première fois en 1987, pour meurtre et trafic de drogue.

S’il s’est moqué des autorités pendant des décennies, les autorités ont retrouvé sa trace quelques mois après l’assassinat de M. Borsellino. Guidés par les indications de transfuges, les policiers ont intercepté sa voiture sur une autoroute de Palerme le 15 janvier 1993.

Riina a systématiquement refusé de collaborer avec les forces de l’ordre après sa capture. «Muet comme une tombe», a dit la radio RAI à son sujet, concernant son de refus de suivre l’exemple des autres mafieux qui avaient tout raconté à la police.

L’archevêque de Monreal, qui englobe Corleone, estime que la mort de Riina déboulonne le mythe de la toute-puissance du patron des patrons de la mafia.

«Mais la mafia n’a pas été défaite, et il ne faut donc pas baisser la garde», écrit monseigneur Michele Pennisi dans un courriel transmis à l’Associated Press.

M. Pennisi a dit ne pas savoir si la famille a l’intention de rapatrier la dépouille à Corleone, mais il a prévenu que des funérailles publiques seront impossibles puisque Riina était un «pécheur public».

«Si la famille en fait la demande, nous envisagerons une prière privée dans le cimetière», a-t-il indiqué.

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