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Revaloriser les petites mains

Photo: Collaboration spéciale

Les fashionistas sont de plus en plus nombreuses à réclamer des vêtements faits ici. Reste à convaincre les jeunes qu’il y a un avenir pour quiconque embrasse les métiers techniques de l’industrie de la mode au Québec.

«Au secondaire, les conseillers d’orientation disent aux élèves de ne pas aller en mode parce qu’ils ne trouveront jamais de job», observe Josiève Forget, assistante technique à l’École de mode du cégep Marie-Victorin, qui fait régulièrement la tournée des écoles pour promouvoir les programmes.

Pourtant, à la conférence «L’avantage d’une production locale?» organisée par Vestechpro (Centre de recherche et d’innovation en habillement de l’établissement d’enseignement), jeudi dernier, les intervenants de l’industrie étaient nombreux à s’inquiéter de la pénurie de main-d’oeuvre annoncée.

La problématique concerne particulièrement les métiers techniques, dont l’essentiel des effectifs est aux portes de la retraite. Si la relève est bien présente tant en design qu’en commercialisation de la mode, les échantillonneurs, les patronnistes, les coupeurs, les maroquiniers, les modistes, les tricoteurs et tous ces autres acteurs de l’ombre essentiels au succès des marques d’ici se feraient de plus en plus rares.

Selon une étude du Conseil des ressources humaines de l’industrie du vêtement (CRHIV) publiée en mars 2011, le problème s’accentuera encore d’ici un an. «C’est alarmant, a témoigné René Saint-Amant, président de Chemise Empire, à Louiseville. Quand une couturière ou une patronniste se présente chez nous, on l’engage immédiatement, car elles sont rares!»

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Déjà, les manufactures québécoises recherchent des solutions. «Le vieillissement de la main-d’oeuvre est très problématique pour nous, a souligné Sylvie Chalifour, pdg de Marie-Lou Évolution. La moyenne d’âge de nos couturières est de 55 ans.» Cette PME basée à Saint-Marc-des-Carrières se spécialise dans les concepts vestimentaires pour des clients corporatifs tels que Desjardins, Familiprix ou Yves Rocher. Pour assurer la pérennité de son entreprise, Mme Chalifour s’est rendue en Tunisie, où elle a engagé tout récemment quatre jeunes femmes diplômées d’une école de couture.

L’immigration ne peut pas régler entièrement le problème, a rappelé la directrice R&D de Vestechpro, Christine Harding, puisque partout dans le monde, «les métiers techniques sont de moins en moins valorisés». Plusieurs autres pistes de solutions ont été amenées en conclusion à la conférence : créer des ponts entre l’industrie et les écoles, regrouper les entreprises ou changer les perceptions par des campagnes ciblées, par exemple.

L’objectif avoué est de faire revivre au Québec une industrie qui a déjà été florissante, à l’image de ce qui a été fait pour celle de l’automobile à Detroit.

Apprendre le métier
Outre le cégep Marie-Victorin, le collège LaSalle et l’École supérieure de mode forment surtout des designers et des spécialistes du marketing – leurs programmes destinés à la production demeurant beaucoup moins populaires. À l’École des métiers des Faubourgs, trois formations d’un an et demi mènent à des diplômes d’études professionnelles (DEP) en Dessin de patron, en Confection sur mesure et retouche ou en Confection de vêtements.

Deux de ces formations seraient pourtant menacées à moyen terme, a expliqué l’enseignante Guylaine Dubreuil lors d’une table ronde jeudi dernier. Si, cette année, le nombre d’inscriptions a significativement augmenté, ces programmes de formation professionnelle ne jouissent pas d’une grande popularité, a aussi indiqué Mme Dubreuil.

Au moment de mettre sous presse, le ministère de l’Éducation n’avait pas confirmé ces informations.

Par ailleurs, le programme de DEP en Confection sur mesure et retouche est offert dans six autres centres de formation au Québec.

À lire demain dans Métro :
Les avantages de la production locale

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