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La bile dans la sébile des mendiants

Photo: Victor Char/Collaboration spéciale

Notre chroniqueur a fait parvenir cette chronique de Stockholm, en Suède.

«Sus aux mendiants étrangers!» Xénophobes jusqu’au bout des ongles, les démocrates de Suède (SD, extrême droite), réclament haut et fort l’expulsion des nécessi­teux venus d’ailleurs.

Pour la troisième formation politique du pays, il y a claire­ment deux populations distinctes de mendiants: ceux qui font la manche «à cause de leur statut de sans domicile fixe ou de leurs problèmes de dépendance à l’alcool et aux stupéfiants» et… ceux qui mendient «de manière professionnelle».

Comme par hasard, ces derniers sont tous «venus d’ailleurs». Ce sont surtout des Roms. Il y a donc les «bons» et les «mauvais» mendiants. Et les «méchants», qui vivraient sous la coupe de réseaux mafieux, doivent prendre leur baluchon et partir.

De manière générale, même si demander une pièce dans certains pays (France, Grande-Bretagne) est toléré ou encore pénalisé par une amende ou la prison (Hongrie, Espagne), la mendicité devient de plus en plus un crime en Europe. Surtout depuis l’entrée en 2005 de la Roumanie et de la Bulgarie dans l’Union européenne (EU).

Avec l’abolition des frontiè­res, les Roms de ces deux pays circulent librement dans l’UE et ceux qui vivent grâce à la générosité d’autrui prennent soin de choisir des villes riches. Stockholm, deux mil­lions d’habitants avec la banlieue, est désormais l’une de leurs destinations préférées.

Avant l’arrivée massive des Roms bulgares et roumains, véritables parias sur le Vieux Continent, la capitale suédoise comptait tout au plus un demi-millier de sans-abri, dont quelques-uns seulement faisaient l’aumône.

Ils ont aujourd’hui de la concurrence. Les Roms demandant l’obole sont «heureux» dans la plus grande ville scandinave: les nombreuses rues piétonnes sont un excellent «terrain de chasse». Mais peut-être pas pour longtemps si les démocrates de Suède, qui ont le vent en poupe dans les sondages, finissent par convaincre les autorités municipales de se «débarrasser» des mendiants étrangers.

«La police, rappelle Martin Schori, rédacteur en chef du quotidien Aftonbladet, a déjà expulsé des mendiants en faisant appel à un paragraphe dans la loi mentionnant que les étrangers doivent avoir un moyen « raisonnable » de subsistance pour rester au pays.»

Dans sa campagne contre les mendiants étrangers, le SD rappelle froidement ceci : moins de 10% des 20 G$ versés entre 2007 et 2013 par l’UE à la Roumanie et à la Bulgarie ont vraiment été consacrés à la promotion sociale de leurs Roms.

Peu importe le message, l’extrême droite suédoise «tire sur tout ce qui bouge» et elle se fait du capital politique en déversant sa bile dans la sébile des mendiants étrangers qui font de plus en plus sentir leur présence dans les rues de Stockholm.

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