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L’opinion des artistes

Louis-Jean Cormier est le grand favori des Galas de l'ADISQ cette année avec 9 nominations. Photo: Archives Métro

L’événement artistique du week-end n’avait absolument pas rapport avec les arts. Ou si peu. Je parle bien entendu de l’«affaire Louis-Jean Cormier».

Dans La Presse+ de samedi, Louis-Jean Cormier s’est prêté au jeu de l’entrevue «Pour ou contre». Le genre d’entrevue express où on demande à des personnalités de se prononcer spontanément sur des sujets d’actualité. Il arrive que ça donne des résultats plutôt intéressants. Et en plus, ça se lit vite. Aussi vite que les réponses tombent, je présume.

Ç’a été ça, le problème de Louis-Jean Cormier en fin de semaine. Il a répondu trop vite à une question en apparence toute simple mais qui, dans les faits, est loin d’être réglée. À savoir la parité hommes-femmes dans les programmations des grands festivals. Il a ajouté une dose de mononc-isme consommé sur la sous-compétence présumée des techniciennes de scène. Ouille… Vous savez, le genre d’affaire qu’on voudrait ravaler après y avoir réfléchi cinq secondes. En plein le genre d’énormité sans maudit bon sens qui nous fait grimper dans les rideaux quand on l’entend de la bouche d’un autre. Eh bien parfois, la bouche en question, c’est la nôtre. Et on a l’air fou. Très. Les artistes ont beau être des gens d’exception, il leur arrive à eux aussi de se mettre le pied dans la gueule jusqu’au trognon.

On les aime, nos artistes. On les tartine partout et eux-mêmes sont généralement flattés de se voir accorder tant d’attention. On les interroge de plus en plus souvent sur des aspects autres que leur art. Faut bien meubler le temps, n’est-ce pas. On leur demande leur avis sur ceci et sur cela, sur ce qu’on doit et sur ce qu’on ne doit pas, en plus de tout le reste. Y en a même qui nous donnent leur avis alors qu’on ne leur a rien demandé. Ceux-là tweetent et retweetent toute la journée, incapables de se tenir en marge du moindre débat. Le règne de l’artiste-citoyen n’est pas à la veille de s’estomper.

Or, il ne faut jamais perdre de vue qu’un artiste, aussi exceptionnel soit-il, demeure un être humain qui respire, qui bouge, qui fait pipi. Et qui est forcément, lui aussi, capable de dire des niaiseries. Dans le cas qui nous occupe ici, Louis-Jean Cormier a laissé glisser, sans trop y penser, deux belles niaiseries. Qu’il a d’ailleurs rapidement reconnues et pour lesquelles il s’est prestement excusé. En passant, sa reprise était parfaite: rapide, sans équivoque et manifestement sincère. Faute de pouvoir effacer les mots dits, il a au moins pu nuancer sa pensée. Au point même où il a fini par contredire son propos initial. Ça arrive, quand on s’impose un moment de réflexion. Ah! la réflexion, cette grande absente au royaume de l’instantané!

Attention : je ne dis pas que les artistes n’ont pas le droit de donner leur avis, bien au contraire. C’est juste qu’à force de se faire sans cesse passer le micro sous le nez pour un oui ou pour un non, fatalement, le risque de se gourer en disant n’importe quoi est multiplié par 10. Avec le résultat qu’on connaît.

L’opinion, c’est comme l’inspiration. C’est toujours préférable de la laisser venir plutôt que de la forcer.

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«Elle est où, la madame?» C’est la question qu’on posait inlassablement aux membres de la famille Wilensky, propriétaire du légendaire snack-bar situé au coin des rues Clark et Fairmount, dans le Mile End. Ben la madame est décédée vendredi. À l’âge de 98 ans.

Au fil des ans, Mme Wilensky a servi des milliers de sandwichs salami-baloney-moutarde à ses clients, nouveaux et vétérans. Pas forcément la plus souriante des dames, mais toujours bien mise et d’une indiscutable efficacité, elle avait toute une présence. C’est un morceau important de l’île de Montréal qui vient de se détacher.

On salue «la madame» avec les honneurs qui lui sont dus. Et c’est promis, on ne commandera jamais plus un sandwich sans moutarde : tout le monde sait maintenant que ça ne se peut pas…

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Oh qu’on devrait donc s’attarder à la nomination de l’inénarrable Doug Ford à la chefferie du Parti conservateur ontarien. Après son illustre frère Rob (de triste mémoire), un autre bum de bonne famille (!) vient d’atteindre un poste de commande. Malgré tout ce qui est sorti sur le bonhomme, malgré tous les témoignages accablants, malgré toute la croûte de schnoutte à son sujet, il a gagné. Ça dépasse tout entendement.

Le jour n’est pas loin où on ne sera même plus obligé d’observer le pays d’en-bas pour regarder un film d’horreur. Un jour, peut-être pas très éloigné, notre voisin ontarien sera un autre sinistre bouffon.

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