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Les cerises sur le gâteau

Chaque mardi, la journaliste et animatrice Julie Laferrière et l’humoriste, animateur et illustrateur Pierre Brassard posent un regard original sur les usagers du transport en commun.

Ligne d’autobus 55, direction nord. C’est vendredi, il est 17 h 50.

En termes d’heure de pointe, celle-ci est dure à battre. Nous sommes plusieurs humains à cohabiter en ce moment. Plusieurs âmes qui voudraient bien quitter immédiatement l’intérieur du véhicule pour se réincarner chez soi. Mais chacun d’entre nous prend son mal en patience et essaie de garder l’équilibre jusqu’à son arrêt.

Un homme dans la cinquantaine monte à la hauteur de Duluth. Il porte une tuque avec un gros pompon rouge, un manteau embarrassant et de grosses mitaines qui n’ont pas de pogne. Il tente de retenir dans ses pinces lousses une grosse cloche à gâteau en plastique transparent qui abrite un tout aussi imposant gâteau: un forêt-noire, si on se fie aux copeaux de chocolat, au crémage blanc et, surtout, à l’abondance de cerises qui le couronnent.

Le pauvre essaie de se frayer un chemin et ne peut à la fois être le garde du corps du  gâteau et protéger sa propre personne en s’agrippant à un poteau. Il vacille chaque fois que le chauffeur freine. C’est-à-dire très souvent.

Nous sommes quelques-uns à l’observer et à sourire. La scène est assez clownesque. Et on ne peut qu’imaginer la catastrophe s’il venait à tomber, les quatre fers en l’air, le gâteau renversé dans une explosion de crème fouettée.

Je ne suis pas la seule à avoir visualisé cette scène puisqu’une jeune femme qui avait gagné à la loto des places assises a eu la gentillesse de lui offrir son siège. Le monsieur s’est confondu en remerciements et s’est assis en poussant un soupir de soulagement.

Je me suis demandé s’il se rendait à un anniversaire. Celui d’un enfant? Peut-être était-il responsable du dessert et devait-il ramener sa prise intacte afin de ne pas décevoir ledit enfant au moment de souffler ses bougies et de faire son souhait.

C’est ce que je me dis quand l’homme met fin à mes spéculations. Il soulève la cloche de plastique et saisit une des cerises qu’il engloutit goulûment. Le sourire que cette petite délinquance provoque chez lui est beau à voir.

En fait, c’est peut-être sa fête à lui. Et la beauté de la chose, c’est qu’en ce jour qui marque le temps qui passe, entre le gâteau et soi, tout est permis. Surtout d’avoir l’air d’un enfant de 5 ans quand on en a 50.

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