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Peut-on critiquer au Québec?

Photo: Archives Métro

La sortie du film Paul à Québec m’a inspiré cette réflexion cette semaine et j’aimerais la partager avec vous, afin de voir si c’est une impression que j’ai ou si une certaine complaisance règne dans notre univers culturel.

J’en glissais un mot sur les médias sociaux à un collègue chroniqueur en lui soulignant que je me méfie des films, des séries ou des livres qui ne reçoivent que des éloges. Paul à Québec, présenté en avant-première aux médias et à certaines personnalités, reçoit présentement ce traitement. Tout ce que l’on entend du film c’est que c’est beau, touchant, un grand film, etc.

Aucune nuance, aucune voix discordante.

Je n’ai pas vu ce film adapté de l’excellente bande dessinée de Michel Rabagliati, il m’est donc impossible d’en juger. Je peux par contre affirmer avec une certaine certitude qu’il n’est forcément pas un film parfait qui plaira à tout le monde.

Où sont, dans ce cas, les critiques plus nuancées?

Le même problème se pointe en télévision après les lancements festifs et les visionnements de presse organisés par les diffuseurs. Les critiques et les chroniqueurs reviennent au bureau sur un petit high et les défauts de notre télé n’aboutissent pas sur les pages.

Que du bon, de l’anecdotique et du complaisant.

Est-ce que c’est dangereux, au Québec, d’oser dénoncer un projet, un film, une émission avec une critique franche qui serait profondément négative?

Ce danger expliquerait peut-être pourquoi les critiques et les chroniqueurs sont plus des agents de promotions que des observateurs neutres de notre télé. Quelques exceptions existent, fort heureusement, mais elles finissent quand même par cultiver des conflits d’intérêts avec certains producteurs/diffuseurs/créateurs, limitant les critiques honnêtes.

Dans cette petite bulle limite consanguine, qui fait office de recteur?

Pour la politique et les affaires publiques, les journalistes chevronnés bousculent et font avancer les dossiers, changent les choses, exposent les incongruités. Dans nos médias culturels, c’est beaucoup trop rare, créant ainsi une situation où les imperfections perdurent et s’institutionnalisent.

À ma question « Peut-on critiquer au Québec? », je crois que la réponse est « Oui, mais … » et c’est très malheureux. On peut le faire, oui, mais on risque de se mettre des gens à dos, de limiter nos revenus, de réduire notre antenne de diffusion. On peut le faire, oui, mais on va se faire accuser de ne pas encourager notre production locale. On peut le faire, oui, mais on doit nuancer et trouver du positif à tout prix.

Rire des séries américaines, de la chaîne TLC et des blockbusters estivaux, ça oui, aucun problème. C’est bar open comment on dit. Mais réserver le même traitement à une production d’ici, c’est courir après le trouble.

C’est malheureux, parce que la critique est utile dans nos médias. Il faut s’offrir le luxe d’avoir autre chose que des papiers publicitaires et des entrevues de promotion. On ne le tolère pas dans les autres milieux, pourquoi faire exception avec notre culture?

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