L’identité silencieuse

Le parc Jarry
Photo: FELIX O.J. FOURNIER/TC MEDIA

Comme partout en Occident, beaucoup d’encre coule à propos de l’identité au Québec. Alors qu’on se déchire sur des notions rébarbatives, notre société se diversifie à une cadence hallucinante.

Il y a plus d’un mois, je me suis retrouvé parmi des amis autour d’un barbecue au parc Jarry, à Montréal. Sous un soleil radieux, nous étions 18 Québécois de différentes origines. Autour d’un authentique thé marocain à la menthe, le débat sur l’immigration, la culture et l’identité s’est imposé naturellement.

Pendant que nos enfants criaient à tue-tête, on s’est prêté à un jeu pour dresser la généalogie de chaque convive et celle de ses proches. Le fou rire.

Personnellement, je me suis rendu compte que j’ai pas moins de sept cousins français. Six sont nés français et le septième a quitté le Maroc pour l’Hexagone afin de terminer ses études supérieures avant de s’y installer pour de bon. Cette branche française de ma famille a eu des enfants au sein de couples mixtes. L’un d’eux est une union entre une Sud-Coréenne et un Marocain qui ont eu deux enfants français.

Un ami présent autour du barbecue nous a parlé de sa sœur et son beau-frère naturalisés allemands qui ont eu des enfants titulaires de la double nationalité allemande et marocaine. Mieux encore, un des frères de cet ami a immigré en Scandinavie. Lui, son épouse et leurs enfants deviendront suédois.

Un autre convive, un ami marocain naturalisé canadien, accueillait pour une partie du printemps son frère naturalisé américain. Et ce n’est pas fini. Du côté de son épouse marocaine naturalisée canadienne, son beau-frère les a rejoints pour s’installer au Québec. Il a la triple identité marocaine, suédoise et canadienne.

Enfin, une amie marocaine s’est pointée à notre repas en plein air avec son mari québécois, dont elle a eu une fille. Quant à mes voisins de palier, qui se sont joints à notre buffet eux aussi, ils forment un couple québéco-ontarien. Eux aussi sont devenus parents d’une petite fille née au Québec.

Cette journée-là, nous étions une petite cohorte de Québécois au parc Jarry avec des ramifications en Ontario, au Maroc, en Suède, en Allemagne, en France, aux États-Unis et en Corée du Sud.

Encore mieux, en traversant le parc pour aller chercher de l’eau, j’ai croisé des groupes hétéroclites qui tapissaient les espaces gazonnés du parc. Des Québécois d’adoption qui, sous d’autres cieux, se font la guerre, se haïssent par médias interposés et ne se fréquentent presque jamais. Mais ici, à Montréal, ils sont voisins de palier, leurs enfants fréquentent la même école publique et partagent même un barbecue dans un parc après un hiver infernal!

Alors que le brouhaha prime plus que le dialogue serein sur des sujets délicats, notamment le taux d’insertion en emploi de nos minorités visibles ou le climat de suspicion quant à leur volonté de se fondre dans la société d’accueil, l’identité québécoise se féconde en silence!

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