À vouloir se fondre dans le décor, on disparaît
Je pensais m’y habituer en les croisant quotidiennement dans le paysage urbain. Je les ai essayés à maintes reprises en espérant changer d’avis. Mais non, je suis toujours terriblement déçu des nouveaux abribus de la STM.
On nous les vantait pourtant comme étant une «grande première mondiale dans le domaine du mobilier urbain». Des abribus 2.0 qui devaient «enrichir l’expérience des clients de la STM». Mais qu’en est-il réellement après plusieurs mois d’utilisation?
En réalité, on nous balance un système superficiel de reconnaissance gestuelle qui nous offre des publicités, la météo et une carte de la ville… à l’heure des téléphones intelligents! Et comme le mentionnait récemment mon collègue Mathias Marchal sur notre site web, cette technologie enferme un système de ventilation (refroidissant l’ordinateur intégré à l’abribus) qui produit une couche de bruit supplémentaire dans la cacophonie urbaine. Avait-on réellement besoin ça?
Et que dire de l’apparence générale de ces petites cabines qui sont issues, rappelons-le, d’un concours de design? Normalement, une compétition de ce type aurait dû favoriser l’émergence de formes novatrices, voire distinctives, en confrontant divers designers québécois. Or, ce n’est pas du tout le cas. Cette nouvelle mouture d’abribus s’apparente [ironiquement] à tout ce qui se fait déjà ailleurs dans le monde, et ce, sans concours de design.
En 2010, lors du dévoilement des lauréats (Leblanc + Turcotte + Spooner), le jury disait avoir été séduit par «l’heureux dosage d’efficacité et de discrétion» du concept proposé. Eh bien, pour être discrets ces abribus, ils le sont! La sobriété est tellement au rendez-vous qu’ils s’amalgament parfaitement avec la banalité de notre paysage urbain. On avait pourtant la chance de s’offrir une identité visuelle forte, une signature unique pour notre réseau de transport. Dommage.
Un bon design aurait également dû bonifier concrètement l’espace public en rendant service aux Montréalais qui attendent patiemment, en rang d’oignons, leur autobus. Aurait-on pu ne serait-ce qu’allonger de 2 ou 3 mètres la plupart des cabines pour permettre à davantage d’usagers de se protéger des intempéries? C’est à peine si cinq ou six personnes peuvent y pénétrer, alors qu’il y a fréquemment de longues files d’attente aux heures de pointe sur le coin de nos rues.
Et tant qu’à y avoir inclus «une technologie de pointe» pour y faire défiler de la pub sur un écran géant, pourquoi ne pas y avoir intégré des fonctions utiles au quotidien comme des bornes de recharge pour nos cartes OPUS? Une source électrique reliée à un panneau solaire pour recharger nos appareils électroniques? Des guichets pour acheter des billets de spectacles afin d’encourager notre culture locale? Des toitures vertes pour améliorer notre qualité de l’air?
Je rêve en couleurs, vous dites? Ces idées ont pourtant déjà été implantées ailleurs dans le monde. Je n’ai rien inventé.