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Tannée d’être instrumentalisée

 Vous êtes peut-être tannés de m’entendre ressasser toujours le même discours au sujet de l’instrumentalisation de la cause LGBT à des fins partisanes ou pour justifier l’intolérance envers les autres minorités, et vous avez raison de l’être. Depuis le début du débat sur la charte des valeurs du PQ, j’ai écrit sur le sujet au moins 16 fois. C’est beaucoup.

J’ai écrit que l’homophobie, c’était pas une question de code vestimentaire ici. J’ai écrit ici que les homosexuels ne devraient plus craindre que le personnel d’un hôpital les discrimine parce que c’est inscrit dans la loi. J’ai fait un parallèle entre la discrimination dont sont victimes les homosexuels et les minorités religieuses ici. J’ai vraiment commencé à comprendre qu’on instrumentaliserait le combat LGBT pour justifier l’intolérance cette fois-là. J’ai rassuré les gens qui ont cru qu’être contre la charte, c’était être en faveur d’un discours contre la communauté LGBT ici. J’ai expliqué que selon-moi, le meilleur moyen de protéger nos droits en tant que minorités sexuelles était de protéger les droits de toutes les minorités. J’ai publié cette lettre anonyme au sujet de l’homonationalisme, puis je me suis excusée envers André Gagnon, parce que c’est vrai que c’était malhonnête de diffuser les propos d’une personne ne pouvant s’identifier à l’encontre d’une personne dument nommée, puis, je lui ai donné l’occasion de répliquer. J’ai expliqué un peu le malaise du président du conseil québécois LGBT de prendre position sur le sujet. J’ai parlé de comment il était facile d’alimenter la peur de l’Autre en faisant un parallèle avec le fait qu’on soit en train de faire passer les besoins des familles homoparentales pour des accommodements déraisonnables. J’ai dressé une liste d’autres menaces à la laïcité de l’État (et à la communauté LGBT) qui ne sont pas prises en considération par la charte des valeurs ici. J’ai rappelé que la défense des droits des homosexuels n’était pas exclusivement une valeur québécoise. J’ai encore dit qu’on se pétait les bretelles d’être si ouverts envers l’homosexualité alors qu’en fait, c’est encore difficile de faire son coming out en 2014. J’ai trouvé un point positif à la charte : il n’y a jamais eu autant de gens se déclarant féministes et alliés des gais et lesbiennes. J’ai aussi collaboré à ce texte de Québec inclusif au sujet de la posture intersectionnelle (qui tient compte des différentes sources d’oppression de façon à ce que la défense d’un groupe ne se face pas aux dépens d’un autre) de certains membres de la communauté LGBT. Si vous me suivez sur Twitter ou Facebook, vous avez subi d’autres commentaires de ma part encore sur l’instrumentalisation de la cause LGBT, mais aussi de la cause féministe, dans le cadre du débat sur la charte des valeurs.

Je vous comprends donc d’être vraiment tannés de me lire à ce sujet. Mais mettez-vous un instant à ma place : imaginez comment j’en ai moi-même ma claque d’écrire là-dessus. Si je le fais, ce n’est pour écoeurer personne (j’en serais la première victime). Non, je continue à écrire à ce sujet simplement parce qu’on continue d’instrumentaliser la cause LGBT comme s’il s’agissait d’un argument en faveur de la charte, sachant qu’une bonne partie de la communauté LGBT est très mal à l’aise avec cette position.  S’il est vrai que des membres de la communauté LGBT appuient la charte croyant qu’elle protègera leurs droits contre les abus de la religion, d’autres considèrent que cette position défend les intérêts d’une minorité sexuelle aux dépens d’autres minorités sans se rendre compte que cette défense pourrait se retourner contre les membres de la communauté LGBT à tout moment. Bref, la communauté est divisée. Mais on continue d’utiliser les droits des LGBT comme argument d’intolérance ou de supériorité.

Encore en fin de semaine, la ministre péquiste Agnès Maltais donnait son appui à un texte défendant une position  controversée dans la communauté LGBT. Tandis que Mario Roy de La Presse s’emparait de la cause LGBT pour dénoncer la liberté de religion, y allant d’un raccourci intellectuel douteux : «… plusieurs États américains envisagent de légiférer pour protéger la « liberté de religion ». C’est-à-dire le droit de discriminer». En tant que personne engagée personnellement envers la cause LGBT, je conviens que la liberté de religion ne doive pas conduire à la discrimination. Entre ça et écrire que «liberté de religion = droit de discriminer», il y a toute la palette de nuances requises pour ne pas faire de ce débat une simple bouillie démagogique.

 

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