Le recours collectif: de quoi s’agit-il?

Claire Harvey est rédactrice en chef du service d’agence de presse Option consommateurs.

Récemment, des recours collectifs ont fait beaucoup jaser dans les chaumières. En quoi consiste cette étrange bibite?

Imaginez. Vous avez été victime d’une tragédie comme celle qui a soufflé le centre-ville de Lac-Mégantic, le 6 juillet dernier. Autre exemple: une catastrophe naturelle comme celle de la tempête de verglas de 1998 vous a chassé de votre domicile pendant des semaines, et votre compagnie d’assurances refuse de vous rembourser vos repas et vos frais d’hébergement pourtant prévus au contrat. Ou encore, vous vous êtes fait arrêter avec des centaines d’autres personnes lors d’une manifestation, et vous croyez que cette arrestation est abusive. Dans tous les cas, de nombreux citoyens s’estiment lésés.

La force du groupe
Que faire pour obtenir justice? Dans le domaine de la consommation, la plupart du temps, les gens pourraient poursuivre l’entreprise fautive à la cour des petites créances en vue d’obtenir gain de cause. Le hic: bien souvent les sommes en jeu sont minimes. Les consommateurs lésés hésiteraient à exercer un recours qui leur coûterait temps et argent, et leur rapporterait des miettes. Dans le cas de tragédies comme celle survenue à Lac-Mégantic ou lorsque l’État ou les forces policières sont en cause, c’est David contre Goliath. Il vous faudrait d’excellents avocats et un portefeuille fort bien garni, car la cause pourrait prendre des dizaines d’années avant de connaître son dénouement.

Vous pourriez convaincre toutes les personnes intéressées par le litige d’exercer individuellement leurs droits devant les tribunaux? Le hic: cette option entraînerait une multiplication des recours, nécessiterait des frais astronomiques et allongerait les délais pour des procès dont les jugements pourraient se révéler contradictoires. L’un des avantages du recours collectif est de permettre aux associations ou à une personne de représenter les intérêts individuels de l’ensemble des membres d’un groupe devant les tribunaux.

Un rôle curatif
Lorsque l’on assiste à des préjudices collectifs causés, par exemple, par le refus de plusieurs compagnies de respecter leurs obligations contractuelles, la négligence d’une entreprise ou l’abus de pouvoir des forces policières, c’est essentiellement par la voie d’un recours collectif qu’on peut espérer réparer les préjudices causés aux consommateurs. Celui-ci joue un rôle curatif. Un seul règlement ou jugement favorable permet d’indemniser, de façon individuelle ou collective, des milliers de personnes qui, autrement n’auraient pas obtenu justice.

… et préventif
Le recours collectif joue également un rôle préventif et peut pallier, dans une certaine mesure, le désengagement de l’État en matière de défense des droits et de protection des citoyens. Il permet aussi – du moins on l’espère – d’assainir les pratiques commerciales. La simple possibilité que les consommateurs puissent recourir à cet outil incite probablement des entreprises à les traiter de façon plus équitable.

Évidemment, certains règlements n’ont pas l’heur de plaire aux citoyens parce que le montant de leur indemnité n’est pas assez élevé, comparativement aux sommes versées aux avocats. Mais la procédure prévoit notamment qu’ils peuvent s’exclure de l’entente et faire valoir leurs droits sur une base individuelle en se faisant représenter à leurs frais par un avocat. Il ne faut pas oublier non plus que les avocats peuvent travailler pendant des années sur un recours collectifs. En général, ils ne sont rémunérés que lorsqu’il y a un règlement ou un jugement qui leur est favorable.

Une société plus juste?
Bref, le recours collectif se veut un outil de régulation sociale et économique. Il contribue au développement d’une société plus respectueuse des droits de chacun en rétablissant un meilleur rapport de forces entre les entreprises, l’État et les consommateurs. Comme on est encore loin de l’équilibre, cette étrange bibite a sa raison d’être.

Option consommateurs

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