L’austérité pour les nuls

Photo: Getty Images/iStockphoto

Comme parent, je suis membre du conseil d’administration d’un CPE depuis plusieurs années. Récemment, et pour la première fois, je me suis retrouvé, avec mes collègues de ce CA, devant un dilemme : retirer ou non aux enfants leurs deux portions quotidiennes de lait.

En cette fin d’après-midi, nous avons passé en revue les différentes options pour réduire le budget de notre CPE de quelques milliers de dollars. En grattant les fonds de tiroir, on a envisagé de supprimer le poste de standardiste-secrétaire, de remplacer le poisson frais par des conserves, d’enlever carrément le poulet du menu pour le remplacer par des légumes et du tofu, de couper une journée de congé annuelle offerte gracieusement aux employés. Mais c’était insuffisant. Il nous fallait encore couper quelque deux mille dollars! C’était le lait.

Avec ses coupes imposées aux services de garde, le gouvernement Couillard nous a mis une hache dans les mains, à mes collègues du CA et à moi, qui sommes des bénévoles, pour sabrer les dépenses. Si c’était pour couper dans le gras, la pilule aurait été plus facile à avaler, mais priver des enfants de leur lait, c’est un geste que je ne m’étais jamais imaginé être obligé de faire un jour, surtout ici!

En effet, comment peut-on en arriver à couper du lait aux enfants d’une garderie à Montréal, au Québec, au Canada, une des terres les plus aisées et prospères du monde, qui est à l’abri de la famine, des guerres et de toutes ces horreurs qui nous dépriment au téléjournal?

Dépité, j’ai quitté précipitamment cette première assemblée déprimante pour aller à une autre réunion, celles des parents d’élèves de l’école de ma fille aînée. Là aussi, j’ai fait face, comme les autres parents, à un couplet de mauvaises nouvelles. La plus difficile d’entre elles a été le maintien ou non de la sortie hebdomadaire à la bibliothèque.

À cause des coupes, l’un des deux temples du livre les plus proches de cette école n’a plus de bibliothécaire, et l’autre n’en a plus qu’une. Du coup, cette dernière croulait sous les demandes de plusieurs écoles du coin.

Dans le cas du CPE, les enfants des membres du CA n’ont pas besoin du lait, du poulet et du poisson frais offerts aux bambins qui le fréquentent. Mais Dieu sait que plusieurs de ses usagers sont issus de familles parmi les plus fragiles et les plus pauvres du Canada.

De la même façon, mes enfants n’ont pas besoin de l’école pour fréquenter une bibliothèque publique. Cette activité est une tradition hebdomadaire religieusement respectée à la maison. Mais qu’adviendra-t-il des autres enfants, ceux qui, pour X raisons, n’ont pas la chance d’être initiés aux bienfaits de la lecture par leurs parents?

Si cela n’est pas de l’austérité, alors comment peut-on le qualifier?

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