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Avoir la population derrière soi

Philippe Couillard ira de l’avant avec son projet de loi sur les régimes de retraites. En fin de semaine, il a affirmé avoir l’appui d’«une grande partie de la population» pour le faire. Avoir l’appui d’une majorité de la population pour faire adopter un projet de loi qui en pénalisera une minorité, ce n’est pas un argument, c’est simplement une triste évidence.

Que cela soit juste ou non, si vous demandez à la population de choisir entre payer plus d’impôts ou sabrer dans les régimes de retraites des employés municipaux – que vous aurez pris le temps de dépeindre comme de grands privilégiés aux conditions de travail bien grasses –, il y a de fortes chances qu’une majorité optera pour pénaliser la centaine de milliers de travailleurs que le projet de loi toucherait.

Les employés municipaux sont en train de perdre la guerre de l’opinion publique. C’est cette grande vérité, que monsieur Couillard érige aujourd’hui en argument. On ne les connaît pas car ils sont peu nombreux, on les craint lorsqu’ils portent l’uniforme de police (si on a manifesté durant l’été 2012, on les déteste tous sans discrimination), on est frus contre eux lorsque notre autobus arrive en retard – la majeure partie du temps sans que ce ne soit de leur faute – et on nous les présente le plus souvent comme des bébés gâtés à l’attitude cowboy.

Même leurs moyens de pression n’arrivent qu’à rendre la population hostile à leur cause. Quand ils apposent des autocollants sur leurs véhicules pour emmener les gens à comprendre «qu’ils n’ont rien volé (eux)», on les traite de vandales1. Quand ils portent des pantalons d’armée, on les accuse de menacer l’ordre public en corrompant l’uniforme de la police. Faut-il rappeler que ces employés qui offrent un service essentiel sont limités dans leurs moyens de pression et que, des autocollants, ça s’enlève et c’est plutôt soft, comme façon de dire qu’on n’est pas contents?

Alors Philippe Couillard, ayant une grande partie de la population derrière lui – comme si c’était quelque chose de difficile à acquérir dans les circonstances – est confiant qu’il pourra trahir des engagements pris envers ces travailleurs, des engagements qui avaient déjà fait l’objet de négociations par le passé, qui étaient déjà le fruit de compromis, sans que la population ne s’en émeuve. C’est pas un argument, ça, c’est simplement de l’arrogance.

1. Un sous-traitant mandaté pour retirer les autocollants s’est plaint d’avoir été victime d’intimidation, ce qui est aussi inacceptable qu’attendu, de la part des membres d’un syndicat en colère. En amont du phénomène, peut-on remettre en question la décision de nettoyer les voitures de service alors que le conflit est toujours en cours ? Quelle mauvaise allocation de ressources, sachant que les employés insatisfaits continueront de tapisser leurs voitures fraîchement nettoyées de leurs revendications le lendemain même.

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