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Pff! Facile, être féministe!

Hier, à la suite du fabuleux discours de Patricia Arquette durant la cérémonie des Oscars, un collègue affirmait sur Twitter que parler de féminisme permettait d’attirer la sympathie du public. Le collègue présentait la chose comme un «fait», et, malgré les doutes évoqués par plusieurs, n’a jamais affiché l’ombre d’une remise en question quant à son affirmation.

Pourtant…

Non seulement les féministes sont les cibles préférées du web, les femmes en général, qu’elles soient féministes ou non, sont davantage victimes de harcèlement que leurs collègues masculins lorsqu’elles s’expriment sur le web, et pas dans de petits pourcentages. Menaces de viol et autres commentaires dégradants et réducteurs font partie de la réalité des femmes qui s’expriment sur le web.

Mais bon, parlons de Hollywood, puisque c’est de Hollywood dont il était question. J’avoue qu’à en juger par la réaction de Meryl Streep et de J-Lo, de même qu’à lire les tweets de mes amis, hier, le commentaire de Patricia Arquette semblait faire l’unanimité.

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Mais le «public» n’est ni la gang de brillantes personnes que l’on suit sur Twitter, ni Meryl et Jennifer.

Des tas de morons (sans distinction de sexe) ont tenté d’invalider la prise de parole de l’actrice de Boyhood.

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Bon, c’est sûr qu’il y aura toujours des morons sur Internet. Et des commentateurs de Fox News. La collaboratrice Stacey Dash s’est dite «consternée» par le discours de Patricia Arquette, arguant que le Equal Pay Act avait pourtant été voté en 1963.

Pourtant, le discours de Patricia Arquette, réduisant les femmes à leur rôle de mère et les citoyens à des contribuables, était plutôt conservateur. La demande – que les femmes gagnent autant que les hommes alors que ce n’est pas le cas plus de 40 ans après le Equal Pay Act – n’était pas extravagante. La requête devait avoir une résonance particulière à Hollywood cette année alors qu’on apprenait grâce aux fuites de Sony que des actrices étaient payées moins que leurs collègues masculins.

Mais ce n’est pas étonnant que le discours féministe n’attire pas seulement que de la sympathie. Quand Emma Watson a invité les hommes à se joindre à la cause des femmes, la réponse a été immédiate : des pirates informatique ont menacé l’actrice d’être la «prochaine», quelques jours après que des photos intimes d’actrices aient été piratées. Le fait qu’il s’agisse finalement d’une campagne marketing visant à faire fermer le site 4Chan ne fait que renforcer l’idée selon laquelle le discours des femmes peut être utilisé à n’importe quel escient.

Tout ça, c’est sans compter l’effet difficilement quantifiable que peuvent avoir ces prises de positions sur l’embauche, dans un milieu encore majoritairement masculin, blanc et grisonnant.

Les principales critiques, toutefois, proviennent peut-être des féministes elles-mêmes, qui trouveront les discours féministes portés par des vedettes populaires tantôt trop soft, tantôt pas assez inclusif, tantôt un peu dans le champ.

Aborder des enjeux féministes, aussi souhaitable cela soit-il, n’est pas simple. Alors non, je ne croirais pas que se dire féministe est un moyen de s’attirer la sympathie du public. On ne s’affiche généralement pas féministe pour se faire des amis. Le simple fait de réduire cette prise de position à une façon de s’attirer la sympathie démontre que les discours féministes n’attirent pas que de la sympathie, mais aussi beaucoup de mépris.

Soulever des enjeux sociaux est généralement perçu comme rabat-joie, surtout lorsque cela survient au milieu d’une cérémonie célébrant la superbe des personnes qui sont parmi les plus privilégiées de nos sociétés. Pour toutes ces raisons, nous devons saluer, sans se priver de les critiquer au besoin, les prises de paroles de cette soirée des Oscars en faveur de la différence, de l’égalité entre les sexes, et celle qui nous a rappelé que l’injustice raciale est, malheureusement, encore d’actualité.

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