Soutenez

«Chercher l’ailleurs, chercher le meilleur»

Photo: Mario Beauregard/Métro

Voilà ce qui a poussé Christian Garcia à quitter la Colombie. Il n’était pas malheureux, mais il aspirait à mieux, et il savait que c’est ailleurs que ça se passerait.

À l’instar de bien des immigrants, Christian est un perfectionniste doublé d’un entrepreneur dans l’âme. Quand sa femme et lui décident que leur avenir est ailleurs, ils consacrent d’abord deux ans à étudier minutieusement les occasions offertes par plusieurs pays. Le Canada arrive en tête de leur palmarès. Lui l’architecte, elle l’avocate, arrivent à Montréal en mai 2013.

Très vite – après un premier entretien d’embauche catastrophique («Je ne comprenais rien, et je ne maîtrisais que quelques phrases répétées en boucle: on m’a raccroché au nez!») –, Christian comprend que, sans le français, il n’ira nulle part. «On avait suivi des cours en Colombie, pour passer l’entrevue de sélection du Québec. Mais c’était du français de France. Ici, ça ne nous aidait pas.» Il suit des cours de français pendant deux ans, à temps plein, vivant de l’aide sociale.

Il décroche le premier emploi auquel il postule, dans un bureau d’architecte. Embauché comme technicien, il impressionne vite ses supérieurs. L’augmentation de salaire et des responsabilités suit. Un an plus tard, il est repéré par un chasseur de têtes : un autre bureau lui fait une offre qui ne se refuse pas. Mauvaise nouvelle au retour de son congé de paternité: le gros client pour lequel il travaillait vient d’abandonner le projet, et Christian se retrouve au chômage.

Face au vide, l’entrepreneur en lui refait surface. Et c’est un peu le hasard – la foi, pour Christian – qui le mène vers sa voie. Un ami lui parle de l’industrie, alors émergente, du drone. Grand adepte d’aéromodélisme et habitué à faire voler de petites machines téléguidées, il est intrigué. Une recherche rapide lui confirme que la technologie des drones est assez avancée pour offrir des services professionnels (production d’images aériennes, inspection de façades). «Transformer sa passion en profession est la meilleure formule pour réussir et être heureux: j’ai foncé.» Il monte son plan d’affaires dans le cadre d’un cours de création d’entreprise, et tout s’enchaîne. Les prix et distinctions, assortis de possibilités de financement, placent son entreprise, Drones Falcon Bleu, sur une rampe de lancement. Il est notamment lauréat régional, puis national, du Concours en entrepreneuriat québécois, alors que son entreprise ne dispose que de 
1000$ de liquidités. «L’industrie du drone était encore méconnue. Personne ne connaissait vraiment son potentiel. J’ai consacré la première année au marketing.» Avec succès.

L’année suivante, les contrats rentrent, et deux ans plus tard, son chiffre d’affaires bondit de 40%. Aujourd’hui, Christian Garcia a l’embarras du choix, et un éventail d’occasions s’offre à son entreprise, qui n’a pas échappé au radar de gros joueurs.

«Pour moi, immigrant débarqué voilà à peine sept ans, sans maîtriser alors ni le français ni l’anglais, avoir remporté des prix en battant des entrepreneurs locaux solidement installés est une fierté.» C’est aussi la démonstration que tout est possible. En choisissant de partir, il a laissé derrière lui son cabinet d’architectes qui roulait rondement. Il a aussi décidé de relever un défi de taille. Sa femme et lui n’avaient jamais franchi les frontières de la Colombie. Ils sont repartis de rien, à la seule force de leur détermination.

Accepter de vivre dans la précarité pendant deux ans pour apprendre le français, subir parfois la discrimination en raison de leur accent ou de leur peau basanée… Rien de facile. «Il faut se fixer des objectifs, un à la fois, et se concentrer là-dessus. Ça développe la patience. Il faut accepter que tout ne vienne pas tout de suite. Et ensuite, nos efforts portent des fruits. C’est avec ça qu’on donne de l’espoir à ceux qui prennent le même chemin.»

Aujourd’hui, Christian bâtit des igloos dans sa cour, parce qu’il aime l’hiver et que jouer dehors fait partie de ces petits bonheurs qu’il cherchait «ailleurs». Avec le soin qu’il met dans chaque projet, petit ou grand. «Un vrai travail de professionnel», commentent les voisins. De perfectionniste, à n’en pas douter.

Une fois par mois, Métro propose des portraits 
inspirants de Montréalais issus de l’immigration 
qui témoignent de leurs 
parcours et de leurs succès.
L’émission de Radio-
Canada International Tam-Tam Canada a produit une version radio de ce reportage. Réalisée par la journaliste Paloma 
Martinez-Mendez, cette émission est disponible 
sur le site de RCI.

Articles récents du même sujet

Mon
Métro

Découvrez nos infolettres !

Le meilleur moyen de rester brancher sur les nouvelles de Montréal et votre quartier.