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L’ange de la frontière entre le Mexique et les États-Unis

Des enfants regardent à travers la barrière frontalière américano-mexicaine. Photo: Mario Tama / Getty Images
Miguel Velázquez - Metro World News

Alors que la menace de la construction d’un mur entre les États-Unis et le Mexique plane depuis le début de l’ère Trump, l’activiste Enrique Morones prend soin des migrants qui se trouvent dans la zone frontalière.

L’idée de renforcer davantage la frontière n’affecte pas que les migrants voyageant vers le nord, mais aussi les Dreamers, ceux qui sont nés aux États-Unis de parents immigrés illégalement. Dans la foulée de cette crise, un homme travaille depuis trois décennies à réunir les migrants à leur famille en leur ouvrant La Puerta de la Esperanza (La porte de l’espoir), un espace de quelques centimètres dans le mur actuel qui permet aux familles séparées de se rencontrer.

Enrique Morones, originaire de San Diego, en Californie, mais de parents mexicains, a fondé l’organisme Les Anges de la frontière, mieux connu sous le nom Ángeles de la Frontera, qui aide les immigrants latinos depuis 1986.

En entrevue avec Métro, M. Morones raconte sa volonté d’«ouvrir» la frontière américaine et les raisons derrière son travail bénévole qui lui a valu le prix national pour les droits de la personne du Mexique en 2011.

Comment l’idée des Anges de la frontière vous est-elle venue?
J’ai tout commencé en 1986. Un ami du Salvador m’avait demandé d’aider des migrants qui vivaient dans une région riche de la Californie, mais travaillaient dans une ferme. Je leur ai apporté des vêtements et de la nourriture. Dans les années 1990, j’ai déménagé à Los Angeles. Quelque chose d’horrible s’est produit là. Des policiers ont arrêté et battu une femme. Ç’a été filmé et s’est sorti dans les médias. Quand c’est arrivé, je me suis dit: «C’est vraiment injuste, nous devons faire quelque chose pour protester, mais pacifiquement.» Donc, j’ai organisé un rassemblement, et 15 000 personnes sont venues.

«La première fois que nous avons ouvert la porte, une fille a serré son père dans ses bras pour la première fois de sa vie. Je n’en croyais pas mes yeux.» – Enrique Morones, activiste et fondateur de l’organisme Les Anges de la frontière.

En plus d’ouvrir la frontière entre le Mexique et les États-Unis, que font Les Anges de la frontière?
Nous sommes maintenant plus de 5 000 bénévoles. Nous apportons de l’eau dans le désert, nous offrons des repas aux travailleurs journaliers. À l’Action de grâce, nous sommes allés manger avec eux. Nous organisons beaucoup d’activités dans le Parque de la Amistad (Parc de l’amitié), et de là nous pouvons ouvrir la Puerta de la Esperanza (Porte de l’espoir) pour permettre à des enfants d’aller embrasser leurs parents, vu qu’ils ne peuvent pas voyager pour se voir. Nous l’avons fait six fois déjà. La première fois que nous avons ouvert la porte, une fille a serré son père dans ses bras pour la première fois de sa vie. Je n’en croyais pas mes yeux. J’ai dit aux agents d’immigration: «Voilà ce qu’on doit faire tous les jours, ouvrir la porte pour que les enfants puissent embrasser leurs parents.» Après, nous avons commencé à le faire la Journée de l’enfance, le 30 avril [au Mexique]. Mais l’an dernier, j’ai dit au directeur de la police de l’immigration: «Vous devez le faire plus qu’une fois par année.» Et il m’a répondu: «Enrique, vous avez dit que ce devait être à la journée de l’enfance.» J’ai rétorqué: «D’accord, le 20 novembre, c’est la Journée mondiale de l’enfance.»

En 2018, vous prévoyez ouvrir ce passage trois fois…
Chaque année, nous voulons le faire plus souvent. Nous ne savons pas si nous pourrons, à cause de cette personne à Washington dont je suis un peu inquiet. Je suis certain qu’il a entendu parler de la Puerta de la Esperanza et qu’il voudra y faire quelque chose, mais j’ai une bonne relation avec l’agence frontalière locale et cette décision sera prise localement. J’espère que la situation restera telle quelle.

Est-ce que la renégociation de l’Accord de libre-échange nord-américain (ALENA) aura des répercussions sur vous?
Nous savons que ce fou à la Maison-Blanche veut le renégocier. J’aime la position que le Mexique a pris : «Nous pouvons aller de l’avant sans les États-Unis.» Bien sûr, les États-Unis sont un important partenaire commercial. L’ALENA a permis aux grosses compagnies de grandir, mais les petits entrepreneurs ont beaucoup souffert. Ça a poussé bien des migrants à se rendre au nord. Les Mexicains sont aimés de tout le monde, sauf quelques-uns aux États-Unis, à commencer par vous savez qui. J’ai beaucoup voyagé, et quand je dis que je suis Mexicain, les gens répondent: «J’adore le Mexique.» Ici, aux États-Unis, la grande majorité des gens aiment le Mexique.

Quelle histoire vous a le plus ému?
Un jour où nous apportions de l’eau dans le désert, nous avons vu un homme à pied. C’était un migrant qui transportait quelqu’un sur ses épaules. Nous leur avons donné de l’eau. J’ai pensé amener un des deux hommes, qui était très malade, à l’hôpital, mais je ne voulais pas y aller par peur des agents d’immigration. Nous sommes restés avec eux pendant quatre heures et les avons laissés dans un endroit sûr. Après quelques semaines, leurs enfants m’ont dit que nous avions sauvé leur vie. Quand les gens me demandent si les Anges de la frontière sont utiles, je sais que ç’a été le cas pour Francisco et Pedro.

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