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Le Japon, 23 ans après l’attaque d’Aum Shinrikyo

Photo: Shizuo Kambayashi / AP
Mari Yamaguchi - The Associated Press

TOKYO — Treize membres d’un culte apocalyptique japonais pourraient être pendus à tout moment pour leur participation à différents crimes, dont une attaque chimique perpétrée dans le métro de Tokyo en 1995, mais le secret qui entoure la peine de mort au Japon est si dense qu’on ne sait pas à quel moment ils seront exécutés.

Il y a exactement 23 ans, mardi, des membres du culte Aum Shinrikyo ont percé des sacs de plastique afin de répandre du gaz sarin dans le métro, faisant 13 morts et des milliers de malades.

Le leader du culte, Shoko Asahara, et 12 de ses disciples ont été condamnés à mort pour cette attaque et d’autres crimes dont le bilan total atteint 27 morts. Certaines condamnations ont été prononcées il y a 20 ans.

Des employés ont observé un moment de silence mardi matin à 8h, heure locale, à la station Kasumigaseki, qui comptait parmi les principales cibles du groupe. Plusieurs personnes, dont la veuve d’une victime, ont déposé des fleurs sur un autel temporaire.

«On dirait que le processus (juridique) a entamé la phase suivante, a dit Shizue Takahashi aux journalistes. J’espère que (les exécutions) se feront en respect avec la loi.»

Le déplacement de sept membres du culte vers cinq prisons à l’extérieur de Tokyo, la semaine dernière, en a incité certains à croire que les exécutions étaient imminentes. Au Japon, les individus ayant participé à un même crime sont traditionnellement pendus la même journée.

Comme cela est toujours le cas pour les exécutions au Japon, le lieu et le moment des exécutions ne sont pas dévoilés, pas même aux proches des détenus ou à leurs avocats. Les exécutions ne seront annoncées qu’une fois complétées.

Mme Takahashi a récemment demandé au ministère de la Justice de pouvoir rencontrer les condamnés et assister aux pendaisons. «Je veux être là jusqu’à la fin», a-t-elle expliqué.

Son souhait ne sera probablement pas exaucé.

Même les condamnés ne sont informés que lorsque les gardiens viennent les chercher le matin de l’exécution. Après une discussion avec l’aumônier, puis un dernier repas ou une dernière cigarette, le prisonnier est conduit jusqu’à l’échafaud.

Si les dix détenus condamnés pour l’attaque dans le métro sont pendus, il s’agira du deuxième nombre d’exécutions le plus élevé en une seule journée dans l’histoire moderne du Japon. Le 24 janvier 1911, le Japon a pendu 11 prisonniers politiques qui avaient apparemment comploté pour assassiner l’empereur.

Certains survivants des crimes du culte s’opposent à ces exécutions, qui élimineraient tout espoir d’obtenir une explication plus complète.

Asahara s’est exprimé de manière incohérente, parfois dans un anglais très mauvais, pendant les huit années de son procès. Il n’a jamais admis sa responsabilité ou offert d’explications.

Né Chizuo Matsumoto, l’homme attend d’être pendu depuis près de 14 ans. Sa famille décrit un individu brisé et incontinent qui ne communique plus avec son entourage. Sa fille de 34 ans, Rika Matsumoto, affirme qu’il ne comprend pas son châtiment et qu’il a besoin d’être soigné pour s’expliquer. «Je veux simplement entendre mon père tout expliquer avec ses propres mots», a-t-elle récemment lancé sur Twitter.

Certains condamnés ont exprimé leurs regrets et contribué à des efforts antiterroristes. Shoko Egawa, un journaliste qui a couvert les crimes du culte depuis le début, a suggéré de leur laisser la vie pour qu’ils puissent témoigner des dangers de l’extrémisme.

Des spécialistes du culte préviennent aussi que leur exécution en fera des martyrs aux yeux de ceux qui vénèrent toujours Asahara.

Fondé en 1984, le culte avait attiré plusieurs jeunes, y compris des diplômés des meilleures universités dont Asahara avait fait ses lieutenants.

Le culte avait amassé un arsenal d’armes chimiques, biologiques et conventionnelles en vue d’un éventuel affrontement apocalyptique avec le gouvernement.

Le culte comptait 10 000 fidèles au Japon et 30 000 en Russie. Il a depuis été démantelé, mais quelque 2000 personnes adhèrent toujours à ses principes au sein de trois petits groupes qui sont épiés de près par les autorités.

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