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L’histoire dans la tête

La routine de dodo d’un enfant est toujours un rituel intéressant. Pour mon fils Johnny Trempe (cinq ans), après avoir lu une histoire «dans un livre», je lui raconte ce qu’il appelle une histoire «dans la tête». Les lumières sont alors fermées, les becs sont donnés; je m’assois dans le noir, au pied de son lit, et je lui raconte une histoire que «j’invente». Tous les contes de Perrault et des frères Grimm y sont passés, la plupart des histoires de superhéros dont je me souviens ont aussi eu leur soir, de même que les personnages des bandes dessinées de mon enfance, Johan et Pirlouit, Yakari, le Scrameustache, Ric Hochet, Yoko Tsuno, Tintin, les Schtroumpfs, etc.

Évidemment, l’univers de Star Wars est aussi en forte demande. Je lui ai conté tous les arcs principaux de chacun des films, je lui ai aussi inventé plein d’histoires de travers, comme la fois où Luke Skywalker est allé poser des collets dans la forêt avec les Ewoks, la fois où Darth Vader a dû laver son casque, mais ne trouvait pas son savon, des histoires sur l’enfance de Chewbacca (racontées en langue wookiee, mais doublées en français par le narrateur), etc.

Le problème, c’est que je suis vraiment écœuré de Star Wars. Je ne sais pas par quelle sorcellerie ces histoires et ces personnages arrivent à créer autant de dépendance chez un enfant, mais Johnny en redemande et en redemande encore! En fin de semaine dernière, j’ai pris les grands moyens et j’ai commencé à lui raconter les aventures du département de comptabilité de l’Étoile de la Mort. On parle ici des budgets, des projections de dépenses, de la facturation des principaux fournisseurs, toutes des choses assez passionnantes, merci. Je prends mon ton le plus monotone et je brosse le portrait d’un département administratif d’un ennui mortel où rien ne se passe : pas de combats au sabre-laser, pas d’amour naissant, pas d’extraterrestres musiciens; juste des bilans, des états financiers et des acomptes provisionnels.

Tu sais pas quoi? Johnny en redemande! Ça fait six soirs qu’il me réclame les aventures des comptables spatiaux, crimebine. Pourquoi tripe-t-il autant sur ces idiotes aventures de bureau? Peut-être que je suis simplement un excellent conteur? Ou peut-être qu’il aime juste ça quand je passe du temps avec lui et que, peu importe les âneries que je profère, il me suit par amour? Ou peut-être qu’il a juste une insatiable soif de savoir?

Quoi qu’il en soit, je me suis fait prendre à mon propre jeu : depuis une semaine, quand c’est à mon tour d’être étendu dans mon lit pour y trouver le sommeil du juste, je n’arrête pas de penser aux défis financiers qui attendent le département de comptabilité de cette base spatiale. Peux-tu croire que je fais de l’insomnie en pensant à tous les problèmes, notamment les problèmes d’approvisionnement, d’une base militaire fictive!

Grrrlllrm.

Maintenant, l’histoire est vraiment dans MA tête.

@PenseCroche

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