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Greenpeace met fin à sa trêve avec la compagnie forestière Sinar Mas

Dita Alangkara / The Associated Press Photo: Dita Alangkara / The Associated Press

BANGKOK — L’organisation environnementale Greenpeace a mis fin mercredi à sa trêve de cinq ans avec la firme indonésienne Sinar Mas, qui compte parmi les plus importants producteurs de pâtes et papier de la planète.

Greenpeace reproche à la compagnie d’avoir poursuivi ses coupes dans les forêts indonésiennes pendant toute la durée de leur coopération sur la protection de l’environnement.

L’annonce de mercredi découle d’une enquête réalisée par l’Associated Press.

Greenpeace avait accepté, en 2013, de suspendre sa campagne contre Sinar Mas et sa filiale Asia Pulp & Paper (APP), qui en retour s’étaient engagées à mettre fin à la déforestation, aux accaparements de terres et aux conflits avec les communautés locales.

La campagne de Greenpeace avait associé la destruction des forêts par Sinar Mas aux boîtes utilisées pour emballer les poupées Barbie. Sinar Mas avait ensuite perdu des clients de premier plan comme Mattel, Xerox, Danone et KFC.

Dans la foulée des reportages de l’AP en décembre, Greenpeace affirme que sa propre enquête, et notamment l’analyse d’images satellitaires, a démontré que deux compagnies associées à Sinar Mas ont détruit près de 8000 hectares de forêts et de tourbières sur l’île de Bornéo pendant les cinq années durant lesquelles elle conseillait le conglomérat familial concernant la protection des forêts.

Les preuves démontrent que Sinar Mas «n’est pas vraiment sérieuse» en ce qui concerne la fin de la déforestation en Indonésie, a dit un représentant de Greenpeace dans ce pays, Kiki Taufik.

«Le groupe doit immédiatement passer aux aveux, a-t-il dit. Immobiliser les bouteurs et restaurer ce qui a été détruit. C’est le seul geste qui pourra sauver APP et Sinar Mas de nouvelles campagnes et de nouvelles annulations par ses clients.»

Un communiqué publié par Asia Pulp & Paper affirme que la compagnie s’affaire depuis trois mois à répondre aux préoccupations de Greenpeace et qu’elle est «déçue» de la décision. Elle prétend qu’elle ne contrôle pas directement les deux compagnies responsables de la déforestation.

«La lutte à la déforestation en Indonésie est un problème complexe et aucune compagnie ne peut le résoudre par elle-même», peut-on lire dans le communiqué.

L’Indonésie rase ses forêts vierges plus rapidement que n’importe quel autre pays, permettant aux producteurs de papier et d’huiles de palme d’engranger des profits faramineux, mais causant aussi des problèmes sociaux et environnementaux chroniques.

La destruction rapide de ses forêts et ses émissions de gaz à effet de serre font de l’Indonésie le quatrième plus grand contributeur au réchauffement climatique mondial, derrière la Chine, les États-Unis et l’Inde.

L’enquête de l’Associated Press a exposé au grand jour des liens importants entre Sinar Mas, sa division des pâtes et papier, sa division de la foresterie et 27 plantations de bois qu’elle avait déclaré au monde être indépendantes, dans une tentative apparente d’«écoblanchiment» de son image.

La plupart de ces fournisseurs de bois étaient installés dans les bureaux de Sinar Mas. Ils étaient souvent la propriété d’employés actuels ou anciens de Sinar Mas.

Utilisant des photos prises par des drones ou des satellites, l’Associated Press a démontré que Muara Sungai Landak, une des deux compagnies aujourd’hui dénoncées par Greenpeace, abattait depuis plusieurs années des arbres sur des terres en vertu de permis gouvernementaux. Le bois tropical était transformé en granules de bois qui étaient ensuite mises en marché comme source d’énergie renouvelable.

Des documents officiels révèlent que Muara Sungai Landak est détenue par deux employés de Sinar Mas Forestery. La plantation n’est pas mentionnée parmi les fournisseurs officiels de Sinar Mas.

Greenpeace dit que son enquête a démontré que Muara Sungai Landak a rasé 3000 hectares de forêts depuis 2013. Sinar Mas «a refusé de réfuter» les preuves selon lesquelles cette compagnie appartient à deux de ses employés, selon le groupe environnemental. Le communiqué d’Asia Pulp & Paper reconnaît toutefois que des employés comptent parmi les actionnaires de la plantation.

Une autre plantation, Hutan Rindang Banua, est propriété de la filiale minière de Sinar Mas, qui est inscrite à la bourse de Singapour. Greenpeace affirme qu’elle a rasé près de 5000 hectares de forêts sur l’île de Bornéo depuis 2013.

Le rapport annuel de la filiale minière, Golden Energy and Resources, reconnaît que Hutan Rindang Banua coupe des forêts vierges.

D’autres organisations environnementales avaient remis en question l’entente intervenue en 2013 entre Greenpeace et Sinar Mas, compte tenu du passé trouble de la compagnie.

Certains accusaient la famille Widjaja, qui est propriétaire de Sinar Mas, d’utiliser cet accord pour se mettre à l’abri des critiques pendant qu’elle construisait une nouvelle usine de pâtes et papier sur l’île de Sumatra. Cette nouvelle usine compte parmi les plus grandes du monde et augmente de façon marquée la demande pour le bois.

L’enquête de diligence appropriée menée par Greenpeace avant de signer l’entente n’avait pas détecté les liens importants entre Sinar Mas et des fournisseurs qu’elle prétendait indépendants.

Greenpeace affirme que Sinar Mas a réalisé certains progrès depuis cinq ans, mais elle lui reproche aussi de n’avoir fourni aucune réponse crédible et de n’avoir posé aucun geste concret en réponse à l’enquête.

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Sur internet:

Greenpeace slams APP/Sinar Mas over links to deforestation, ends all engagement with company

http://www.sinarmas.com/en/

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