Le beau geste de François Legault

La campagne électorale a permis à François Legault d’incarner le changement aux yeux d’une partie grandissante de l’électorat. Le chef de la Coalition avenir Québec a néanmoins raté au moins deux occasions de faire de la politique autrement.

La première a trait au débat national. Interrogé sur sa réponse à une hypothétique question référendaire, l’exsouverainiste «pressé» qu’était M. Legault s’est découvert une nouvelle ferveur fédéraliste en affirmant qu’il voterait non si l’occasion devait se présenter.

C’était inutile. L’ancien ministre péquiste avait déjà promis qu’un gouvernement dirigé par la CAQ ne tiendrait pas de référendum. La tentation de rassurer les fédéralistes indéfectibles, particulièrement les anglophones et les allophones qu’il cherche à convaincre de délaisser les libéraux, est compréhensible. Mais en prenant le chemin le plus court, François Legault a laissé passer une chance de mettre fin une fois pour toutes à la perpétuelle chasse aux sorcières indépendantistes.

Le chef de la CAQ aurait dû répéter ce qu’il a dit lors de la fondation de son mouvement politique, à savoir qu’il proposait une trêve référendaire de 10 ans. Il aurait pu ajouter que cette trêve n’obligeait d’aucune façon ceux qui se joindront à la CAQ ou qui l’appuieront à renoncer à leurs convictions politiques profondes. Que, prenant acte des résultats du référendum de 1995, un souverainiste comme lui pouvait légitimement prétendre participer à l’amélioration du Québec, comme province, à l’intérieur du pays auquel il est toujours partie. Un autre beau risque, quoi.

François Legault a encore une chance de s’élever au-dessus de la mêlée en cette fin de course. La CAQ – tout comme le PQ – propose plusieurs changements à nos moeurs politiques dans son programme, dont des élections à date fixe et une réforme du financement des partis politiques. Elle devrait aller plus loin.

Derrière les manifestations du printemps dernier, il y avait aussi cette impression que les dés sont pipés, et qu’une partie de la population n’arrivera jamais à faire entendre sa voix dans le système actuel. Québec solidaire, Option nationale et le Parti vert obtiennent ensemble autour de 12 % des appuis, ce qui devrait normalement leur donner une quinzaine de sièges le soir du 4 septembre. Ce sera une bonne nouvelle s’ils en ont trois. Même pour la CAQ, le nombre de voix n’est pas garant du nombre de sièges qu’ils récolteront. Parlez-en aux anciens députés de l’ADQ…

François Legault répète à qui veut l’entendre qu’il veut faire de la politique différemment des «vieux partis». Plutôt que de jouer au matamore en évoquant à l’avance la défaite d’un gouvernement minoritaire qui n’est pas encore formé, le chef de la CAQ pourrait s’engager formellement à instaurer une forme de proportionnelle.

La politique québécoise pourrait ensuite entrer dans la modernité, et être menée par des gouvernements minoritaires ou des coalitions. Cela donnerait lieu à des mesures plus consensuelles, moins partisanes, et plus aptes à survivre aux changements de gouvernements.

Une telle proposition est peut-être trop difficile à avaler pour nos politiciens, habitués à rêver à une majorité qui leur permettrait d’avoir les deux mains sur le volant. Il faut pourtant voir plus loin que le prochain mandat. L’État n’appartient pas à un seul parti.

Alors M. Legault, après le beau risque, le beau geste?

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