Soutenez

L’inaccessible rêve d’un petit nid bien à soi

Photo: Archives Métro

Le taux de chômage des jeunes au pays demeure obstinément le double de celui de la population en général : 14 % contre 7 %. Et le bilan de l’emploi que publie vendredi matin Statistique Canada pour septembre va probablement signaler que la tendance persiste. Peut-être que leur situation va finir par s’améliorer, mais pour l’instant, les jeunes sont souvent évincés du marché du travail.

Les jeunes Québécois sont également évincés du marché immobilier, et dans ce cas-ci, ce désavantage risque de durer encore plus longtemps. Selon l’Institut de la statistique du Québec, parmi tous les groupes d’âge québécois, seuls les 25 à 34 ans vont subir un recul dans les prochaines décennies quant à la proportion d’entre eux qui seront propriétaires d’une résidence (quelle qu’en soit la forme) : de 43,6 % qu’elle était en 2006, elle va tomber à 41,9 %. Tous les autres segments de la population, même les 85 ans et plus, vont voir leur taux grimper!

Ces données sont tirées d’une campagne que mène présentement l’Association provinciale des constructeurs d’habitation du Québec (APCHQ), Mission génération, et qui met en évidence les difficultés grandissantes que rencontrent et vont rencontrer les jeunes adultes qui rêvent d’un nid bien à eux.

En fait, ils sont coincés de deux côtés. Tout d’abord, le marché du travail, comme on le disait plus tôt, ne leur est pas favorable. On prédit depuis des années que le départ à la retraite des baby-boomers va inverser le rapport de force en faveur des jeunes, mais en réalité, ceux qu’on appelle poliment les «travailleurs expérimentés» s’accrochent à leur bureau. Manque de fonds pour la retraite, crainte de sombrer dans l’ennui, les raisons sont diverses pour expliquer cette persistance à l’emploi. Pire, même après avoir fermé boutique, plusieurs se trouvent de petits boulots à temps partiel autrefois réservés aux jeunes. Ceux-ci ont donc de la difficulté à décrocher un emploi payant, et par conséquent à réunir la mise de fonds nécessaire à l’achat d’une propriété.

Parallèlement, les prix de l’immobilier n’ont cessé de grimper depuis le début des années 2000, ce qui rend la tâche encore plus lourde. On calcule qu’il faut maintenant 10 ans, au bas mot, pour accumuler cette mise de fonds; et un récent sondage mené par la firme Ad hoc auprès des jeunes révèle que pour 70 % d’entre eux, c’est là la raison principale pour laquelle ils sont encore locataires.

On se comprend, devenir propriétaire n’est pas une nécessité absolue, et on peut fort bien aimer être à loyer si les conditions sont avantageuses. Reste que Mission génération souligne qu’au Canada, les gens qui possèdent une habitation finissent par accumuler grâce à elle, en moyenne, une valeur de 300 000 $… de quoi procurer un solide coussin quand l’heure de la retraite aura finalement sonné.

La question est posée : les gouvernements pourraient-ils faire quelque chose pour adoucir la pente? Offrir des congés de taxes, par exemple, ne serait-ce que pour les droits de mutation (la fichue «taxe de Bienvenue»)? Faciliter l’accès à des conseils financiers pour que les candidats à la propriété puissent se donner un plan de match approprié? Garantir des taux d’intérêt hypothécaires plus bas que ceux du marché, comme du temps du programme Corvée Habitation, au début des années 1980? La vie va de cycle en cycle, et le marché immobilier ne fait pas exception. Un jour, les prix de l’immobilier vont se réajuster et redevenir abordables. Mais ce jour tarde à venir, et en attendant, une génération entière de jeunes adultes est forcée d’attendre sur les lignes de côté.

Les opinions exprimées dans cette tribune ne sont pas nécessairement celles de Métro.

Articles récents du même sujet

Mon
Métro

Découvrez nos infolettres !

Le meilleur moyen de rester brancher sur les nouvelles de Montréal et votre quartier.