J’étais dépendant à la porno

Hier, parmi les invités de Tout le monde en parle se tenait Mathieu St-Onge, un artisan du web, et peintre aussi. Vous pouvez voir ses toiles, blogues et vlogs sur son site matstonge.com. Pour le site/projet Trouble.voir.ca, Mathieu a fait un vlog de 30 minutes sur sa dépendance passée à la porno, une dépendance bien réelle, mais ô combien méconnue et taboue.

Moi aussi j’ai donné dans cette dépendance. Hé oui, le gars que vous aimez tant lire, que vous trouvez si drôle, brillant, humain a déjà passé autant de temps à regarder de la porno en une journée que ça en prend à regarder la trilogie du Seigneur des anneaux…version longue. J’en parle sporadiquement entre deux blagues légères sur scène depuis un peu plus de deux ans. C’est maintenant écrit et lu par des milliers de personnes. Tant mieux. Faut péter la bulle.

Pourquoi est-ce une dépendance méconnue et surtout taboue? De un, elle est assez nouvelle, et de deux, c’est une dépendance très peu glamour. C’est plutôt honteux. Quand quelqu’un dit «J’ai consommé de la coke pendant longtemps», y a quelque  chose de glamour, de presque «hot». Tout le monde aime se raconter une histoire de brosse, aussi gênante soit-elle. Mais c’est rare que tu vas avoir un concours de «la fois où je me suis masturbé le plus de fois de suite dans une journée». Cette «brosse»-là, on ne la raconte pas. Elle n’est pas «hot» ni «cool». Jim Morrison, on aime l’imaginer sortant de scène, une bouteille de Jack Daniel’s à la main, la face dans de la coke. L’imaginer sortir de scène, aller s’enfermer dans une pièce, seul, devant un ordi, le dos courbé comme Quasimodo… c’est moins rock.

La porno est une des variantes des dépendances sexuelles et cyberdépendances. J’ai fait beaucoup de cybersexe, surtout à travers des histoires fantaisistes «role play». J’y voyais presque un exercice de style, de création. L’auteur et le dépendant ne faisaient qu’un. Mon imagination et ma plume au service des fantasmes de demoiselles, et des miens. J’ai dû écrire l’équivalent de 34 Fifty shades of Grey… gratis!!! Avoir su… j’aurais structuré et imprimé ça en livre. Mais, bon, c’est le mauvais côté des dépendances, t’es pas super «réfléchi» dans ce temps-là. En même temps, c’est peut-être une bonne chose. J’aime mieux être connu comme Ben Lefebvre l’humoriste que Ben Lefebvre l’auteur de romans qui chatouillent l’entre-cuisse. Quoi que dit d’même…

Je fais des blagues, mais c’est une vraie de vraie dépendance. Quand t’en consommes pas, tu penses à en faire, ou tu culpabilises de l’avoir fait, ou tu rationalises de le faire. Bref, comme toute dépendance, elle te bouffe du temps, de l’énergie, la vie. En plus, elle te met un filtre pas le fun devant les yeux. Comme dit l’humoriste américain Marc Maron, «You get Porn Brain». Les images dans ta tête n’arrêtent pas une fois l’ordi fermé. Tsé, c’est l’fun dans la vie faire son épicerie pis voir et sentir les fruits que t’as dans face. Avoir en tête des images en boucle de founes, ça a tendance à brouiller les sens.

J’ai pas de conseils magiques à donner à ceux qui sont touchés par cette dépendance. Je peux juste leur souhaiter tout l’amour du monde et la force de s’accrocher à un de ces p’tits moments de lucidité qui passent dans l’esprit entre deux scènes d’orgies. Ensuite, d’écouter leur feeling du bon move à faire. Combien de moments de lucidité sont passés dans ma tête avant que j’en pogne un pour de bon? Beaucoup.

Mucho mucho love.

Les opinions exprimées dans cette tribune ne sont pas nécessairement celles de Métro.

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