Poutine le «complotiste»

Photo: Getty Images

Vladimir Poutine voit des complots partout. Des conspirations américaines bien sûr. Des coups montés pour isoler, humilier et détruire la Russie qu’il veut grande et forte. Le scandale de corruption à la Fédération internationale de football association (FIFA) ne fait pas exception.

Pour le maître du Kremlin, le hasard n’existe pas. Le 31 mars, 13 sénateurs démocrates et républicains demandaient à la FIFA de retirer à la Russie le Mondial 2018 en raison de sa politique ukrainienne.

Mercredi dernier, sept hauts dirigeants de la FIFA, fondée en 1904, étaient arrêtés à Zürich, la capitale financière suisse, au cours d’une enquête menée par le FBI pour corruption. La vraie surprise c’est qu’un tel coup de filet se soit produit. Cela faisait des années qu’un parfum de corruption flottait au-dessus des membres en complet-cravate de la FIFA.

Cela n’a pas empêché la réélection deux jours plus tard du très décrié Sepp Blatter à la tête de l’organisation qui se vante de parler au nom de 300 millions de footballeurs actifs dans le monde.

Se débarrasser du Suisse de 79 ans, c’est justement ce que voulaient les États-Unis, croit en substance Poutine: punir le grand patron de l’institution footbalistique depuis 1998 pour avoir accordé la coupe du monde à son pays. Poutine s’est beaucoup investi dans le dossier, comme il l’avait fait pour décrocher l’organisation des Jeux olympiques d’hiver à Sotchi en 2014.

C’est bien connu, les grandes kermesses sportives sont depuis longtemps la continuation de la guerre par d’autres moyens. Sur ce terrain, Washington et Moscou n’ont jamais cessé de s’affronter. Mikhaïl Gorbatchev, qui a donné un coup de pouce à l’autodestruction de l’URSS en 1991 –, «la plus grande catastrophe du siècle», selon Poutine –, croit à une «nouvelle guerre froide». Ce cri d’alarme lancé au début de l’année est plutôt exagéré. Il s’agit plutôt d’un bras de fer, avec comme toile de fond le conflit ukrainien qui a déjà fait plus de 6000 morts.

Les Américains accusent les Russes d’être en voie d’expansion en Europe, avec notamment l’annexion de la Crimée en 2014. Ces derniers affirment plutôt être en constant recul. Ils ont perdu leur zone d’influence, et Poutine n’apprécie guère.

Avec Sotchi l’an dernier et le Mondial dans deux ans, la Russie a au moins une plus grande visibilité grâce au sport, qui non seulement procure du rêve, mais qui occupe aussi une grande place dans l’espace public planétaire.

Voilà que les Américains qui souhaitaient accueillir le Mondial en 2018, cherchent à se venger de la FIFA. Leur entrée dans la mêlée la semaine dernière avec leurs accusations de corruption, c’est tout simplement de l’ingérence politique.

On le voit, Poutine est un «complotiste». C’est normal. Il est entré par conviction à 23 ans au KGB (le service de renseignement soviétique). Mais s’il voit des manigances partout, c’est surtout parce que la Russie est affaiblie sur tous les plans. Avec ou sans Poutine, les théories conspirationnistes ont encore de belles années devant elles au Kremlin.

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