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Lundi

Chaque semaine, la journaliste et animatrice Julie Laferrière et l’humoriste, animateur et illustrateur Pierre Brassard posent un regard original sur les usagers du transport en commun.

Station Place-des-Arts. Nous sommes lundi. Il est 8h45.

C’est connu, les lundis ne font pas l’unanimité. En fait, nous sommes nombreux à croire que, si cette journée n’existait pas, nos semaines s’en porteraient mieux.

Là où les jeudis, vendredis et samedis sont pour plusieurs les «journées chouchoutes», le lundi, lui, serait le mouton noir de nos cycles hebdomadaires.

Et, pour confirmer cette hypothèse, c’est souvent ce jour-là que les platitudes du quotidien se placent sur notre chemin. L’ordi qui plante, le gruau qui brûle et colle dans le fond du caquelon, notre paire de bas préférés qui se troue. On démarre notre semaine au ralenti, avec souvent du sable dans l’engrenage.

C’est pourquoi, quand quelque chose de bien se produit, aussi banale cette chose soit-elle, cela nous déstabilise, gentiment.

Comme lorsque, mesdames, un très beau garçon nous observe et, qu’ayant peine à croire que ce regard nous soit adressé, on se retourne pour voir qui derrière nous mérite cette attention.

Ainsi ce matin-là, il fait gris, il fait froid: c’est un lundi, quoi! Nous terminons d’entrer dans le bus qui est sur le point de partir. Un usager, à l’horizon, arrive en courant, en sens inverse. Il agite les bras, suppliant la conductrice de l’attendre.

Ce que fait cette dernière, qui était pourtant prête à entamer son décollage alors que l’homme était encore loin.

Étant un lundi, on aurait très bien pu imaginer qu’ayant à poursuivre son chemin, elle se serait dit que l’usager n’avait qu’à prendre le bus suivant. Et comme lors d’un lundi digne de ce nom, le pauvre monsieur aurait dû attendre le prochain passage dans la grisaille matinale. Mais ce n’est pas du tout ce que fait la dame au volant. Elle interrompt son mouvement, doucement, et patiente, le temps que l’homme arrive à bout de souffle. Elle ouvre la porte et l’invite à monter, lui précisant: «On va toujours ben pas vous abandonner là dans le froid!»

Tout heureux, l’homme la remercie, s’assoit en reprenant son souffle. Il oublie subitement son gruau au goût de roussi et le trou dans son bas. Et comme pour faire une entorse à la routine et à l’ordinaire, se dit que, comme un vendredi, ce soir, il ira au cinéma!

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