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Une femme veut gravir l’Everest pour la 9e fois

WEST HARTFORD, Conn. — Accaparée par ses deux filles et son emploi chez l’épicier Whole Foods, Lhaka Sherpa n’a tout simplement pas le temps de s’entraîner pour gravir le mont Everest. Mais qu’à cela ne tienne: elle a déjà atteint le sommet huit fois et espère recommencer au cours des prochaines semaines.

La Népalaise de 44 ans détient le record du monde du nombre d’ascensions réussies par une femme et elle compte revisiter le toit du monde sous peu.

«Mon corps sait que je suis déjà montée aussi haut. C’est comme un ordinateur. Il s’adapte très rapidement. Mon corps connaît la haute altitude. Il s’en souvient», affirme-t-elle.

Lhakpa Sherpa est reconnue par l’organisation Guinness World Records et elle est bien connue dans le monde de l’alpinisme, mais mis à part ses exploits, elle mène une vie plutôt modeste au Connecticut, où elle a déménagé en 2002 avec son mari, lui aussi un alpiniste de renom, dont elle est aujourd’hui séparée.

Elle se lève habituellement à 6 h pour accompagner ses filles de 11 et 16 ans à l’école. Puis, parce qu’elle ne sait pas conduire, elle marche environ trois kilomètres jusqu’à son emploi, où elle lave la vaisselle et sort les déchets.

«On n’imaginerait pas qu’elle a escaladé l’Everest si on ne la connaît pas et si on ne lui en parle pas, souligne son patron chez Whole Foods, Dan Furtado. C’est la personne la plus humble que je connaisse et son éthique de travail est époustouflante.»

Lhakpa dit qu’elle aurait aimé devenir médecin ou pilote de ligne, mais les filles de la communauté ethnique sherpa dans laquelle elle a grandi avec ses quatre frères et sept soeurs n’avaient pas accès à l’école.

Sans éducation formelle, elle a travaillé au Connecticut comme femme de ménage, commis dans un dépanneur et plongeuse pour permettre à ses filles et à son fils d’avoir une meilleure vie aux États-Unis, explique-t-elle.

«Mon loyer est dispendieux ici, poursuit-elle. Mais c’est ici qu’on trouve les meilleures écoles.»

Une affaire d’hommes

Lhakpa explique avoir l’habitude de surmonter les défis. On décourageait les filles sherpas de pratiquer l’alpinisme, mais elle avait la tête dure et voulait aider les hommes de sa famille à transporter des biens jusqu’au camp de base de l’Everest.

Devenir alpiniste a été plus ardu, se souvient-elle, surtout après que la première Népalaise à avoir rejoint le sommet, Pasang Lhamu Sherpa, eut perdu la vie en redescendant, en 1993.

Lhakpa Sherpa et quatre autres femmes ont convaincu le gouvernement de leur accorder un permis en 2000. Elle est devenue la première Népalaise à atteindre le sommet et à en revenir vivante.

Trois sherpas qui travaillent comme guides se partagent le record de 21 ascensions réussies. Deux d’entre eux sont retraités, mais le troisième, Kami Rita, a récemment dit à l’Associated Press qu’il tenterait bientôt une 22e conquête.

L’Américaine Anne Parmenter a accompagné Lhakpa lors d’une expédition malheureuse en 2004. Cette ascension a été marquée par de multiples problèmes, y compris une violente altercation physique entre Lhakpa et son ex-mari qui a laissé la femme inconsciente.

Mme Parmenter est impressionnée par les obstacles physiques et mentaux que Lhakpa a été en mesure de surmonter.

«Elle jouit clairement d’une physiologie exceptionnelle qui lui permet de vivre ici, de ne pas s’entraîner, d’y retourner et de s’adapter très rapidement à cet environnement de haute altitude, explique-t-elle. Elle peut faire ça, fonctionner, et être très forte.»

«Je voulais montrer qu’une femme peut faire le travail d’un homme, indique Lhakpa. Il n’y a pas de différence quand on escalade une montagne. Je grimpe pour toutes les femmes.»

Lhakpa admet avoir certaines craintes quand elle grimpe, comme de savoir qui s’occuperait de ses filles si elle avait un accident sur l’Everest. Elle se trouvait dans un camp en 2015 lorsqu’un séisme a provoqué des avalanches qui ont fait 19 morts sur les flancs de la montagne. Sa fille Shiny affirme que sa soeur et elle ont dû patienter une semaine avant d’apprendre que leur mère était saine et sauve.

Le K2 l’an prochain

Lhakpa Sherpa économise chaque année le coût d’un billet d’avion aller-retour vers le Népal et elle se joint à une expédition organisée par un de ses frères. Cette année, ils guideront une cinquantaine de personnes, surtout des Européens, vers le sommet de la montagne. L’an prochain, elle compte s’attaquer au K2 — le deuxième sommet de la planète — pour la première fois.

Mais cette année, pour la première fois, elle profite d’une commandite de Black Diamond, un fabricant de produits de plein air qui lui fournit de l’équipement et une aide financière.

«Tout dans sa vie démontre que les mots « je ne peux pas » ne font pas partie de son vocabulaire», souligne un représentant de l’entreprise, Chris Parket.

Lhakpa a aussi été saluée le mois dernier par sa ville adoptive de West Hartford, qui l’a proclamée «reine du mont Everest».

Mais aux yeux de plusieurs de ses collègues, elle est simplement Lhakpa.

«Je n’ai pas besoin d’être célèbre, assure-t-elle. Je veux continuer à pratiquer mon sport. Si je ne le fais pas, je me sens fatiguée. Je veux repousser mes limites.»

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