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Myanmar: le pape rencontre le chef de l'armée

Nicole Winfield - The Associated Press

RANGOUN, Myanmar — Le pape François a amorcé un séjour diplomatique au Myanmar et au Bangladesh, lundi, en plongeant rapidement dans la crise entourant le sort réservé aux musulmans rohingyas: il s’est entretenu avec le puissant chef de l’armée birmane, avant même de commencer le programme officiel de son voyage.

Le Vatican n’a toutefois pas fourni de détails sur la «visite de courtoisie» de 15 minutes avec le général Min Aung Hlaing et trois responsables du bureau des opérations spéciales. La rencontre s’est tenue dans la résidence de l’archevêque de Rangoun, le cardinal Charles Bo, qui a rejeté les condamnations internationales des opérations contre les Rohingyas assimilées à un «nettoyage ethnique».

Le général est responsable de la sécurité dans l’État de Rakhine, où les opérations militaires contre la minorité musulmane ont fait fuir plus de 620 000 Rohingyas au Bangladesh voisin. Des réfugiés ont fait état de villages incendiés et de viols contre les femmes et les filles.

Le porte-parole du Vatican, Greg Burke, a simplement indiqué qu’ils avaient «discuté de la grande responsabilité des autorités dans le pays dans ce moment de transition».

Le bureau du général Min Aung Hlaing a affirmé dans un message sur Facebook qu’il avait la volonté de «la paix, l’unité et la justice interconfessionnelle». Le général a ajouté qu’il n’y avait pas de persécution ou de discrimination ethnique ou religieuse au Myanmar, et que le gouvernement accordait la liberté de religion à divers groupes.

La rencontre avait d’abord été planifiée pour mercredi, après l’entretien prévu mardi avec la dirigeante et lauréate du prix Nobel de la paix Aung San Suu Kyi, dans la capitale. Le Vatican n’a pas dit pourquoi le moment de l’entretien avait été changé.

Rohingyas, un mot lourd de sens

Le pape a déjà prié pour «ses frères et ses soeurs rohingyas», et son voyage a officiellement pour objectif d’encourager les minorités catholiques des deux pays et de tendre la main à certaines des communautés les plus pauvres d’Asie, mais les observateurs cherchaient à savoir s’il mentionnerait le nom «Rohingya» pendant son périple.

M. Burke n’a pas indiqué si le pape François avait utilisé le terme «Rohingya» dans sa rencontre avec le général, qui s’est conclue par un échange de cadeaux: le pape François lui a remis un médaillon du voyage, tandis que le général a donné au souverain pontife une harpe ayant la forme d’un bateau et un bol de riz ornementé.

La visite du pape doit se conclure avec un rassemblement de jeunes à Dacca, au Bangladesh, le 2 décembre.

Le pape a été accueilli par des responsables catholiques à Rangoun. Des milliers de catholiques birmans enjoués et vêtus de leurs habits traditionnels s’étaient massés le long du trajet de son convoi motorisé pour l’acclamer.

Des enfants ont crié «Viva il papa!» (Vive le pape) à son passage, en agitant les drapeaux de la Birmanie et du Saint-Siège. Des affiches souhaitant au pape «la plus chaleureuse des bienvenues» longeaient le chemin jusqu’à la capitale.

Le pape doit aussi rencontrer des moines bouddhistes et une délégation de musulmans rohingyas, ainsi que les leaders politiques et religieux du Bangladesh à Dacca.

Il s’entretiendra aussi avec les leaders catholiques de la région, en plus de célébrer quelques messes pour les fidèles.

L’Église catholique birmane a publiquement demandé au pape de ne pas mentionner le nom «Rohingya», que plusieurs ne considèrent pas être une minorité officielle au Myanmar. Au cours des derniers mois, quelque 620 000 Rohingyas ont fui vers le Bangladesh voisin pour échapper à ce que l’ONU a décrit comme un «exemple classique de nettoyage ethnique».

Une éventuelle décision de ne pas évoquer leur sort publiquement pourrait être vue comme une capitulation face aux leaders militaires birmans et venir entacher la réputation du pape, vu comme un défenseur des membres les plus marginalisés de la société, sans égard aux considérations politiques.

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