REM: Et le design dans tout ça ?

Photo: CDPQ Infra

La lune de miel entre les Québécois et le projet de train électrique de la Caisse de dépôt et placement du Québec, alias le REM, aura finalement été de courte durée.

Lors de son dévoilement, en avril, on ne comptait plus les intervenants qui se voyaient enchantés par ce projet, du maire de Montréal jusqu’à l’organisme Équiterre. Certains ont même osé parler de «révolution» pour le transport métropolitain.

Mais plus le temps passe, plus les questionnements se multiplient à propos de ce mégaprojet de 5,5 G$. A-t-on sous-estimé son coût et les effets de sa réalisation? En effet, on devra reconstruire la ligne de train Deux-Montagnes pour l’ajuster aux paramètres du REM. Le tracé est-il optimal compte tenu du fait qu’il n’ajoutera que 12 douze stations au réseau? Les transferts de passagers entre le train électrique et le reste du réseau de transport, dont le métro de Montréal, se feront-ils efficacement et faciliteront-ils la vie des usagers?

Et qu’en est-il de l’intégration de ce système sur rail au paysage urbain? Le sujet a été peu évoqué jusqu’à présent. Et pourtant, les imposantes infrastructures que nécessitera le REM auront des répercussions majeures sur l’environnement bâti du Grand Montréal. Je pense aux gares, aux rails surélevés, aux tunnels piétonniers et aux passerelles aériennes qui chevaucheront le réseau routier. Les premières images, dévoilées par la Caisse de dépôt, ne sont guère rassurantes à ce sujet. Disons simplement que la qualité architecturale ne saute pas aux yeux.

Il faut évidemment laisser la chance au coureur, me direz-vous. Je suis d’accord. Il reste que j’ai bien hâte de voir quelle philosophie on adoptera pour la construction du REM. Reléguera-t-on la qualité architecturale au second plan, derrière les critères de construction et la rapidité d’exécution, comme l’a tristement fait l’AMT pour les infrastructures du train de l’Est?

Du côté de la Caisse de dépôt, on tente de se faire rassurant. «On est très sensible à ce que ce soit une réussite sur le plan architectural, m’a expliqué Jean-Marc Arbaud, responsable de la gestion, des opérations et de la construction du REM. Il y aura de nombreux lignes directrices architecturales à respecter [dans les appels d’offres].»

Mentionnant au passage que le concours d’architecture n’est pas une option compte tenu des délais extrêmement serrés, M. Arbaud a poursuivi : «On hésite encore entre deux choses : donner une image architecturale à l’ensemble de la ligne ou un traitement unique entre les différentes zones [à l’instar du métro de Montréal].»

carte_stations4_low3

Le concours d’architecture n’est pas une option compte tenu des délais extrêmement serrés. Photo: CDPQ Infra

Quand je lui ai demandé si 1 % du budget sera consacré à la création d’œuvres d’art (c’est la norme pour bonifier les projets publics relevant du gouvernement québécois, mais elle ne s’applique pas au REM), il a enchaîné avec ceci : «On n’a pas encore pris de décision, mais je considère que la notion d’art public aide énormément l’exploitation des systèmes dans la mesure où cela permet aux utilisateurs de développer un sentiment d’appartenance à leur milieu. C’est une valeur ajoutée. J’ai mis en œuvre [dans le passé, notamment sur la Canada Line, à Vancouver] des programmes d’art public qui sont renouvelables. […] Je préfère les systèmes où il y a beaucoup plus d’œuvres qui passent plutôt qu’une œuvre qui reste là. Parfois, au bout de 30 ans, elle n’a plus de sens.»

Malgré cette brève conversation avec M. Arbaud, je reste un tantinet nerveux. L’échéancier de la première phase, qui doit être complétée d’ici décembre 2020, semble carrément guider le projet, à un point tel qu’on ira jusqu’à réduire de 15 jours le processus d’évaluation du Bureau d’audiences publiques sur l’environnement afin d’aider la Caisse à respecter son calendrier très (voire peut-être trop?) ambitieux.

Qu’est-ce qui empêchera alors de couper dans ce qui est, malheureusement, trop souvent considéré comme du luxe au Québec : une architecture de qualité?

Mon
Métro

Découvrez nos infolettres !

Le meilleur moyen de rester brancher sur les nouvelles de Montréal et votre quartier.