Les «Charlie Hebdo» se déchirent

Après le massacre qui a failli le décimer, Charlie Hebdo a fait l’objet d’un élan de solidarité inespéré. L’argent a coulé à flots dans ses caisses, mais au lieu de le sauver, cette manne risque-t-elle de le détruire?

Alors que ses ventes et ses abonnés se rétrécissaient comme peau de chagrin, l’attentat meurtrier du 7 janvier dernier a renfloué les caisses de Charlie Hebdo. Grâce aux différents dons, à la vente de presque huit millions d’exemplaires du «numéro des survivants» et à l’explosion des abonnements, ce journal satirique n’a jamais été aussi florissant.

Cette nouvelle manne financière a attisé les convoitises et jeté un froid entre les propriétaires et les journalistes de cet hebdomadaire «emblématique». Depuis plusieurs semaines, le conflit fait les choux gras des médias de l’Hexagone.

Comme l’a rappelé récemment le journal Le Monde, ce n’est pas la première fois que la question de l’argent hante Charlie

Hebdo. En 2006, ce journal satirique a enregistré un bénéfice inespéré de presque 1 million d’euros, grâce notamment à la vente d’un demi-million d’exemplaires de son premier numéro avec une caricature du prophète des musulmans. Mais, deux ans après, les journalistes qui «tiraient le diable par la queue» ont découvert avec effroi que ces bénéfices avaient été honteusement accaparés par les propriétaires!

Actuellement, Charlie Hebdo est détenu à 40 % par les parents de son ex-directeur de la rédaction, Charb, tué dans l’attentat, à 40 % par le dessinateur Riss, nouveau directeur de la publication et rescapé du 7 janvier, et à 20 % par Éric Portheault, directeur financier du journal.

Face à ces propriétaires, un collectif de 15 journalistes de Charlie Hebdo s’est constitué pour contrer une mainmise sur leur publication «emblématique» par une «poignée d’individus».

À la fin mars dernier, ce collectif a publié une tribune dans Le Monde où il revendique que la publication satirique est désormais un bien commun qui doit continuer et rester fidèle aux valeurs de ses fondateurs et de ceux qui ont disparu.

Dans la foulée de ce tordage de bras entre les «Charlie Hebdo», le 13 mai, Zineb El Rhazouia, une des journalistes du collectif, a été mise à pied par la direction du journal, avant que cette sanction soit levée à cause de l’émoi qu’elle a déclenché partout.

Avec la grogne qui enfle, Riss essaye de calmer les esprits et martèle dans les médias être sur le point de relancer le journal satirique. Est-ce le début d’un nouveau Charlie Hebdo avec une direction collective? Ou les frères Kouachi ont-ils réussi à le tuer?

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