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Barack Obama: «Il faut essayer, même si ce n’est que pour prévenir un seul massacre»

FAIRFAX, VA - JANUARY 7: (AFP OUT) U.S. President Barack Obama answers a question at town hall at George Mason University on January 7, 2016 in Fairfax, Virginia. The president this week announced new, relatively mild executive actions to regulate the gun industry. (Photo by Aude Guerrucci-Pool/Getty Images) Photo: Getty Images

Le président américain, Barack Obama, a défendu l’action exécutive qu’il entend mener pour restreindre l’accès aux armes à feu aux Etats-Unis hier, lors d’une rencontre publique organisée par CNN – et à laquelle la National Rifle Association, le puissant lobby en faveur des armes à feu, a refusé de participer.

Peu de temps avant le début de l’apparition du président dans les téléviseurs américains, un sondage montrait que 67% des citoyens étaient en faveur des mesures annoncées par M. Obama, qui inclut l’obligation pour tous ceux faisant un profit en vendant des armes de s’enregistrer auprès des autorités fédérales. À l’heure actuelle, un quidam vendant des fusils d’assaut sur l’internet, dans une vente de garage ou dans une foire d’armes n’a pas besoin de rapporter son activité au gouvernement.

«Nous ne savons pas qui achète des armes d’assaut et des mitraillettes présentement. Nous ne savons tout simplement pas», a affirmé M. Obama en réponse à une question de Taya Kyle, la veuve d’un tireur d’élite de la marine américaine qui s’est fait tuer par un soldat souffrant d’un syndrome post-traumatique, en février 2013. M. Kyle avait questionné l’efficacité des mesures proposées par M. Obama, soulignant que «les lois ne peuvent pas empêcher les tueurs de nous enlever nos êtres chers» et que «le meurtre ne pouvait pas être rendu illégal».

Le réseau CNN avait invité le public à poser ses questions au président. À Mme Kyle s’ajoutait Kimberly Cordan, une victime de viol qui assurait au président qu’elle aurait aimé posséder une arme le soir où elle fut agressée, pour pouvoir résister à celui qui «l’a changée à jamais».

«Une arme n’aurait peut-être pas prévenu le crime, a insisté M. Obama, puisqu’il faut être bien entraîné pour parvenir à tirer sur quelqu’un qui nous prend par surprise. Outre cela, le fait d’avoir une arme à feu à la maison augmente le risque qu’un accident malheureux survienne, comme cela se produit trop fréquemment. Puis ce que nous proposons ne vous priverait aucunement de votre droit de posséder une arme. Cela rendrait tout simplement plus difficile pour votre agresseur de s’en procurer une».

Depuis l’annonce, mardi, des mesures que le président américain entend prendre pour restreindre l’accès aux armes, tous les candidats républicains à la présidence ont fustigé M. Obama, certains, comme Ted Cruz ou Donald Trump, allant jusqu’à jurer que le gouvernement fédéral cherchait à «confisquer les armes de citoyens qui respectent la loi».

«Ma proposition est modeste et elle ne résoudra pas tous les problèmes, a ajouté M. Obama. Mais elle respecte le deuxième amendement», soit ce passage inscrit dans la constitution américaine qui assure à chaque citoyen le droit de posséder et de porter une arme.

«La majorité des citoyens de ce pays sont plus sensibles que leurs élus, a insisté le président, critiquant au passage les républicains qui s’opposent à toutes restrictions de l’accès aux armes à feu malgré les fréquentes tueries «qui enlèvent la vie d’innocents et qui déchirent des familles».

«Nous acceptons que les enfants ne puissent pas ouvrir un contenant de médicaments. Pourquoi acceptons-nous qu’ils puissent appuyer sur une gâchette?» – Barack Obama

M. Obama, qui avait versé des larmes lors de son annonce, mardi, en évoquant les petites victimes du massacre de Newtown, où un jeune homme aux prises avec des troubles mentaux avait tué sa mère avant de fusiller 20 élèves du primaire et 6 adultes à l’école Sandy Hook en décembre 2013, a encore une fois rappelé cet épisode jeudi, décrivant celui-ci comme «un des jours les plus difficiles de sa présidence».

«C’était la première fois que je voyais des agents des services secrets pleurer en devoir», a-t-il confié.

«Le jeune homme qui a enlevé la vie de ces enfants n’avait aucun passé criminel, c’est vrai, a-t-il répondu au shérif Paul Bibeau, qui se demandait en quoi un contrôle plus serré lors de l’achat d’une arme à feu empêcherait les criminels de s’en procurer. Mais il avait accès un arsenal qui a rendu son massacre possible. Il ne faut pas penser que parce qu’on ne peut pas prévenir tous les crimes, il faut baisser les bras. Il faut essayer, ne serait-ce que pour en prévenir un seul», a affirmé le président Obama, soulevant les applaudissements de l’audience, composée en majeure partie de victimes d’actes criminels commis avec des armes à feu et par quelques représentants de l’industrie des armes.

«La discussion [à propos du droit de porter une arme à feu] est détournée, constamment, a dénoncé M. Obama. C’est pourquoi la NRA ne s’est pas présentée ici ce soir pour discuter avec le président, alors que c’est pourtant son boulot de défendre la vente d’armes.» Plus tard, il ajoutait: «Il y a une fausse information qui circule, pour des raisons qui, selon moi, sont politiques et commerciales, selon laquelle je cherche à m’en prendre à ceux et celles qui respectent la loi. Ce n’est pas le cas», a confirmé M. Obama, tournant en dérision tous ceux qui croient qu’il ourdit une «conspiration secrète» visant à démunir les citoyens de leurs armes pour établir la loi martiale – une théorie qui refait surface à chaque fois qu’un président tente de restreindre l’accès aux armes aux États-Unis.

M. Obama a également souligné que sept ans après le début de sa présidence, «l’industrie des armes à feu n’a pas semblé trop souffrir», rappelant qu’à chaque nouvelle tuerie, «la NRA réussit à convaincre un nombre important de ses partisans que les autorités cherchent à confisquer leurs armes», ce qui ne manque pas de provoquer une ruée vers les marchands de fusils du pays.

«Je ne cherche pas à écrire une nouvelle loi, a affirmé M. Obama. J’essaie seulement de faire un progrès [pour mon pays]. Maintenant que j’entame ma dernière année en tant que président, je réalise que les changements se font à petits pas. Mon boulot, c’est de faire un de ces petits pas avec mon pays, pour que la destination soit atteinte dans 30, 40, peut-être 50 ans.»

Le président avait publié sur le site du New York Times une lettre ouverte juste avant son apparition publique de jeudi soir.

Dans son texte, M. Obama écrit que le contrôle des armes à feu est la responsabilité de tous et que les Américains doivent demander à leurs dirigeants d’être «assez courageux pour s’élever contre les mensonges du lobby des armes à feu».

«Les changements seront difficiles. Ils n’arriveront pas du jour au lendemain. Mais l’avènement du droit de vote pour les femmes n’est pas arrivé du jour au lendemain. La libération des Afro-Américains n’est pas arrivée du jour au lendemain. L’avancement des droits des gais, lesbiennes, bisexuels et transgenres a pris des dizaines d’années de travail», a illustré le président.

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