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Artistes ou vidangeurs

«Pickup artists and garbage men should switch names». La phrase, que l’on pourrait traduire par «pros de la drague et éboueurs devraient échanger leurs noms», circule en ce moment sur les réseaux sociaux. Bien qu’elle compare maladroitement les femmes victimes de techniques de drague douteuses à des ordures, elle résume le peu d’attention que l’on devrait accorder à ceux qui disent se spécialiser dans l’«art» de conquérir les femmes, ces hommes qui s’autoproclament «pickup artists».

Quand ce phénomène est apparu au milieu des années 2000, avec la publication de livres comme The Game et la prolifération dans les médias de ces gars à l’égo gonflé à bloc, comme Marc Boilard au Québec, je me disais qu’il fallait bien être un loser fini pour assister à ces conférences où on vous enseignait l’ABC de la séduction. Qui a un besoin si prenant d’avoir une relation sexuelle qu’il est prêt à se rendre à une réunion où des dizaines de vieux garçons démunis, pas trop choyés par la nature ou simplement insécures, se font expliquer par un Casanova mégalomane des trucs bidons pour «ramasser» une fille? Être à la conférence, en soit, n’explique-t-il pas la raison d’être à la conférence? Qui croit vraiment que les femmes obéissent à des recettes simples? Surtout, qui pense pouvoir se sentir grand en réduisant dans son esprit le concept de femme à «quelqu’un que l’on doit convaincre d’avoir une relation sexuelle»?

C’est probablement pourquoi le métier de conférencier séducteur, comme les pantalons en vinyle, a si mal passé le cap des années 10. En 2014, ce sont plutôt ceux qui se définissent comme pros de la drague qu’il est de bon ton de considérer comme des losers finis. C’est pourquoi je ne me suis pas offusquée outre mesure lorsque j’ai appris l’existence de Julien Blanc. Le phénomène semble être conçu pour attirer l’attention en suscitant l’émoi. Dans une vidéo, l’homme explique non seulement à ses adeptes comment draguer, mais aussi comment tirer profit des différences culturelles qui font qu’à Tokyo, selon ses dires, un homme blanc n’a qu’à prononcer le mot «pikachu» pour avoir une relation sexuelle avec une femme.

[youtube https://www.youtube.com/watch?v=grV1iDns87s]

Il n’y a qu’un mot pour décrire le genre de gars qu’est Julien Blanc, et ce mot n’a pas plus d’équivalent francophone que le concept n’a la cote auprès des femmes: douchebag.

Si Julien Blanc prétend que sa technique – aussi raciste que sexiste – fonctionne, elle n’en fait pas moins de lui une véritable ordure, et de ses adeptes de véritables crétins. Pour de vrai, un gars qui agit de la sorte dans un bar a plus de chance de se retrouver avec une mornifle sur la gueule et/ou encerclé par un groupe de filles qui rient de lui en le traitant de débile profond.

En réaction à l’abjecte personnage, le mot-clic #KeepJulienBlancOutofCanada est apparu sur les réseaux sociaux pour empêcher l’individu de proférer ses idées dans une série de conférences prévues à Montréal, Toronto, Calgary et Vancouver. Personnellement, j’aurais plutôt envie de dédier un mot-clic à ceux qui comptent se rendre à ces conférences. J’hésite encore #DouchebagEnFormation ou #MachoDésespéré. Et pour la version anglaise, simplement #biggestloser.

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