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Changer les règles du jeu

Robin Williams. Ce n’est plus le sujet de l’heure, mais j’ai une bonne raison d’avoir attendu si longtemps avant de donner «my two cents». J’avais rien de différent ou de nouveau à dire. Quand j’ai rien à dire, j’ai ce réflexe musculaire étrange de fermer ma yeule. Jeudi dernier, cet état buccal a changé.

Je suis allé voir 1987. Crime que c’est drôle. Ricardo Trogi a un sens du rythme, du punch, du dialogue aussi efficace qu’une grand-mère juive pompette sur le cognac. On a notre maître du funny intelligent. Dans son film, son jeune lui-même, âgé de 17 ans, se retrouve devant l’absurdité d’avoir a choisir son métier d’avenir post secondaire. On se souvient tous de ce fameux test d’orientation qui, avec quelques questions, était censé te sizer et t’enligner dans une direction pour le reste de tes jours. Un test de personnalité du 7 jours qui décide de ton avenir, de ton métier, de ta vie adulte. Brillant.

Avoir une job. Le most. L’essentiel. Aux yeux du système, c’est ça qui fait de toi un «adulte». Puis, faut que tu le sois au plus sacrant, un adulte… Parce que la machine elle roulera pas toute seule. Mais si c’était autre chose être adulte? Si c’était plus profond, plus complexe?

Quand tu viens au monde, tu es jeune. On n’apprend pas à être jeunes, on l’est. Naturellement, automatiquement. Tu viens au monde immature, égoïste, irresponsable, impatient, égocentrique. Plein de patterns psychologiques prennent forme, à ton insu, sous ta peau lisse pleine de plasters Pierrafeu. Puis, tu dois devenir adulte, cette chose, cette personne inconnue. Avec le temps, tranquillement, tu grandis. Ou pas… L’important, c’est d’être fonctionnel, de travailler. Le reste, c’est du bonus. Franchement, on s’en contrefiche si «en dedans», t’es pas tant que ça adulte. Tant que tu sais pousser ton crayon, pis dire «oui monsieur». C’est ben correct.

Petit cul, quand je jouais à être grand, je jouais pas à être à l’écoute de mes besoins, de mes émotions, à être empathique, nuancé, mature, responsable. Jouer à être grand, c’était jouer à avoir une job, puis acheter des affaires. Les affaires étant bien sur des minis articles d’épicerie en plastique. C’est ça qu’un enfant a dans sa tête quand il pense ce que c’est être grand, être un adulte, être accompli. Avoir une job, puis acheter des affaires. Ah, puis pousser un bébé dans une poussette.

Un jour, le jeu devient réalité. T’as une vraie job, t’achètes des vraies affaires et tu pousses un vrai bébé. Le soir, tu sais pas pourquoi t’as un poing dans le ventre, tu dors pas, tu répètes des patterns amoureux malsains pour des raisons inconnues, t’es envies sont compulsives plus qu’enrichissantes, mais t’es ADULTE, tu bois du café! Les adultes boivent du café, je bois du café, donc je suis un adulte, je suis accompli. C’est mathématique. N’ah, c’est d’la grosse bullshit.

Je ne suis ni un ministre de l’éducation, ni un ministre de la santé. Mais la dépression, le burnout, les dépendances, les relations amoureuses malsaines, les maladies et bobos psychologiques de tout genre…. Faudrait peut-être commencer à voir d’où ça part, et peut-être, commencer à changer les règles de ce jeu qu’être «adulte». On en a perdu un grand, on en perd d’autres tous les jours.

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