Less is more

Photo: ACDF

J’ose faire une petite confidence: je suis un peu découragé, pour ne pas dire choqué, par plusieurs projets de gratte-ciel qui sortent des tables à dessin aux quatre coins de la province.

À Gatineau, ce sont les tours de la Place des Peuples. À Québec, le Phare. À Montréal, je pourrais parler de l’Icône. Je suis découragé par leur architecture tape-à-l’œil, pour ne pas dire grotesque, qui est vantée comme un symbole de «modernité» visant à revitaliser le tissu urbain.

Et pourtant. On se retrouve devant des projets fortement critiqués par la communauté architecturale [bien que plusieurs architectes n’osent pas se prononcer publiquement] étant donné leur forme discutable et leur intégration déficiente au voisinage. Leurs promoteurs prétendent vouloir créer de nouvelles icônes architecturales, alors qu’ils présentent des réalisations aussi raffinées qu’un adolescent qui «pimpe» sa voiture avec des néons bleus et des mags chromés dans un effort désespéré pour attirer les regards.
Fort heureusement, d’autres projets plus distingués réussissent à me réconcilier avec l’univers des gratte-ciel. Le plus récent en lice : les tours [pour le moment anonymes] du promoteur Bachar Ghreiwati, signées par le cabinet d’architecture montréalais ACDF. Les images de cet ambitieux développement, évalué à plus de 100 M$, ont été dévoilées la semaine dernière sans trop faire de bruit.

Ce projet métamorphosera complètement l’ouest du Centre Bell et les abords de la station de métro Lucien-L’Allier grâce à deux tours résidentielles dont la facture architecturale sera différente, mais qui seront cohérentes sur le plan des matériaux. Les tours seront reliées à leur base par une galerie marchande qui intégrera les façades d’un ancien bâtiment industriel à valeur patrimoniale autrefois occupé par Bell Canada.

Certes, le projet est sobre. Très sobre. Il aurait peut-être même pu mériter un petit brin de folie supplémentaire. Reste que sa simplicité se distinguera avec goût des autres gratte-ciel ceinturant le Centre Bell par la fragmentation de ses volumes et ses façades géométriques.

«Pas besoin d’être flamboyant, sculptural, avec porte-à-faux exceptionnel pour se faire remarquer, m’indique l’architecte du projet, Maxime-Alexis Frappier. Pour nous, ce qui fait qu’une tour devient une présence dans la ville, qu’elle capte le regard, c’est avec le contraste des matériaux.»

Suivant cette philosophie, l’architecte a réussi à donner une personnalité à ses tours en jouant avec les teintes des matériaux, leurs formes et la porosité des façades. Les coups de crayon sont clairs, précis, presque chirurgicaux. Pas de fla-fla ou de courbes aléatoires, et pas de mélange de 14 types de matériaux pour offrir un soi-disant «dynamisme» à l’architecture.

Le projet ne deviendra peut-être pas une nouvelle carte postale pour Montréal, mais il risque fort de passer le test le plus ardu pour un architecte : celui du temps. Il n’y a rien de plus désagréable en architecture qu’un édifice qui vieillit mal.

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