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La gomme à effacer de Stephen

Saviez-vous qu’un prix Thérèse-Casgrain du bénévolat était remis depuis 1982? À moins de vous adonner à l’altruisme de haut niveau, vous n’étiez probablement pas au courant vous non plus. Conséquemment, vous ne saviez donc pas plus que moi que ce prix avait été retiré du tableau il y a quelques années par le gouvernement conservateur et qu’on l’avait remplacé depuis par le Prix du premier ministre pour le bénévolat. Pas grave, dirons-nous, en gros, c’est l’équivalent de changer 4 trente sous pour 1 piasse. Mais alors…

Pourquoi avoir fait disparaître le nom de l’illustre Thérèse Casgrain du portrait? Parce qu’elle avait lutté toute sa vie pour le traitement équitable des femmes dans notre société? Parce que, malgré ses origines bourgeoises, elle avait milité pour la CCF, un parti socialiste ancêtre du NPD? Et s’il fallait que ce soit parce qu’elle fut nommée au Sénat par un gouvernement libéral?

Ce que l’on sait – et ça n’a rien de neuf – c’est que les gouvernements dirigés par Stephen Harper n’hésitent jamais à revenir sur le passé pour façonner l’avenir comme si tout ce qui était arrivé avant avait été une erreur. Il s’agit là d’une bien sale manie qui a le don d’écœurer le peuple. Tout y passe. La remise en question récurrente de la loi sur l’avortement, les mesures de moins en moins accommodantes pour les bénéficiaires de l’assurance-emploi… Et là, faut-il s’en étonner, c’est la réappropriation d’un prix humanitaire que l’on enlève à Thérèse pour le donner à Stephen. Une décision digne d’un empereur régnant de son plein droit sur une république de bananes. Et qui n’est pas sans rappeler également toute la subtilité de Staline qui avait fait disparaître le visage de Trotski sur les photos «délicatement» retouchées de la révolution russe. Ou encore les pharaons de l’Égypte antique qui faisaient effacer les noms de leurs prédécesseurs sur les murs des temples pour que l’on oublie à jamais leur passage sur terre. Pathétiques jusqu’à la moelle…

Sauf que Staline et les pharaons, eux, on ne les a jamais élus…

* * *

Étiez-vous au spectacle de RBO l’autre soir sur la place des Festivals? Non? Fallait être là comme ils disent. Assez impressionnant, merci.

Le commentaire le plus souvent entendu depuis l’événement : c’est ben de valeur mais de l’humour comme ça, on ne pourrait plus en faire aujourd’hui…

Et pourquoi donc? Avec le nombre incalculable de nouvelles plates-formes sur lesquelles il serait possible de se faire voir et entendre, il me semble que oui, un nouveau groupe pourrait aisément poursuivre la course en reprenant le témoin là où RBO l’a déposé il y a de cela plusieurs années.

Sauf que pour ce faire, faudrait travailler très fort. Lire les journaux et pas seulement se contenter de la page des potins, écouter les infos et s’intéresser à ce qui se passe ailleurs dans le monde, voir tout ce qui sort en salle, écouter tout ce qui se fait de neuf en musique. En plus d’aiguiser son sens critique sur une base quotidienne tout en développant un argumentaire solide sur les travers du monde et de la société en général.

Et surtout, mais alors là s-u-r-t-o-u-t, éviter de se regarder constamment le nombril en consacrant la moitié de ses sketchs aux défauts de sa blonde, en racontant sa dernière visite au Costco et en faisant des jokes de douchebags de niveau secondaire 1.

Avouez qu’avec la dernière phrase, je viens d’en disqualifier une couple…

Les opinions exprimées dans cette tribune ne sont pas nécessairement celles de Métro.

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