Bencheikh C. Finkielkraut

De plus en plus d’Occidentaux perçoivent l’islam comme une religion de la terreur. Est-ce le cas? Pour jeter un éclairage sur le sujet, un récent débat passionnant a réuni l’académicien Alain Finkielkraut et l’islamologue Ghaleb Bencheikh.

Fidèle à sa pensée, d’emblée, Alain Finkielkraut a dressé un diagnostic alarmant de la décadence du monde musulman. Un monde de régimes totalitaires, d’obscurantistes, sans liberté, où les gens sont parqués jour et nuit dans des mosquées pour apprendre à haïr la liberté, les femmes, la vie et les autres à travers une religion tyrannique, littéraliste, formaliste et machiste, qui n’est pas toujours, mais trop souvent l’islam ordinaire.

Ghaleb Bencheikh ne s’est pas défilé et a même avoué que ce diagnostic était très en deçà de la réalité amère, car le monde musulman pâtit d’une régression tragique et vit sur la défaite de la pensée. Néanmoins, il a précisé que l’islam est aussi source de mansuétude, de magnanimité, de longanimité, de miséricorde, de bonté, de prise en compte de l’intérêt d’autrui, d’ouverture sur le monde, d’altérité confessionnelle et de respect absolu de la dignité humaine.

Pour l’islamologue, dans le cas des musulmans, l’antidote n’est pas juste de renouer avec l’humanisme d’expression arabe en contexte islamique qui a été totalement oblitéré, mais aussi de s’inspirer de l’audace intellectuelle qui a prévalu quand le monde musulman a transmis à l’Europe ce qu’il a reçu des Grecs. À ce moment-là, il y avait des humanistes musulmans, comme al-Tawhidi, Averroès et Wallada fille de Mustakfi Mohammed III.

Malheureusement, de nos jours, les musulmans ont oublié ce passé glorieux, et l’Occident veut l’ignorer.

Agréablement surpris et clairement abasourdi par le discours de son interlocuteur, Alain Finkielkraut a demandé à son vis-à-vis : «Êtes-vous représentatif?»

La réponse a été non. Mais Ghaleb Bencheikh a précisé qu’il n’a pas inventé son discours, car son maître est son père, qui fut recteur de la grande mosquée de Paris, le disciple d’une lignée de musulmans avant-gardistes.

Sans aucune prétention, le penseur musulman a ajouté qu’en leurs temps, les Thomas More, Campanella, Benjamin Constant et Condorcet n’étaient pas représentatifs, car le plus grand voyage commence par un pas.

Pour leur salut, l’islamologue incite ainsi les musulmans à sortir des clôtures dogmatiques à travers trois chantiers titanesques : la liberté – notamment la laïcité, l’égalité et la désacralisation de la violence.

Cela dit, si l’islam doit sortir de sa torpeur, et c’est possible selon Ghaleb Bencheikh, l’Occident ne doit plus réduire les musulmans à la barbarie de l’obscurantisme terroriste et aux jeunes paumés qui sont exclus dans ses sociétés.

Tout en étant ferme et sévère contre les dérives meurtrières de la terreur, l’islamologue souhaite que cette lutte soit aussi accompagnée par un investissement intellectuel qui fait défaut en Occident.

Désormais, anéantir et la barbarie djihadiste et le discours polémologique occidental virulent sur les musulmans passe par l’esprit!

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