Les poteaux de la Charte

Contre vents et marées, les quatre candidates du Parti québécois issues du Maghreb ont endossé courageusement la version radicale de la charte de Drainville. Et alors?

Même si je ne partage pas leur opinion sur l’interdiction totale du port des signes religieux par les fonctionnaires, j’ai beaucoup de respect pour ces quatre candidates, car elles ont tourné le dos à leur communauté d’origine pour endosser la position de leur parti.

Pour une grande partie de la communauté maghrébine du Québec, les Yasmina Chouakri, Leila Mahiout, Évelyne Abitbol et Djemila Benhabib sont devenues des parias, des «informatrices indigènes» instrumentalisées par le PQ.

Les faits semblent donner raison à leurs détracteurs. Au lieu d’offrir à ses quatre candidates maghrébines des circonscriptions prenables, voire assurées, le PQ les a catapultées dans des châteaux forts libéraux. Sauf miracle – et l’historique des élections le prouve –, ces Maghrébines pro-charte n’ont aucune chance de gagner dans Anjou–Louis-Riel, Bourassa-Sauvé, l’Acadie et Mille-Îles.

C’est une loi non écrite : tous les partis politiques envoient leurs apprentis se faire les dents dans ce genre de circonscription, sorte de clubs-école. Ces sacrifiés sont appelés des poteaux.

Or, les «Maghrébines» du PQ sont d’un autre calibre. Dans les circonstances, elles sont des candidates-vedettes. Qu’aurait-il coûté au PQ de présenter au moins l’une des quatre dans une circonscription où elle aurait pu gagner facilement? Je pense à Djamila Benhabib, par exemple, qui s’est beaucoup sacrifiée pour les souverainistes depuis plusieurs années.

Est-ce trop demander aux militants péquistes de soutenir l’une de «leurs icônes» de la charte affirmant les valeurs de laïcité et de neutralité religieuse de l’État ainsi que d’égalité entre les femmes et les hommes et encadrant les demandes d’accommodement? Ou sont-elles juste des scalps exhibés par Bernard Drainville au cours de ses sorties médiatiques?

Ce n’est plus un secret, sur le marché du travail, nos Maghrébins du Québec sont des laissés pour compte. Depuis une décennie, à leur arrivée, leur taux de chômage est le triple de la moyenne nationale. Ils partagent cet horrible sort avec notre communauté noire.

C’est un fait aussi, comme l’a si bien décrit Vincent Marissal dans La Presse, notre Assemblée nationale est très loin du caractère très multiethnique de Montréal, la plus grande ville, où vit près de la moitié de la population de la province.

Pour rétablir une partie de ce tort, le parti de Pauline Marois aurait dû faire un effort. Car, si ses quatre «guerrières maghrébines» avec tous leurs sacrifices n’ont pas eu leur chance, qui l’aurait un jour avec le PQ?

Les opinions exprimées dans cette tribune ne sont pas nécessairement celles de Métro.

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